Maladie d'Alzheimer et maladies apparentées : diagnostic et prise en charge de l'apathie

Recommandation de bonne pratique - Mis en ligne le 09 oct. 2014

L’élaboration de cette recommandation de bonne pratique entre dans le cadre du Plan Alzheimer 2008-2012.
La recommandation sur la prise en charge des troubles du comportement perturbateurs chez les patients atteints de maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées publiées par la HAS en 2009 a exclu les troubles du comportement déficitaires ou de retrait tels que l’apathie, également très fréquente au cours de ces maladies.
L’objectif d’amélioration des pratiques de cette recommandation est de définir chez des patients atteints de maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées :

  • la démarche diagnostique de l’apathie, qui comprend le diagnostic différentiel avec la dépression;
  • la prise en charge de l’apathie, en précisant notamment les moyens thérapeutiques non médicamenteux.

L'apathie est définie médicalement comme un déficit persistant de la motivation rapporté par le sujet lui- même ou par l’entourage. Cet état contraste avec le niveau antérieur de fonctionnement du sujet ou les standards d’âge et de culture. L’apathie comporte des dimensions comportementales (diminution des comportements volontaires dirigés vers un but), cognitives et émotionnelles.

Messages clés

  • L’apathie doit être recherchée systématiquement.

  • Elle est souvent confondue avec la dépression, un diagnostic différentiel doit être réalisé.

  • Aucun psychotrope n’a montré d’efficacité dans l’apathie des maladies neurodégénératives.

  • Le médecin traitant est le coordonnateur de la prise en charge, que le patient soit à domicile ou en institution.

  • La prise en charge doit être globale, pluri et interprofessionnelle.

Étiologie et démarche diagnostique

  • Signes d’appel : démotivation, perte d’initiatives, désintérêt, appauvrissement des activités sociales, émoussement affectif, etc. Il peut s’agir de plaintes émanant du sujet lui-même ou d’observations de l’entourage. L’ensemble de ces signes constitue des changements notables avec l’état antérieur du sujet et persiste dans le temps plus de 4 semaines.

  • Il est recommandé d’utiliser l’inventaire neuropsychiatrique (NPI pour Neuropsychiatric Inventory). Selon le lieu de vie, les versions suivantes du NPI peuvent être utilisées :
    • à domicile : NPI ou NPI-R, renseigné par le proche aidant ou un professionnel ;
    • en établissement : NPI-ES, renseigné par les soignants.
  • L’inventaire apathie (IA) permet en complément une auto et une hétéro-évaluation des composantes symptomatiques de l’apathie.

  • Il est recommandé d’éliminer une urgence vitale potentielle telle qu’une lésion cérébrale, une cause iatrogène (modification thérapeutique récente, intoxication ou sevrage) ou un épisode confusionnel et ses étiologies propres.

  • La recherche des 4 critères diagnostiques1 permet de caractériser l’apathie : (A) perte ou baisse de motivation comparativement à l’état antérieur ou au fonctionnement normal pour l’âge et le niveau culturel du patient ; (B) durée des symptômes affectant l’action, la cognition et/ou l’émotion persistant durant au minimum 4 semaines ; (C) souffrance ou interférence avec la vie sociale et occupationnelle ; (D) absence de handicap physique (cécité, surdité), de troubles moteurs, de réduction du niveau de conscience ou d’effets physiologiques directs d’une substance (médicaments, abus de toxique).

1. Robert P, Onyike CU, Leentjens AFG, Dujardin K, Aalten P, Starkstein S, et al. Proposed diagnostic criteria for apathy in Alzheimer's disease and other neuropsychiatric disorders. Eur Psychiatry 2009;24(2):98-104.

Diagnostic différentiel avec la dépression

  • L’apathie et  l’état dépressif comprennent des symptômes  similaires : diminution  ou perte d’intérêt, ralentissement psychomoteur apparent, asthénie, apparente diminution des capacités introspectives, sentiment de manque d’énergie.

  • Il est recommandé en cas de suspicion d’épisode dépressif majeur d’en rechercher les signes spécifiques : humeur triste pathologique (car persistante ou particulièrement intense) ou ruminations dépressives en elles-mêmes (pessimisme, surgénéralisation morbide, autodévalorisation, culpabilité, sentiment de désespoir, sentiment d’incurabilité, idéations suicidaires, insomnies matinales).

  • Les antécédents personnels et familiaux d’épisodes dépressifs majeurs sont également à prendre en compte.

  • Dans les situations complexes, le recours à un avis et/ou à une prise en charge spécialisée par un psychiatre, idéalement expérimenté en gérontopsychiatrie, est à proposer.

Prise en charge thérapeutique

  • Il est recommandé d’utiliser en première intention des techniques de soins appropriées aux comportements apathiques. Elles reposent sur les attitudes suivantes :
    • attitude bienveillante et non stigmatisante envers le patient (« il est apathique et non fainéant ») ;
    • recherche des potentialités préservées à solliciter et à valoriser afin d’éviter de le mettre en échec ;
    • stimulations adaptées aux centres d’intérêt et aux capacités du patient ;
    • choix préférentiels d’environnements familiers et rassurants.
  • Les interventions non médicamenteuses (thérapies de stimulations cognitives, de réhabilitation psycho-socio-cognitive écologique, d’intervention par évocation du passé, d’activités de groupe liées à la vie quotidienne) n’ont pas apporté la preuve de leur efficacité du fait de limites méthodologiques. Néanmoins, elles sont, tant en ambulatoire (accueil de jour, ESA) qu’en institution (EHPAD, PASA), un élément de la prise en charge thérapeutique globale. Elles peuvent être proposées à titre individuel ou collectif et être pratiquées par un personnel formé.

  • La première étape de l’approche pharmacologique de l’apathie consiste à diminuer et à arrêter, dans la mesure du possible, les médicaments à risque d’effets secondaires favorisant l’apathie (en particulier les antidépresseurs).

  • Les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase (donépézil, galantamine, rivastigmine) et la mémantine ne sont pas recommandés chez des patients apathiques ayant une maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée. Néanmoins, ils peuvent être prescrits dans le cadre de la prise en charge globale d’une maladie d’Alzheimer conformément aux recommandations de la HAS2.

2. Haute Autorité de santé. Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : diagnostic et prise en charge. Saint-Denis La Plaine: HAS; 2011.

Accompagnement des proches aidants, formation des professionnels et adaptation de l'environnement

  • La prise en charge de l’apathie doit reposer sur une stratégie développée et adaptée à chaque patient. Les actions générales concernent :

- l’information et le soutien aux proches aidants ;
- la formation des professionnels ;
- l’adaptation de l’environnement du patient : il doit être sécurisant et rassurant, avec des sources de stimulations positives raisonnables, et favorisant l’autonomie du patient dans les actes de la vie quotidienne.

Diagnostic et prise en charge globale, pluri et interprofessionnelle

 

Diagnostic et prise en charge globale, pluri et interprofessionnelle de l'apathie

 


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