Cette recommandation de bonne pratique vise à déterminer la place de l’isolement et de la contention en psychiatrie générale. Son objectif est de permettre aux professionnels de santé amenés à recourir éventuellement à ces mesures de dernier recours, d’améliorer et d’harmoniser leurs pratiques, en répondant aux exigences cliniques, éthiques, légales et organisationnelles. La finalité est la sécurité et l’amélioration de la qualité de la prise en charge des patients.

 

Isolement en psychiatrie générale

Placement du patient à visée de protection, lors d’une phase critique de sa prise en charge thérapeutique, dans un espace dont il ne peut sortir librement et qui est séparé des autres patients. Tout isolement ne peut se faire que dans un lieu dédié et adapté.

L’isolement est une mesure limitée dans le temps, sur décision d’un psychiatre, conformément à la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016, dans le cadre d’une démarche thérapeutique, après concertation pluriprofessionnelle, qui impose la prescription d’une surveillance et d’un accompagnement intensifs. L’utilisation de l’isolement représente un processus complexe, de dernier recours, justifié par une situation clinique. Le processus comprend lui-même de nombreux éléments, décision, accompagnement du patient, délivrance de soins, surveillance, etc. réalisés par les différents professionnels d’une équipe de soins, selon leurs champs de compétence et de responsabilité.

 

Messages clés

  • L’isolement est indiqué en dernier recours, pour une durée limitée, et uniquement de manière adaptée, nécessaire, et proportionnée au risque, après une évaluation du patient.
  • Seuls les patients faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement peuvent être isolés.
  • L’isolement est réalisé sur décision d’un psychiatre, d’emblée ou secondairement.
  • Un entretien et un examen médical sont réalisés au moment de l’isolement.
  • Une fiche particulière de prescription du suivi de la décision doit être présente dans le dossier du patient.
  • À l’initiation de la mesure, l’indication est limitée à 12 heures. Si l’état de santé le nécessite, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées dans les 12 heures. En cas de prolongation, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées toutes les 24 heures. Les isolements de plus de 48 heures doivent être exceptionnels.
  • Le patient bénéficie au minimum de deux visites médicales par 24 heures.
  • Il est indispensable, au moment de la mise en place de la mesure d’isolement, de donner au patient des explications claires concernant les raisons de l’isolement et les critères permettant sa levée.
  • La mise en place d’une mesure d’isolement doit être effectuée dans des conditions de sécurité suffisantes pour le patient et l’équipe de soins.
  • La mesure d’isolement est faite dans un espace prévu et dédié à cet effet afin de procurer un environnement soignant et sécurisé, notamment sur le plan architectural.
  • L’isolement doit être levé, sur décision médicale, dès que son maintien n’est plus cliniquement justifié.
  • Après la sortie d’isolement, il est proposé au patient de reprendre l’épisode avec les membres de l’équipe. Cela donne lieu à une analyse clinique tracée dans le dossier du patient.
  • À l’issue d’une mesure d’isolement, un temps de reprise en équipe pluriprofessionnelle doit avoir lieu.
  • Chaque mesure d’isolement doit être enregistrée dans un registre en préservant l’anonymat du patient. Ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé ayant surveillé le patient.
  • Il est souhaitable d’aménager des espaces d’apaisement dans les unités de soins, lieu dont la porte n’est pas fermée à clé et conçu pour procurer un espace de faible stimulation afin de permettre une diminution de la tension interne d’un patient.

 

Indications

  • Prévention d’une violence imminente du patient ou réponse à une violence immédiate, non maîtrisable, sous-tendue par des troubles mentaux, avec un risque grave pour l’intégrité du patient ou celle d’autrui.

  • Uniquement lorsque des mesures alternatives différenciées, moins restrictives, ont été inefficaces ou inappropriées, et que les troubles du comportement entraînent un danger important et imminent pour le patient ou pour autrui.

  • En dernier recours, pour une durée limitée, et uniquement de manière adaptée, nécessaire, et proportionnée au risque, après une évaluation du patient.

  • Mesure pleinement justifiée par des arguments cliniques.

 

Contre-indications

  • Jamais pour punir, infliger des souffrances ou de l’humiliation ou établir une domination.

  • En aucun cas pour résoudre un problème administratif, institutionnel ou organisationnel, ni répondre à la rareté des intervenants ou des professionnels.

  • État clinique ne nécessitant pas un isolement.

  • Réflexion bénéfices-risques à mener lorsqu’il existe des risques liés à l’état somatique du patient, une affection organique dont le diagnostic ou le pronostic peut être grave.

 

Les personnes placées sous main de justice

Ces situations sont régies par l’article L. 3214-1 du Code de la santé publique qui prévoit que ces personnes soient adressées en unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA).
Cependant, dans la pratique, certains détenus sont hospitalisés au sein de services de psychiatrie générale.
Quel que soit le lieu d’hospitalisation, le recours à l’isolement relève d’une nécessité médicale (cf. guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice publié par le ministère de la Justice et le ministère des Affaires sociales et de la Santé qui en précise les conditions dans sa dernière version - octobre 2012).

 

Modalités de mise en oeuvre

  • Ne peuvent être isolés que les patients faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement.

  • L’isolement est réalisé sur décision d’un psychiatre, d’emblée ou secondairement. Dans ce dernier cas, la décision qui pourrait avoir été prise par l’équipe soignante doit être confirmée dans l’heure qui suit le début de l’isolement, après un examen médical permettant de déterminer si l’isolement est justifié, s'il doit être maintenu ou s’il doit être levé.

  • Un entretien et un examen médical sont réalisés au moment de l’isolement pour :
    • évaluer l’état mental, émotionnel et physique du patient, avec une attention particulière à l’état cardiaque et respiratoire ;
    • expliquer au patient les raisons de l’isolement et les critères permettant sa levée ;
    • expliquer la surveillance qui sera effectuée ;
    • discuter, avec l’équipe soignante impliquée dans la mise en place de la mesure, des facteurs déclenchants de l’épisode, des mesures moins restrictives employées, des raisons cliniques de l’isolement et de l’évolution clinique du patient en isolement ;
    • identifier et mettre en place les soins permettant d’accélérer la levée de l’isolement.
  • Le médecin est préférentiellement le psychiatre traitant du patient dans l’unité de soins. En cas de décision prise par un interne ou un médecin non psychiatre, et durant les périodes de garde, cette décision doit être confirmée par un psychiatre dans l’heure qui suit. Cette confirmation peut se faire par téléphone en fonction des informations échangées. Cette confirmation doit être tracée dans le dossier du patient.
  • Une fiche particulière de prescription du suivi de la décision doit être présente dans le dossier du patient et comporte :
    • l’identité du patient ;
    • la date et l’heure de début et de fin de mise en isolement ;
    • le nom de l’unité, les modalités d’hospitalisation ;
    • le motif de la mise en isolement, les risques de violence imminente ou immédiate, non maîtrisable, envers autrui ou envers lui-même clairement tracés ;
    • des précisions sur ce qui a été vainement mis en oeuvre préalablement afin de justifier que la mesure est bien prise en dernier recours ;
    • la recherche de contre-indications à l’isolement ;
    • les modalités de dispensation du traitement médicamenteux privilégiant une voie per os chaque fois que possible, en situation d’urgence, en complétant la fiche de traitement ;
    • les modalités de surveillance adaptées à l’évaluation des risques somatiques et psychiques ;
    • les consignes devant permettre au patient de manger, de boire, d’aller aux toilettes ou de se laver clairement tracées.
  • Il convient de s’assurer que les patients bénéficient d’un accès à l’alimentation, à l’hydratation et à l’hygiène.
  • À l’initiation de la mesure, l’indication est limitée à 12 heures. Si l’état de santé le nécessite, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées dans les 12 heures. En cas de prolongation, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées toutes les 24 heures en concertation avec l’équipe soignante. L’équipe soignante réévalue l’état clinique et peut solliciter le psychiatre pour la levée de la mesure à tout moment. La mesure ne doit pas être maintenue plus longtemps que nécessaire. Les isolements de plus de 48 heures doivent être exceptionnels.

  •  Le patient bénéficie au minimum de deux visites médicales par 24 heures.

  • En aucun cas, le recours à une mesure d’isolement ne doit devenir un mode d’intervention systématique à l’endroit d’un patient qui a des comportements à risque. Chaque fois qu’un patient a un tel comportement, les professionnels habilités doivent s’interroger sur les causes sous-jacentes à ce comportement.

  • Toute mesure programmée d’isolement est à proscrire. La mesure « si besoin » ne peut s’appliquer.

  • De façon exceptionnelle et uniquement dans les situations d’urgence, il peut être possible d’isoler pour des raisons tenant à sa sécurité un patient en soins libres. La durée de cet isolement doit être la plus courte possible, adaptée et proportionnée au risque, ne pouvant pas dépasser les 12 heures, soit le temps maximum nécessaire à la résolution de la situation d’urgence ou à l’initiation de la transformation du régime de soins.

 

Surveillance

  • Chaque examen ou surveillance doit être consigné dans le dossier du patient où une fiche peut être identifiée stipulant le nom du soignant, la date et l’heure ainsi que les examens ou surveillances effectués. Il s’agit notamment :
    • des observations et soins effectués lors des surveillances ;
    • des examens médicaux pratiqués ;
    • des aliments et boissons pris ;
    • des soins personnels (hygiène, élimination) ;
    • des visites de l’équipe soignante et d’un relevé de l’état clinique.
  • Le patient bénéficie d’au moins deux visites médicales par 24 heures afin :
    • d’évaluer son état physique, psychique et son comportement du patient ;
    • d’évaluer la nécessité de maintien de la mesure ;
    • d’évaluer les effets des traitements médicamenteux ;
    • de réévaluer le rythme et la nature des surveillances à effectuer.
  • L’équipe soignante peut demander à ce que les évaluations médicales soient effectuées plus fréquemment si elle note un changement en termes d’évolution permettant une levée de l’isolement ou une détérioration de l’état physique ou psychique du patient.

  • Le rythme de surveillance de l’état somatique et psychique par l’équipe soignante est précisé par le médecin et adapté en fonction des nécessités thérapeutiques et du (des) risque(s) présenté(s) par le patient. Il relève donc de son jugement clinique.

  • La surveillance de l’état psychique par l’équipe soignante se fait au moins toutes les heures et peut aller jusqu’à une surveillance continue.

  • La surveillance des paramètres physiologiques est assurée par l’équipe soignante (tension artérielle, fréquence cardiaque, saturation en oxygène, etc.) en fonction de la prescription médicale.

  • Les sevrages sont pris en compte en proposant des traitements substitutifs, notamment pour le tabac.

  • Cette surveillance régulière du patient doit permettre de rétablir un contact, de travailler l’alliance, de prévenir les risques de complications somatiques. Elle est réalisée par au moins deux membres de l’équipe soignante :

  • avec une attention particulière à l’état psychique du patient et aux signes d’aggravation de l’état somatique éventuels ;

  • avec une attention particulière aux signes de défaillance cardiaque ou respiratoire ;

  • en considérant l’état d’hydratation, d’alimentation, d’hygiène et les besoins d’élimination.

  • Tout incident doit être tracé dans le dossier du patient.

  • Une attention particulière est portée aux patients les plus à risque sur le plan somatique ou psychique, notamment :

  • les patients extrêmement agités ;

  • les patients intoxiqués par l’alcool ou des substances psychostimulantes ;

  • les patients ayant des antécédents cardiaques ou respiratoires, une obésité morbide, des troubles neurologiques et/ou métaboliques ;

  • les patients âgés ;

  • les femmes enceintes ou en période de post-partum ;

  • les patients victimes de sévices dans le passé.

 

Information du patient

  • Il est indispensable, au moment de la mise en place de la mesure d’isolement, de donner au patient, des explications claires concernant les raisons de l’isolement et les critères permettant sa levée.

  • L’explication doit être donnée dans des termes compréhensibles par le patient et répétée, si nécessaire, pour faciliter la compréhension.

  • Il est nécessaire d’expliquer au patient ce qui va se passer durant la période d’isolement (surveillance, examens médicaux, traitement, toilettes, repas, boisson).

  • Dans la recherche d’une alliance thérapeutique avec le patient, sauf dispositions prévues par la législation (majeurs sous tutelle, mineurs) et dans le respect du code de déontologie, il est demandé au patient s’il souhaite prévenir sa personne de confiance ou un proche. Dans ce cas, les moyens les mieux adaptés à la délivrance de cette information doivent être recherchés.

 

Sécurité du patient et des soignants - Conditions de l'isolement

  • La mise en place d’une mesure d’isolement doit être effectuée dans des conditions de sécurité suffisantes pour le patient et l’équipe de soins.

  •  Les services doivent être dotés d’équipes soignantes adaptées aux besoins quotidiens en matière de prise en charge psychiatrique et de sécurité.

  •  Un nombre suffisant de soignants doit être présent pour assurer de façon sûre et efficace la gestion de la situation de crise.

  • Dans les situations de grande tension, l’équipe doit pouvoir identifier le moment où le patient est encore accessible et disponible pour l’échange et le moment où il ne l’est plus. C’est le moment où l’équipe doit agir tout en maintenant une communication verbale.

  • Une partie de l’équipe se consacre à la situation de crise, une autre partie prend en charge et rassure les autres patients. Un professionnel doit prendre le leadership et coordonner la gestion des interventions.

  • Il faut essayer de circonscrire le plus rapidement possible un espace de prise en charge, séparé des autres patients, et respecter un positionnement des soignants, dans l’espace à proximité d’une sortie.

  • S’il n’est pas présent, le médecin de l’unité ou le médecin de garde est informé de la situation et sollicité pour intervenir le plus rapidement possible. S’il s’agit du médecin qui connaît le patient, il faut l’informer des facteurs repérés comme pouvant expliquer la situation de crise (frustration, prise de toxiques, exacerbation hallucinatoire…). S’il s’agit du médecin de garde, lui présenter succinctement le patient, l’existence de personnes ressources, les facteurs d’alliance possibles, etc.

  • Parallèlement, des renforts sont sollicités pour une intervention en soutien. Un professionnel de l’unité concernée accueille et informe l’équipe de renforts. L’intervention des renforts doit faire l’objet d’une procédure écrite qui précise la place des renforts dans une stratégie d’équipe et peut prévoir des réponses graduées.

  • Les équipes doivent être formées et entraînées à la prévention, à la gestion de la violence et aux techniques de désamorçage.

  • L’équipe soignante doit être formée aux premiers secours, et les médecins, à l’utilisation du matériel de réanimation.

  • La mesure d’isolement doit respecter les droits des patients à la dignité et au respect de leur intégrité corporelle.

  • Un patient en isolement, en fonction de la clinique, doit pouvoir garder ses vêtements et certains objets personnels ayant une signification pour lui, ou être en pyjama pour sa sécurité.

  • En fonction de l’état clinique du patient, des sorties de courte durée de l’espace d’isolement peuvent être proposées, en présence des soignants.

  • L’entrée et la sortie du patient en isolement sont signalées en temps réel aux services de sécurité incendie de l’établissement.

  • Le début et la fin de toute mesure d’isolement sont portés à la connaissance du praticien hospitalier d’astreinte, de l’interne et du cadre de garde.

 

L'espace d'isolement

  • La mesure d’isolement est faite dans un espace prévu et dédié à cet effet afin de procurer un environnement soignant et sécurisé, notamment sur le plan architectural.

  •  L’absence de tout objet dangereux est vérifiée dans l’espace d’isolement ainsi que sur le patient. En cas d’existence d’un objet dangereux, les mesures adaptées sont prises.

  • Il doit respecter l’intimité et la dignité du patient et permettre le repos et l’apaisement.

  • La disponibilité de la chambre du patient est assurée à tout moment.

  • L’espace d’isolement est suffisamment grand pour permettre d’accueillir le patient et un nombre suffisant de soignants.

  • L’espace d’isolement bénéficie d’un accès aux toilettes et à la douche.

  • L’espace d’isolement est entretenu et propre.

  • L’espace d’isolement est pourvu d’équipements de qualité ne présentant pas de danger pour le patient, notamment un mobilier (lit, siège, etc.) confortable mais sécurisé et robuste ne pouvant devenir un objet dangereux.

  • L’espace d’isolement est équipé de moyens d’orientation temporelle : heure, date, nouvelles ou informations…

  • Il permet à l’équipe d’observer et de communiquer facilement avec le patient.

  • Il est situé à proximité du bureau infirmier afin de permettre une surveillance rapprochée et disposer de deux accès.

  • Il est équipé d’un dispositif d’appel toujours accessible par le patient.

  • Il est bien isolé et ventilé avec un contrôle de la température à l’extérieur de la pièce.

  • Il est équipé d’un dispositif d’éclairage pouvant être réglé de l’extérieur pour permettre la surveillance, mais incluant un éclairage qui peut être contrôlé par le patient.

  • La prise en charge du patient nécessite une surveillance physique et une interaction relationnelle qui ne peuvent être remplacées par un système de vidéosurveillance.

 

Levée de la mesure d'isolement

  • L’isolement doit être levé, sur décision médicale, dès que son maintien n’est plus cliniquement justifié.

  • L’équipe soignante peut à tout moment solliciter le médecin afin de lever la mesure.

  • L’isolement ne peut être maintenu pour des raisons organisationnelles ou institutionnelles, ni pour répondre à la rareté des professionnels.

  • La raison, l’heure et la date de la levée de l’isolement doivent être tracées dans le dossier du patient.

 

Analyse à la levée de la mesure d'isolement avec le patient

  • Après la sortie d’isolement, il est proposé au patient de reprendre l’épisode avec les membres de l’équipe. Cela donne lieu à une analyse clinique tracée dans le dossier du patient.

  • Cette analyse doit permettre :
    • de mobiliser ses aptitudes à l’autocontrôle et d’identifier, avec le patient, les interventions alternatives possibles lors d’épisodes ultérieurs et les facteurs qui peuvent être repérables rapidement pour réduire le risque de nouvel incident ;
    • d’entendre et de noter les perceptions du patient sur l’épisode d’isolement et sa relation avec l’équipe soignante ;
    • de s’assurer que ses droits et son intégrité physique et mentale ont été pris en compte pendant la durée de la mesure.
  • Dès que possible lorsque la mesure d’isolement est levée et si le patient est accessible, il est important de l’aider à comprendre les événements récents qu’il a vécus, lors d’un ou plusieurs entretiens qui ont plusieurs objectifs :
    • soutenir et prendre en charge le patient après l’épisode ;
    • fournir un soutien émotionnel au patient et valider son ressenti de l’événement : l’aider à mettre des mots sur sa souffrance, son vécu aussi bien avant, pendant et après la crise ;
    • renforcer le lien avec le patient ;
    • informer le patient sur l’événement ;
    • mieux comprendre, avec le patient, l’événement, pour prévenir sa récurrence ;
    • aider le patient à comprendre, si cela lui est possible, les facteurs internes qui ont conduit à cette crise, et ses symptômes ;
    • identifier des facteurs contextuels qui ont pu contribuer à la crise ;
    • initier ou poursuivre un travail d’éducation thérapeutique visant la reconnaissance de signes avant-coureurs, l’identification des facteurs d’apaisement et des personnes ressources ;
    • identifier ce qui a mal fonctionné, quelle information a été manquée, ce qui aurait pu être fait différemment et ce qu’il faudrait faire à l’avenir pour éviter d’avoir recours à l’isolement ;
    • discuter avec le patient des stratégies alternatives possibles afin de prévenir la récurrence de l’événement et utiliser les résultats de cette discussion pour faire évoluer le plan de soins et le plan de prévention partagé.

 

Temps de reprise en équipe pluriprofessionnelle

À l’issue d’une mesure d’isolement, un temps de reprise en équipe pluriprofessionnelle a lieu et consiste à :

  • faire une première analyse avec une diversité de points de vue ;
  • cerner la dimension clinique ;
  • recontextualiser les comportements des patients ;
  • faire une analyse de l’ensemble des facteurs ; faire la part entre ce qui revient à l’équipe, à l’institution et au patient ;
  • identifier ce qui aurait pu être évité et/ou ce qui a permis une résolution sans violence ;
  • permettre aux soignants d’exprimer leurs difficultés face à cette pratique vécue parfois avec culpabilité ; permettre aussi l’expression de la peur ou de la difficulté de prendre soin d’un patient qui a ou qui a eu un comportement violent ;
  • faire un retour sur ce qui a conduit à la mesure d’isolement ; l’information sur la mesure d’isolement ainsi que sur la levée doit être faite en toute transparence à l’ensemble de l’équipe, notamment les membres présents le jour de l’événement ;
  • permettre l’expression des difficultés éprouvées face à un contexte d’exigences contradictoires et de dissonance éthique ;
  • réfléchir à des alternatives à l’isolement : retravailler en équipe la prévention, améliorer la contenance relationnelle à travers la disponibilité, le renforcement et la qualification de l’équipe soignante.

 

Recueil des données et politique d'établissement

  • Un registre administratif doit être tenu dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement, conformément à l’article 72 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016.

  • Pour chaque mesure d’isolement, ce registre préservant l’anonymat du patient mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé ayant surveillé le patient.

  • Le registre, qui peut être établi sous forme numérique, doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP), au contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires.

  • À partir du recueil de données, les unités de soins, les services, les pôles et la commission médicale d’établissement (CME) développent une réflexion sur l’évolution du nombre de mesures d’isolement. La Commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT) est associée à ces travaux. L’établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement doit s’appuyer sur cette réflexion pour définir une politique visant à diminuer le recours à l’isolement. Cette politique doit s’appuyer sur une présence soignante pluriprofessionnelle dans les unités de soins, adaptée aux besoins d’une prise en charge basée sur la relation. Elle s’étaye, notamment pour les nouveaux diplômés, sur un programme de formation à la clinique et à la psychopathologie ainsi que sur des formations à la prévention de la violence et à la désescalade. Les critères d’évaluation de cette politique doivent être définis (comprenant notamment : nombre de soignants formés à la désescalade, nombre d’évaluations des pratiques professionnelles [EPP], protocoles spécifiques, etc.).

  • L’établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement établit, tous les ans, un rapport rendant compte des pratiques de mise en isolement, de la politique définie pour en limiter le recours et de l’évaluation de sa mise en oeuvre. La CME en fait un axe de sa politique qualité et sécurité des soins et un volet de son projet médical. Ce rapport doit être présenté pour avis au conseil de surveillance, à la commission des usagers (CDU).

  • Tout événement indésirable consécutif à l’isolement doit être déclaré et faire l’objet d’une reprise en équipe, et éventuellement de retour d’expérience en cas de gravité (cf. décret n° 2016-1606 du 25 novembre 2016 relatif à la déclaration des événements indésirables graves associés à des soins et aux structures régionales d’appui à la qualité des soins et à la sécurité des patients).

 

L'espace d'apaisement dans une désescalade

  • Il est souhaitable d’aménager des espaces d’apaisement dans les unités de soins.

  • L’espace d’apaisement est un lieu dont la porte n’est pas fermée à clé et conçu pour procurer un espace de faible stimulation afin de permettre une diminution de la tension interne d’un patient.

  • Il est utilisé de façon volontaire, le plus souvent sur demande du patient ou sur suggestion de l’équipe soignante, dans le respect d’un cadre défini pour son utilisation.

  • Le patient peut choisir de quitter l’espace d’apaisement à tout moment.

  • Il peut contenir des matelas, du matériel pour écouter de la musique, des fauteuils confortables, des livres, des lumières douces, etc.

  • Avec l’accord du patient, sa chambre, dont il peut sortir à tout moment, peut également être utilisée dans un accompagnement soignant de désescalade.

 

Contention mécanique en psychiatrie générale

 

Il existe plusieurs types de contentions, dont les contentions physique et mécanique.

  • Contention physique (manuelle) : maintien ou immobilisation du patient en ayant recours à la force physique.
  • Contention mécanique : utilisation de tous moyens, méthodes, matériels ou vêtements empêchant ou limitant les capacités de mobilisation volontaire de tout ou partie du corps dans un but de sécurité pour un patient dont le comportement présente un risque grave pour son intégrité ou celle d’autrui.

La contention mécanique est une mesure d’exception, limitée dans le temps, sur décision d’un psychiatre, conformément à la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016, dans le cadre d’une démarche thérapeutique, après concertation pluriprofessionnelle, qui impose la prescription d’une surveillance et d’un accompagnement intensifs.
L’utilisation d’une mesure de contention mécanique représente un processus complexe, de dernier recours, justifié par une situation clinique.
Le processus comprend lui-même de nombreux éléments, décision, accompagnement du patient, délivrance de soins, surveillance… réalisés par les différents professionnels d’une équipe de soins, selon leurs champs de compétence et de responsabilité.
Seule la contention mécanique est abordée dans cette recommandation de bonne pratique.

 

Messages clés

  • La contention est indiquée exceptionnellement en dernier recours, pour une durée limitée et strictement nécessaire, après une évaluation du patient, et uniquement dans le cadre d’une mesure d’isolement.
  • La contention mécanique ne peut s’exercer que dans le cadre d’une mesure d’isolement. Ne peuvent être isolés que les patients faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement.
  • La mise sous contention mécanique est réalisée sur décision d’un psychiatre, d’emblée ou secondairement.
  • Un entretien et un examen médical sont réalisés au moment de la mise sous contention mécanique.
  • Une fiche particulière de prescription du suivi de la décision doit être présente dans le dossier du patient.
  • À l’initiation de la mesure, l’indication est limitée à 6 heures. Si l’état de santé le nécessite, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées dans les 6 heures. En cas de prolongation, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées toutes les 24 heures. Les contentions mécaniques de plus de 24 heures doivent être exceptionnelles.
  • Le patient bénéficie au minimum de deux visites médicales par 24 heures.
  • Il est indispensable, au moment de la mise en place de la contention mécanique, de donner au patient des explications claires concernant les raisons de la mise sous contention et les critères permettant sa levée.
  • La mise en place d’une mesure de contention mécanique doit être effectuée dans des conditions de sécurité suffisantes pour le patient et l’équipe de soins.
  •  La contention mécanique doit être faite dans un espace d’isolement prévu et dédié à cet effet afin de procurer un environnement soignant et sécurisé, notamment sur le plan architectural. Il doit respecter l’intimité du patient et permettre le repos et l’apaisement.
  • La contention mécanique doit être levée, sur décision médicale, dès que son maintien n’est plus cliniquement justifié.
  • Après la levée de la contention mécanique, il est proposé au patient de reprendre l’épisode avec les membres de l’équipe. Cela donne lieu à une analyse clinique tracée dans le dossier du patient.
  • À l’issue d’une mesure de contention mécanique, un temps de reprise en équipe pluriprofessionnelle doit avoir lieu.
  • Chaque mesure de contention mécanique doit être enregistrée dans un registre en préservant l’anonymat du patient. Ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé ayant surveillé le patient.

 

Indications

  • Prévention d’une violence imminente du patient ou réponse à une violence immédiate, non maîtrisable, sous-tendue par des troubles mentaux, avec un risque grave pour l’intégrité du patient ou celle d’autrui.
  • Uniquement lorsque des mesures alternatives différenciées, moins restrictives, ont été inefficaces ou inappropriées, et que les troubles du comportement entraînent un danger important et imminent pour le patient ou pour autrui.
  • Exceptionnellement, en dernier recours, pour une durée limitée et strictement nécessaire, après une évaluation du patient, et uniquement dans le cadre d’une mesure d’isolement.
  • Mesure pleinement justifiée par des arguments cliniques.

 

Contre-indications

  • Jamais pour punir, infliger des souffrances ou de l’humiliation ou établir une domination.
  • En aucun cas pour résoudre un problème administratif, institutionnel ou organisationnel, ni répondre à la rareté des intervenants ou des professionnels.
  • État clinique ne nécessitant pas une contention.
  • Réflexion bénéfices-risques à mener lorsqu’il existe des risques liés à l’état somatique du patient, une affection organique dont le diagnostic ou le pronostic peut être grave.

 

Modalités de mise en oeuvre

  • La contention mécanique ne peut s’exercer que dans le cadre d’une mesure d’isolement. Ne peuvent être isolés que les patients faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement.
  • La mise sous contention mécanique est réalisée sur décision d’un psychiatre, d’emblée ou secondairement. Dans ce dernier cas, la décision qui pourrait avoir été prise par l’équipe soignante doit être confirmée dans l’heure qui suit le début de la mesure, après un examen médical permettant de déterminer si la contention mécanique est justifiée, si elle doit être maintenue ou si elle doit être levée.
  • Un entretien et un examen médical sont réalisés au moment de la mise sous contention mécanique pour :
    • évaluer l’état mental, émotionnel et physique du patient, avec une attention particulière à l’état cardiaque et respiratoire ;
    • expliquer au patient les raisons de la mesure et les critères permettant sa levée ;
    • expliquer la surveillance qui sera effectuée ;
    • discuter, avec l’équipe soignante impliquée dans la mise en place de la mesure, des facteurs déclenchants de l’épisode, des mesures moins restrictives employées, des raisons cliniques de la contention mécanique et de l’évolution clinique du patient sous contention mécanique ;
    • identifier et mettre en place les soins permettant d’accélérer la levée de la contention mécanique.
  • Le médecin est préférentiellement le psychiatre traitant du patient dans l’unité de soins. En cas de décision prise par un interne ou un médecin non psychiatre, et durant les périodes de garde, cette décision doit être confirmée par un psychiatre dans l’heure qui suit. Cette confirmation peut se faire par téléphone en fonction des informations échangées. Cette confirmation doit être tracée dans le dossier du patient.
  • Une fiche particulière de prescription du suivi de la décision doit être présente dans le dossier du patient et comporte :
    • l’identité du patient ;
    • la date et l’heure de début et de fin de mise sous contention mécanique ;
    • le nom de l’unité, les modalités d’hospitalisation ;
    • le motif de la mise sous contention mécanique, les risques de violence imminente ou immédiate, non maîtrisable, envers autrui ou envers lui-même, clairement tracés ;
    • des précisions sur ce qui a été vainement mis en oeuvre préalablement afin de justifier que la mesure est bien prise en dernier recours ;
    • la recherche de contre-indications à la contention mécanique ;
    • les modalités de dispensation du traitement médicamenteux privilégiant une voie per os chaque fois que possible, en situation d’urgence, en complétant la fiche de traitement ;
    • les modalités de surveillance adaptées à l’évaluation des risques somatiques et psychiques ;
    • les consignes devant permettre au patient de manger, de boire, d’aller aux toilettes ou de se laver clairement tracées.
  • Il convient de s’assurer que les patients bénéficient d’un accès à l’alimentation, à l’hydratation et à l’hygiène.
  • À l’initiation de la mesure, l’indication doit être limitée à 6 heures maximum. Si l’état de santé le nécessite, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées dans les 6 heures. En cas de prolongation, la décision et la fiche de prescription doivent être renouvelées toutes les 24 heures en concertation avec l’équipe soignante. L’équipe soignante réévalue l’état clinique et peut solliciter le psychiatre pour la levée de la mesure à tout moment. La mesure ne doit pas être maintenue plus longtemps que nécessaire. Les contentions mécaniques de plus de 24 heures doivent être exceptionnelles.
  • Le patient bénéficie au minimum de deux visites médicales par 24 heures.
  • En aucun cas, le recours à une mesure de contention mécanique ne doit devenir un mode d’intervention systématique à l’endroit d’un patient qui a des comportements à risque. Chaque fois qu’un patient a un tel comportement, les professionnels habilités doivent s’interroger sur les causes sous-jacentes à ce comportement.
  • Toute mesure programmée de contention mécanique est à proscrire. La mesure « si besoin » ne peut s’appliquer.

Lieu de mise en oeuvre
La contention mécanique est associée à une mise en isolement. Elle ne peut avoir lieu que dans un espace dédié avec des équipements spécifiques. La contention mécanique ne peut se faire qu’en position allongée.

 

Les exceptions

Dans le cadre de troubles psychiatriques gravissimes de longue évolution avec des conduites auto-agressives ou de mutilations répétées et dans un but de préservation de l’intégrité physique du patient, il peut être possible d’avoir recours à des moyens de contention mécanique ambulatoire tels que des vêtements de contention.

Cette contention n’est pas nécessairement associée à l’isolement et s’inscrit dans un plan de soins spécifique établi par le psychiatre traitant du patient, en dehors du cadre de l’urgence.
Le recours à cette pratique doit faire l’objet d’une évaluation clinique régulière.

Ces mesures doivent être recensées au niveau du service afin de renforcer la réflexion sur l’organisation des soins.

 

Surveillance

  • Chaque examen ou surveillance doit être consigné dans le dossier du patient où une fiche peut être identifiée stipulant le nom du soignant, la date et l’heure ainsi que les examens ou surveillances effectués. Il s’agit notamment :
    • des observations et soins effectués lors des surveillances ;
    • des examens médicaux pratiqués ;
    • des aliments et boissons pris ;
    • des soins personnels (hygiène, élimination) ;
    • des traitements administrés ;
    • des visites de l’équipe soignante et d’un relevé de l’état clinique.
  • Le patient bénéficie d’au moins deux visites médicales par 24 heures afin :
    • d’évaluer son état physique, notamment les risques de complication thromboembolique, ainsi que son état psychique et son comportement ;
    • d’évaluer la nécessité de maintien de la mesure ;
    • d’évaluer les effets des traitements médicamenteux ;
    • de réévaluer le rythme et la nature des surveillances à effectuer.
  • L’équipe soignante peut demander à ce que les évaluations médicales soient effectuées plus fréquemment si elle note un changement en termes d’évolution permettant une levée de la contention mécanique ou une détérioration de l’état physique ou psychique du patient.
  • Le rythme de surveillance de l’état somatique et psychique par l’équipe soignante est précisé par le médecin et adapté en fonction des nécessités thérapeutiques et du (des) risque(s) présenté(s) par le patient. Il relève donc de son jugement clinique.
  • La surveillance de l’état psychique par l’équipe soignante se fait au moins toutes les heures et peut aller jusqu’à une surveillance continue.
  • La surveillance des paramètres physiologiques est assurée par l’équipe soignante (tension artérielle, fréquence cardiaque, saturation en oxygène, palpation des mollets, etc.) en fonction de la prescription médicale.
  •  Les sevrages sont pris en compte en proposant des traitements substitutifs, notamment pour le tabac.
  • La vérification des points d’attaches, de l’état cutané et des besoins physiologiques du patient relève du rôle propre infirmier.
  • Cette surveillance régulière du patient doit permettre de rétablir un contact, de travailler l’alliance, de prévenir les risques de complications somatiques. Elle est réalisée par au moins deux membres de l’équipe soignante :
    • avec une attention particulière à l’état psychique du patient et aux signes d’aggravation de l’état somatique éventuels ;
    • avec une attention particulière aux signes de défaillance cardiaque ou respiratoire ;
    • en considérant l’état d’hydratation, d’alimentation, d’hygiène et les besoins d’élimination.
  • Tout incident doit être tracé dans le dossier du patient.
  • La prévention des maladies thromboemboliques doit être envisagée pour chaque patient en fonction de la balance bénéfices-risques, notamment par la prescription d’un traitement anticoagulant.
  • Une attention particulière est portée aux patients les plus à risque sur le plan somatique ou psychique, notamment :
    • les patients extrêmement agités ;
    • les patients intoxiqués par l’alcool ou des substances psychostimulantes ;
    • les patients ayant des antécédents cardiaques ou respiratoires, une obésité morbide, des troubles neurologiques et/ou métaboliques ;
    • les patients âgés ;
    • les femmes enceintes ou en période de post-partum ;
    • les patients victimes de sévices dans le passé.

 

Information du patient

  • Il est indispensable, au moment de la mise en place de la contention mécanique, de donner au patient des explications claires concernant les raisons de la mise sous contention et les critères permettant sa levée.
  • L’explication doit être donnée dans des termes compréhensibles par le patient et répétée, si nécessaire, pour faciliter la compréhension.
  • Il est nécessaire d’expliquer au patient ce qui va se passer durant la période de contention mécanique (surveillances, examens médicaux, traitement, toilettes, repas, boisson).
  • Dans la recherche d’une alliance thérapeutique avec le patient, sauf dispositions prévues par la législation (majeurs sous tutelle, mineurs) et dans le respect du code de déontologie, il est demandé au patient s’il souhaite prévenir sa personne de confiance ou un proche. Dans ce cas, les moyens les mieux adaptés à la délivrance de cette information doivent être recherchés.

 

Sécurité du patient et des soignants

  • La mise en place d’une mesure de contention mécanique doit être effectuée dans des conditions de sécurité suffisantes pour le patient et l’équipe de soins.
  • Les services doivent être dotés d’équipes soignantes adaptées aux besoins quotidiens en matière de prise en charge psychiatrique et de sécurité.
  • Un nombre suffisant de soignants doit être présent pour assurer de façon sûre et efficace la gestion de la situation de crise.
  • Dans les situations de grande tension, l’équipe doit pouvoir identifier le moment où le patient est encore accessible et disponible pour l’échange et le moment où il ne l’est plus. C’est le moment où l’équipe doit agir tout en maintenant une communication verbale.
  • Une partie de l’équipe se consacre à la situation de crise, une autre partie prend en charge et rassure les autres patients. Un professionnel doit prendre le leadership et coordonner la gestion des interventions.
  • Il faut essayer de circonscrire le plus rapidement possible un espace de prise en charge, séparé des autres patients, et respecter un positionnement des soignants, dans l’espace à proximité d’une sortie.
  • S’il n’est pas présent, le médecin de l’unité ou le médecin de garde est informé de la situation et sollicité pour intervenir le plus rapidement possible. S’il s’agit du médecin qui connaît le patient, il faut l’informer des facteurs repérés comme pouvant expliquer la situation de crise (frustration, prise de toxiques, exacerbation hallucinatoire…). S’il s’agit du médecin de garde, lui présenter succinctement le patient, l’existence de personnes ressources, les facteurs d’alliance possibles, etc.
  • Parallèlement, des renforts sont sollicités pour une intervention en soutien. Un professionnel de l’unité concernée accueille et informe l’équipe de renforts. L’intervention des renforts doit faire l’objet d’une procédure écrite qui précise la place des renforts dans une stratégie d’équipe et peut prévoir des réponses graduées.
  • Les équipes doivent être formées et entraînées à la prévention, à la gestion de la violence et aux techniques de désamorçage.
  • Les risques somatiques étant majorés en cas de contention mécanique, les équipements de réanimation, incluant un défibrillateur, de l’oxygène, du matériel de perfusion, d’aspiration et des médicaments de réanimation doivent être à proximité et rapidement disponibles.
  • L’équipe soignante doit être formée aux premiers secours, et les médecins, à l’utilisation du matériel de réanimation.
  • La mesure de contention mécanique doit respecter les droits des patients à la dignité et au respect de leur intégrité corporelle.
  • Le début et la fin de toute mesure de contention mécanique sont portés à la connaissance du praticien hospitalier d’astreinte, de l’interne et du cadre de garde.

 

Réalisation pratique de la contention mécanique

  • La mesure de contention mécanique doit être faite dans un espace d’isolement prévu et dédié à cet effet afin de procurer un environnement soignant et sécurisé, notamment sur le plan architectural. Il doit respecter l’intimité du patient et permettre le repos et l’apaisement.
  •  Le médecin présent participe à la mise sous contention mécanique.
  •  Le patient est immobilisé par 4 soignants (un par membre, empaumant chacun le bras et l’avant-bras ou le mollet et la cuisse) et un 5e soignant maintenant la tête. Lors de la mise sous contention mécanique, la tête du patient doit être protégée en s’assurant qu’il est toujours dans une position qui lui permet de respirer.
  • Dans la mesure du possible, un membre de l’équipe devrait superviser la mise sous contention mécanique pour s’assurer notamment :
    • de la protection de la tête et du cou du patient ;
    • des capacités respiratoires du patient ;
    • des signes vitaux.
  • Dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer les soins psychiatriques sans consentement, qui en dispose, une équipe de sécurité spécifiquement formée peut soutenir les soignants pour la mise sous contention mécanique.
  • L’équipe soignante :
    • s’assure que la contention manuelle, avant la mise sous contention mécanique, n’entrave pas la capacité du patient à respirer notamment en appliquant une pression sur la cage thoracique, le cou ou l’abdomen ou en obstruant la bouche ou le nez ;
    • applique, lors de la contention manuelle, une force justifiée, appropriée, raisonnable, proportionnée à la situation et durant le temps le plus court possible ;
    • s’assure que le patient sous contention peut tourner la tête sur le côté.
  • Le patient est couché sur le dos, sur un lit adapté, chaque membre est maintenu par une attache verrouillée. En fonction du niveau de contention requis par la situation clinique, une ceinture ventrale peut être mise en place. Le matériel de contention et les attaches doivent être adaptés au poids et à la stature du patient.
  • Ne jamais placer de serviette, sac, coussin sur le visage du patient, pendant ou après la mise sous contention.
  • Si possible, la tête du lit doit être surélevée pour limiter le risque d’inhalation.
  • Les objets dangereux doivent être mis à distance du patient (briquet, ceinture, objets tranchants, etc.).
  • Un dispositif d’appel fonctionnel relié aux soignants doit être accessible par le patient.
  • Si nécessaire, un traitement sédatif est administré d’emblée, autant que possible par voie orale.
  • La disponibilité de la chambre du patient sous contention et en isolement lui est assurée à tout moment dès l’amélioration de son état clinique.
  • La prise en charge du patient nécessite une surveillance physique et une interaction relationnelle qui ne peuvent être remplacées par un système de vidéosurveillance.

 

Levée de la mesure de contention mécanique

  • La contention mécanique doit être levée, sur décision médicale, dès que son maintien n’est plus cliniquement justifié.
  • L’équipe soignante peut à tout moment solliciter le médecin afin de lever la mesure.
  • La contention mécanique ne peut être maintenue pour des raisons organisationnelles ou institutionnelles, ni pour répondre à la rareté des professionnels.
  • La raison, l’heure et la date de la levée de la mesure de contention mécanique doivent être tracées dans le dossier du patient.
  • En fonction de la clinique, la levée de la mesure de contention mécanique n’est pas systématiquement associée à la levée de la mesure d’isolement.

 

Analyse à la levée de la mesure de contention mécanique avec le patient

  • Après la levée de la contention mécanique, il est proposé au patient de reprendre l’épisode avec les membres de l’équipe. Cela donne lieu à une analyse clinique tracée dans le dossier du patient.
  • Cette analyse doit permettre :
    • de mobiliser ses aptitudes à l’autocontrôle et d’identifier, avec le patient, les interventions alternatives possibles lors d’épisodes ultérieurs et les facteurs qui peuvent être repérables rapidement pour réduire le risque de nouvel incident ;
    • d’entendre et de noter les perceptions du patient sur l’épisode de contention mécanique et sa relation avec l’équipe soignante ;
    • de s’assurer que ses droits et son intégrité physique et mentale ont été pris en compte pendant la durée de la mesure.
  • Dès que possible lorsque la mesure de contention est levée et si le patient est accessible, il est important de l’aider à comprendre les événements récents qu’il a vécus, lors d’un ou plusieurs entretiens qui ont plusieurs objectifs :
    • soutenir et prendre en charge le patient après l’épisode ;
    • fournir un soutien émotionnel au patient et valider son ressenti de l’événement : l’aider à mettre des mots sur sa souffrance, son vécu aussi bien avant, pendant et après la crise ;
    • renforcer le lien avec le patient ;
    • informer le patient sur l’événement ;
    • mieux comprendre, avec le patient, l’événement, pour prévenir sa récurrence ;
    • aider le patient à comprendre, si cela lui est possible, les facteurs internes qui ont conduit à cette crise, et ses symptômes ;
    • identifier des facteurs contextuels qui ont pu contribuer à la crise ;
    • initier ou poursuivre un travail d’éducation thérapeutique visant la reconnaissance de signes avant-coureurs, l’identification des facteurs d’apaisement et des personnes ressources.

 

Temps de reprise en équipe pluriprofessionnelle

  • À l’issue d’une mesure de contention mécanique, un temps de reprise en équipe pluriprofessionnelle a lieu et consiste à :
    • faire une première analyse avec une diversité de points de vue ;
    • cerner la dimension clinique ;
    • recontextualiser les comportements des patients ;
    • faire une analyse de l’ensemble des facteurs. Faire la part entre ce qui revient à l’équipe, à l’institution et au patient ;
    • identifier ce qui aurait pu être évité et/ou ce qui aurait permis une résolution sans violence ;
    • permettre aux soignants d’exprimer leurs difficultés face à cette pratique vécue parfois avec culpabilité ; permettre aussi l’expression de la peur ou de la difficulté de prendre soin d’un patient qui a ou qui a eu un comportement violent ;
    • faire un retour sur ce qui a conduit à la mesure de contention ; l’information sur la mesure de contention ainsi que sur la levée doit être faite en toute transparence à l’ensemble de l’équipe, notamment les membres présents le jour de l’événement ;
    • permettre l’expression des difficultés éprouvées face à un contexte d’exigences contradictoires et de dissonance éthique ;
    • réfléchir à des alternatives à la contention : retravailler en équipe la prévention, améliorer la contenance relationnelle à travers la disponibilité, le renforcement et la qualification de l’équipe soignante.

 

Recueil des données et politique d'établissement

Un registre administratif doit être tenu dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement, conformément à l’article 72 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016.

  • Pour chaque mesure de contention mécanique, ce registre préservant l’anonymat du patient mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé ayant surveillé le patient.
  • Le registre, qui peut être établi sous forme numérique, doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP), au contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires.
  • À partir du recueil de données, les unités de soins, les services, les pôles et la commission médicale d’établissement (CME) développent une réflexion sur l’évolution du nombre de mesures de contention mécanique. La commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT) est associée à ces travaux. L’établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement doit s’appuyer sur cette réflexion pour définir une politique visant à diminuer le recours à la contention mécanique. Cette politique doit s’appuyer sur une présence soignante pluriprofessionnelle dans les unités de soins, adaptée aux besoins d’une prise en charge basée sur la relation. Elle s’étaye, notamment pour les nouveaux diplômés, sur un programme de formation à la clinique et à la psychopathologie ainsi que sur des formations à la prévention de la violence et à la désescalade. Les critères d’évaluation de cette politique doivent être définis (comprenant notamment : nombre de soignants formés à la désescalade, nombre d’évaluations des pratiques professionnelles [EPP], protocoles spécifiques, etc.).
  • L’établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement établit, tous les ans, un rapport rendant compte des pratiques de contention mécanique, de la politique définie pour en limiter le recours et de l’évaluation de sa mise en oeuvre. La CME en fait un axe de sa politique qualité et sécurité des soins et un volet de son projet médical. Ce rapport doit être présenté pour avis au conseil de surveillance, à la commission des usagers (CDU).
  • Tout événement indésirable consécutif à une mesure de contention mécanique doit être déclaré et faire l’objet d’une reprise en équipe, et éventuellement de retour d’expérience en cas de gravité (cf. décret n° 2016-1606 du 25 novembre 2016 relatif à la déclaration des événements indésirables graves associés à des soins et aux structures régionales d’appui à la qualité des soins et à la sécurité des patients).

 


 

 

Nous contacter

Service des bonnes pratiques