Place de la stratégie couplant les dosages de la trypsine immunoréactive (TIR) et de la protéine associée à la pancréatite (PAP) dans le dépistage systématique de la mucoviscidose en France

Recommandation en santé publique - Mis en ligne le 03 juin 2015

La méthode utilisée repose sur une comparaison des performances diagnostiques et de l’efficience de différentes stratégies de dépistage, incluant ou non un test génétique. Une analyse des enjeux éthiques a été réalisée afin de mettre en perspective les résultats observés.

Résultats sur les critères de jugement principaux de l’étude économique

Parmi les quatre stratégies comparées, aucune différence statistique en termes de performances (nombre de cas de formes classiques dépistés) n’a été mise en évidence d’une part, entre les stratégies TIR-PAP et TIR-ADN et d’autre part, entre les deux stratégies TIR-PAP-ADN avec ou sans rattrapage.

Les analyses statistiques suggèrent un risque de perte de chance avec les stratégies TIR-PAP-ADN, avec ou sans rattrapage, par rapport à la stratégie actuelle. Ce risque a été estimé, pour la stratégie TIR-PAP-ADN sans rattrapage, à 9 cas maximum de forme classique non dépistés par an en France.

Les stratégies TIR-PAP et TIR-PAP-ADN sans rattrapage sont les moins coûteuses (respectivement 1 603 866€ et 1 612 846€ versus 1 929 121€ pour la stratégie actuelle).

Il existe une incertitude sur le coût réel du test de la sueur. La stratégie TIR-PAP-ADN sans rattrapage est moins coûteuse que la stratégie TIR-PAP dès que le coût du test de la sueur est supérieur à 31€. La stratégie TIR-ADN est toujours plus coûteuse que la stratégie TIR-PAP, sauf si le coût du test de la sueur dépasse 417€.

Si le risque de perte de chance associé à la stratégie TIR-PAP-ADN sans rattrapage est considéré comme inacceptable, alors la stratégie TIR-PAP est la stratégie dominante.

Cependant, compte tenu de l’incertitude associée aux résultats sur les critères de jugement principaux, l’arbitrage entre les deux stratégies non dominées, TIR-PAP et TIR-PAP-ADN sans rattrapage peut également tenir compte des critères de jugement secondaires.

 

Résultats sur les critères de jugement secondaires de l’étude économique

Concernant le nombre de cas de formes frontières détectés, il n’a pas été mis en évidence de différence entre les stratégies.

Concernant les hétérozygotes, la stratégie TIR-PAP-ADN sans rattrapage conduit à la détection incidente de porteurs sains contrairement à la stratégie TIR-PAP, qui n’identifie pas de porteurs sains. Ce nombre est cependant limité par rapport à la stratégie actuelle : 118 cas avec la stratégie TIR-PAP-ADN sans rattrapage versus 241 cas avec la stratégie actuelle. L’identification des hétérozygotes soulève un désaccord raisonnable mettant en jeu les principes d’autonomie et de justice.

Concernant le nombre de tests de la sueur réalisés chez des nouveau-nés finalement non malades, la stratégie TIR-PAP-ADN sans rattrapage permet de limiter significativement le nombre de familles convoquées « à tort » (n= 118) par rapport à la stratégie TIR-PAP (n=1 164) et à la stratégie actuelle (n=333). Il existe un double enjeu, éthique et organisationnel, lié à ce critère, les tests de la sueur ayant un impact important en termes d’anxiété pour les familles et en termes d’organisation pour les CRCM.

 

Recommandations

Compte des résultats de l’analyse économique, et notamment du risque de perte de chance associé à la stratégie TIR-PAP-ADN sans rattrapage, et de l’analyse des enjeux éthiques liés aux modalités de dépistage, la HAS recommande l’abandon de la stratégie actuelle TIR-ADN au profit d’une stratégie TIR-PAP.

Compte tenu de l’anxiété générée par la réalisation d’un test à la sueur chez un nouveau-né et du nombre de nouveau-nés convoqués qui s’avèreront non malades, l’information des parents devrait être renforcée sur l’éventualité que leur enfant soit convoqué à un test de la sueur qui se révélera négatif pour la plupart des enfants concernés. Cette information vise à présenter le test de la sueur comme faisant partie intégrante du processus de dépistage afin, le cas échéant, de limiter autant que possible l’anxiété des parents en évitant qu’ils perçoivent ce test comme le signal d’un diagnostic imminent de mucoviscidose.

Par ailleurs, la recommandation suivante de 2009 de la HAS est réitérée : « La HAS recommande d’envisager la possibilité d’informer une première fois les parents en période prénatale sur la mucoviscidose, le fonctionnement du dépistage et les conséquences possibles du programme pour eux, avec éventuellement la remise d’un document écrit synthétique et l’accès à des ressources complémentaires pour les parents qui le souhaiteraient. »

Concernant l’identification des nouveau-nés atteints de forme frontière, les recommandations suivantes de 2009 de la HAS sont réitérées :

  • « La HAS recommande de préciser les critères diagnostiques qui doivent conduire à organiser un suivi régulier en CRCM pour un nouveau-né et ceux qui ne doivent pas conduire à un suivi en CRCM.
  • La HAS recommande de définir la prise en charge optimale des nouveau-nés atteints de formes frontières de la mucoviscidose.
  • La HAS recommande d’évaluer l’impact, notamment psychologique, du dépistage néonatal pour les enfants diagnostiqués avec une forme modérée de la maladie. »

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