Modalités de prise de décision concernant l’indication en urgence d’une hospitalisation sans consentement d’une personne présentant des troubles mentaux

Conférence de consensus
Practice guidelines - Posted on Apr 01 2005 - Updated on Jul 19 2006

Préciser les acteurs concernés et les éléments à prendre en compte pour décider d’une hospitalisation sans consentement (hospitalisation à la demande d’un tiers ou hospitalisation d’office) :

  1. Patients potentiellement concernés
  2. Intervenant pré-hospitaliers concernés
  3. Appréciation de la capacité à consentir aux soins
  4. Moyens favorisant l’obtention d’un consentement aux soins
  5. Évaluation de l’entourage familial et social avant la mise en œuvre d’une hospitalisation sans consentement
  6. Indications d’une hospitalisation sans consentement
  7. Alternatives éventuelles à l’hospitalisation sans consentement
  8. Modalités de mise en œuvre d’une hospitalisation sans consentement (rédaction des certificats, modalités de transport, modalités d’accueil hospitalier)

 

Recommandations

Introduction

Thème des recommandations
Les recommandations proposées sont destinées à tous les professionnels impliqués dans la mise en œuvre de l’hospitalisation sans consentement d’une personne majeure. Elles ont été élaborées à la demande de la Direction générale de la santé et de la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins. Les mineurs ne sont pas concernés par ces recommandations.

Gradation des recommandations
Compte tenu du faible niveau de preuve apporté par la littérature disponible sur le thème, la totalité des recommandations ci-dessous relève d’un accord professionnel.

Hospitalisation sans consentement : une dérogation au principe général du consentement
La législation française, depuis la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, pose le consentement aux soins comme l’indispensable condition à toute prise en charge thérapeutique.

Le consentement aux soins s’inscrit de façon dynamique dans le développement d’une relation thérapeutique. Il n’a pas de caractère définitif et peut varier dans des intervalles de temps très courts chez les patients atteints de troubles mentaux, car leur conscience des troubles peut fluctuer au cours du temps, en particulier s’ils sont psychotiques.

La loi n° 90-527 du 27 juin 1990, relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux, modifiée par la loi du 4 mars 2002, conserve donc toute son actualité et sa pertinence. Elle considère que c’est l’absence de soins qui crée préjudice au patient remplissant les conditions prévues par cette loi et non pas leur mise en œuvre autoritaire. Elle ne distingue pas l’obligation de soins de la contrainte par l’institution hospitalière (hospitalisation à temps plein ou sorties d’essai).
Son préambule rappelle que le consentement aux soins demeure la règle et que le recours à la contrainte doit rester l’exception.

L’impact négatif de l’hospitalisation sans consentement n’est pas bien étudié, mais ne serait pas à négliger. Il est donc utile de rappeler que la décision d’hospitalisation sans consentement doit être limitée au strict nécessaire.

La commission départementale des hospitalisations psychiatriques (CDHP) et le procureur de la République veillent à ce que le patient bénéficie effectivement de soins et que le maintien à l’hôpital ne relève pas de la rétention arbitraire.

La participation de l’environnement familial et social à la mise en œuvre d’une hospitalisation sans consentement et sa nécessaire implication dans les soins sont peu évoquées dans la littérature. En particulier, les difficultés pouvant résulter d’une demande d’hospitalisation sans consentement rédigée par un tiers directement impliqué dans la relation avec la personne du fait de certaines pathologies (paranoïa) ou situations (conflit conjugal ou familial) ne sont pas mentionnées. Ces difficultés semblent pourtant fréquentes. 

Cadre légal
La loi du 27 juin 1990, modifiée par la loi du 4 mars 2002, est reprise dans les articles L. 3212-1 et suivants, L. 3213-1 et suivants du Code de la santé publique (www.ordmed.org) qui définissent le champ et les modalités d’application des mesures d’hospitalisation sans consentement.

Il existe 2 types d’hospitalisation sans consentement : l’hospitalisation à la demande d’un tiers (HDT) et l’hospitalisation d’office (HO).

Pour l’HDT, la loi se réfère à :

  • la présence de troubles mentaux ;
  • l’impossibilité de consentir à l’hospitalisation ;
  • la nécessité de soins immédiats et d’une surveillance constante en milieu hospitalier.

Pour l’HDT d’urgence, elle introduit la notion de péril imminent, c’est-à-dire de risque de dégradation grave de l’état de la personne en l’absence d’hospitalisation.

Pour l’HO, elle se réfère à :

  • la présence de troubles mentaux ;
  • la nécessité de soins ;
  • l’atteinte à la sûreté des personnes ou, de façon grave, à l’ordre public.

Dans la loi, il n’existe pas de critères pour définir la nécessité de soins. Il est donc recommandé de se référer aux critères cliniques et de recourir à l’hospitalisation sans consentement si le refus d’hospitalisation peut entraîner une détérioration de l’état du patient ou l’empêcher de recevoir un traitement approprié.
Contrairement à d’autres pays, la loi n’écarte a priori aucun diagnostic psychiatrique.

Données épidémiologiques
L’évaluation de la population concernée par l’hospitalisation sans consentement reste imprécise. Quelques grandes tendances sont décrites sur un plan épidémiologique :

  • une tendance globale depuis 1992 à l’augmentation du nombre de mesures d’hospitalisations sans consentement, sans qu’il soit possible de savoir si le nombre de patients concernés est également en augmentation, les hospitalisations itératives d’un même patient étant comptabilisées comme des hospitalisations distinctes ;
  • une stabilisation de la part relative des hospitalisations sans consentement dans le nombre total des hospitalisations en service de psychiatrie qui est passée de 11 % en 1992 à 13 % en 2001 ;
  • une stabilisation du nombre d’HDT de plus de 3 mois depuis 1997 et du nombre d’HO de plus de 4 mois depuis 1992 ;
  • des inégalités départementales sans explication démographique ou épidémiologique.

En Europe, la France et le Portugal sont les pays qui recourent le moins à l’hospitalisation sans consentement. Le taux d’hospitalisations sans consentement en France est 2,4 fois inférieur à celui de la Suède.


Principes généraux de prise en charge

Il est recommandé de prendre en charge sans délai tout patient relevant potentiellement d’une hospitalisation sans consentement.

Quand une décision d’hospitalisation sans consentement est envisagée pour un patient connu et/ou suivi, il est recommandé, pour une aide à la décision, de faire appel systématiquement à ses référents habituels :

  • services hospitaliers de secteur ;
  • centre médico-psychologique (CMP) ;
  • psychiatre libéral ou médecin généraliste.

En l’absence de référent habituel ou en cas d’impossibilité à les joindre, il est recommandé de s’adresser, soit directement, soit par l’intermédiaire du Centre 15 (SAMU), à un psychiatre du service d’accueil des urgences ou du CMP le plus proche.

Une fois la décision d’hospitalisation sans consentement prise, sa réalisation concrète peut mobiliser de nombreux intervenants préhospitaliers et hospitaliers (intervenants médicaux et paramédicaux, forces de l’ordre, pompiers). Le recours à un coordonnateur (Centre15-SAMU, psychiatre du service d’accueil des urgences ou de l’établissement psychiatrique d’accueil ou du CMP) est recommandé afin de limiter la perte d’information, les erreurs ou les retards d’orientation.

Il est recommandé que soit raccourci autant que possible le circuit du patient en préhospitalier comme dans le service d’accueil des urgences.

Il est recommandé que soient mises en place des actions de formation initiale et continue des intervenants hospitaliers et préhospitaliers concernant :

  • la loi du 27 juin 1990 modifiée par la loi du 4 mars 2002 ;
  • les modalités de mise en œuvre d’une hospitalisation sans consentement ;
  • la prise en charge immédiate d’un patient atteint de troubles psychiatriques.

 

Évaluation du patient et de son entourage

Cette évaluation initiale se fait selon les cas, en amont de l’admission en milieu hospitalier ou lors de cette admission.


Évaluation clinique initiale (somatique et psychiatrique) du patient
Des particularités culturelles et/ou l’absence de maîtrise de la langue française chez le patient et/ou son entourage peuvent rendre cette évaluation particulièrement difficile. Elles sont à prendre en compte pour éviter des erreurs diagnostiques.

Examen somatique
L’examen somatique doit être réalisé dès que possible. Celui-ci doit comporter au minimum la mesure des paramètres suivants :

  • vigilance ;
  • pression artérielle ;
  • pouls ;
  • température ;
  • fréquence respiratoire ;
  • glycémie capillaire.

En cas d’agitation, la mesure de la SpO2 (oxymétrie de pouls) est recommandée dès que possible.

La moindre anomalie significative doit conduire à une exploration plus approfondie en milieu hospitalier.

Place de la sédation
En cas de troubles du comportement avec réticence ou opposition du patient, une sédation peut être indiquée afin de faciliter la réalisation de l’examen somatique. Son administration vient toujours, sans s’y substituer, en complément d’une approche relationnelle pour laquelle une formation spécifique est utile. La sédation peut s’avérer d’emblée indispensable, au cas par cas.

Les classes thérapeutiques proposées pour la sédation sont :

  • les neuroleptiques, efficaces en cas d’agitation, notamment psychotique, bien que le diagnostic ne soit pas toujours évident au moment où la sédation est appliquée (les neuroleptiques atypiques sont contre-indiqués en cas de démence) ;
  • les benzodiazépines, utilisées sans méconnaître le risque de réactions paradoxales.

L’association benzodiazépine-neuroleptique semble renforcer la sédation, mais aussi la fréquence d’incidents iatrogènes.

Le choix de la molécule est modulé par l’anamnèse et le contexte. La voie intramusculaire est la plus habituelle en cas de refus de prise per os.

L’intervention de tiers peut être nécessaire pour :

  • la réalisation concrète d’une injection ;
  • la gestion de l’agitation ;
  • voire une immobilisation.

L’immobilisation relève de la prescription médicale et doit être aussi bien codifiée que la contention physique prolongée tant en termes de mise en pratique (personnel compétent en nombre) que de surveillance (protocole, fiche de surveillance spécifique). Relativement aisée en milieu hospitalier, elle est plus complexe à mettre en œuvre au domicile et peut demander l’intervention des forces de l’ordre ou, par nécessité, des témoins présents (pompiers, proches, etc.). La sécurité du patient et des intervenants reste centrale et conditionne le mode d’intervention immédiat ou différé en attente de renfort.

Il est recommandé que les prescriptions préhospitalières (molécule, posologie, voie et lieu d’administration) soient notées sur le dossier du patient et/ou sur une fiche de liaison qui l’accompagnera. S’ils sont connus, le traitement habituel du patient et les coordonnées de son médecin traitant sont également notés.

Examen psychiatrique
L’examen psychiatrique doit être réalisé le plus tôt possible, dans un lieu calme et sécurisé. L’urgence à hospitaliser n’implique pas que le temps nécessaire à cet examen soit raccourci.

Il est recommandé que l’examen psychiatrique :

  • évalue le risque suicidaire ;
  • recherche :
  • les antécédents auto ou hétéro-agressifs,
  • les troubles du comportement et/ou de l’adaptation ;
  • explore systématiquement :
  • la sphère cognitive (mémoire, orientation),
  • le contenu (idées délirantes, hallucinations) et le cours de la pensée (désorganisation, incohérence, tachy ou bradypsychie, c’est-à-dire accélération ou ralentissement du cours de la pensée).


Évaluation de la capacité à conserver

Il est recommandé d’évaluer la capacité à consentir à partir des 5 dimensions suivantes :

  • capacité à recevoir une information adaptée ;
  • capacité à comprendre et à écouter ;
  • capacité à raisonner ;
  • capacité à exprimer librement sa décision ;
  • capacité à maintenir sa décision dans le temps.

Il est donc recommandé d’informer le patient :

  • du caractère pathologique des troubles qu’il présente ;
  • de leur retentissement possible ;
  • des modalités et des conditions d’application du traitement nécessaire.

Dans le cas particulier des incapables majeurs, il est rappelé que :

  • le consentement du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision ;
  • ces patients ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée à leurs facultés ;
  • comme l’étendue des pouvoirs du représentant légal en matière de consentement aux soins est peu claire dans les textes législatifs et la jurisprudence, le consentement d’un tuteur n’est pas un préalable obligatoire à la décision d’une hospitalisation sans consentement. Cependant, son information et son implication dans la mise en œuvre d’une hospitalisation sans consentement sont recommandées, au même titre que celles de l’entourage.


Indications d'un hospitalisation sans consentement

Pour apprécier la sévérité des troubles mentaux et la nécessité de soins immédiats,
il est proposé de rechercher :

  • un risque suicidaire ;
  • un risque d’atteinte potentielle à autrui ;
  • une prise d’alcool ou de toxiques associée ;
  • un délire ou des hallucinations ;
  • des troubles de l’humeur ;
  • le degré d’incurie.

Risque suicidaire
Une hospitalisation sans consentement la plus rapide possible peut être indiquée devant une crise suicidaire « d’urgence élevée », c’est-à-dire pour un patient :

  • décidé ; dont le passage à l'acte est planifié et prévu pour les jours qui viennent ;
  • coupé de ses émotions, rationalisant sa décision ou très émotif, agité, troublé ;
  • complètement immobilisé par la dépression ou dans un état de grande agitation ;
  • dont la douleur et la souffrance psychique sont omniprésentes ou complètement tues ;
  • ayant un accès direct et immédiat à un moyen de se suicider (médicaments, arme à feu, etc.) ;
  • ayant le sentiment d'avoir tout fait et tout essayé ;
  • très isolé.

Il faut également tenir compte de l'élément de dangerosité lié à l'accumulation de facteurs de risque, notamment l'âge (> 75 ans).

Atteinte potentielle à autrui
Le risque d’atteinte potentielle à autrui ne justifie pas à lui seul une mesure d’hospitalisation sans consentement. Selon la loi du 27 juin 1990, modifiée par la loi du 4 mars 2002, l’hospitalisation sans consentement doit être motivée par des troubles mentaux.

Prise d’alcool ou de toxiques
La prise d’alcool ou de toxiques, aiguë ou chronique, peut justifier une hospitalisation sans consentement à condition qu’elle soit associée à :

  • des troubles psychiatriques ;
  • et/ou des antécédents de passage à l’acte ;
  • et/ ou un risque prévisible pour le patient et/ou pour autrui.

En cas d’intoxication aiguë nécessitant une hospitalisation, il est recommandé une prise en charge en première intention dans un service d’accueil des urgences, car le risque somatique est prédominant.

Il est recommandé d’évaluer l’indication d’hospitalisation sans consentement au décours de la prise en charge somatique de l’intoxication aiguë.

Délire
Le délire ne justifie pas à lui seul une mesure d’hospitalisation sans consentement mais il importe de tenir compte des critères de gravité suivants liés :

  • au degré d’adhésion et de participation émotionnelle au délire (avec notion de passage à l’acte antérieur) ;
  • au thème du délire : délire à thème de ruine ou culpabilité, de persécution avec persécuteur désigné, syndrome de Cottard (négation d’un organe ou plus souvent négation de fonctionnement d’un organe voire négation de la personne), délire mégalomaniaque, délire passionnel à thème de jalousie ou érotomanie (conviction délirante d’être aimé) ;
  • au mécanisme du délire : automatisme mental avec idées et/ou actes imposés qui peuvent être à risque pour le patient ou pour autrui ;
  • à l’association du délire avec un trouble du cours de la pensée (cf. § III.1.3) et/ou un état maniaque et/ou une prise d’alcool ou de toxiques.

Troubles de l’humeur
L’existence de troubles de l’humeur (en dehors des troubles dépressifs avec risque suicidaire déjà cités) comme l’exaltation maniaque avec tachypsychie, surtout si elle est associée à un délire mégalomaniaque, peut justifier une hospitalisation sans consentement.

Incurie
L’incurie peut justifier une hospitalisation sans consentement à condition qu’elle soit associée à :

  • des troubles cognitifs ;
  • et/ou des troubles de l’humeur ;
  • et/ou un délire et/ou des hallucinations.

 

Modalités d'hospitalisation sans consentement

Modalités d’hospitalisation sur demande d’un tiers

Définition du tiers
Le tiers peut être toute personne susceptible d’agir dans l’intérêt du patient, c’est-à-dire :

  • un membre de sa famille ou de son entourage ;
  • une autre personne pouvant justifier de l’existence de relations antérieures à la demande, à l’exclusion des personnels soignants dès lors qu’ils exercent dans l’établissement d’accueil.

Selon les dernières données de la jurisprudence, le tiers demandeur doit être en mesure de justifier de l’existence de relations antérieures à la demande, lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt du patient. Ces relations peuvent être de nature personnelle ou professionnelle

Formulation de la demande du tiers
La demande du tiers doit être manuscrite, effectuée sur papier libre et signée par la personne qui la formule. Si cette dernière ne sait pas écrire, la demande est reçue par le maire, le commissaire de police ou le directeur de l'établissement qui en donne acte. Elle comporte les nom, prénoms, profession, âge et domicile tant de la personne qui demande l'hospitalisation que de celle dont l'hospitalisation est demandée et l'indication de la nature des relations qui existent entre elles ainsi que, s'il y a lieu, de leur degré de parenté.

Il est préférable que le tiers se rende, en même temps que le patient, dans l’établissement d’accueil afin d’attester de son identité et faciliter l’admission du patient.

Certificats médicaux
Deux certificats médicaux datant de moins de 15 jours sont nécessaires. Pour chaque certificat, le médecin doit être thésé¹, inscrit au Conseil de l’Ordre des médecins ou être étudiant en médecine ayant obtenu une licence de remplacement.

Les médecins qui établissent les certificats ne doivent être ni parents (jusqu’au 4ème degré) ni alliés entre eux, ni avec le directeur de l’établissement habilité à recevoir des patients hospitalisés sans leur consentement, ni avec le tiers demandeur ni avec le patient.
Le premier certificat ne peut pas être établi par un médecin exerçant dans l’établissement d’accueil du patient. Le deuxième certificat n’est en rien lié par les constatations et les conclusions du premier.

Chaque certificat doit être rédigé de façon lisible et en langue française, sur papier libre (par exemple ordonnance en libéral ou ordonnance de l’hôpital avec nom, prénom et fonction du médecin et adresse de l’hôpital). Le certificat doit indiquer le nom, la date de naissance et la domiciliation du patient. Comme il n’est pas couvert par le secret médical, il doit être rédigé en termes simples, en évitant les termes techniques et les hypothèses diagnostiques.

Pour rédiger le certificat, il est nécessaire :

  • que le médecin examine et constate par lui-même les troubles mentaux présentés : il est donc nécessaire qu’il s’entretienne avec le patient ou au moins tente de le faire ;
  • que lorsque le patient ne peut être abordé ou approché et ce de façon exceptionnelle, le certificat le mentionne et précise l’origine des faits rapportés, sans identification des personnes rapportant les faits ;
  • que les faits soient circonstanciés : le médecin doit décrire les symptômes évoquant l’existence de troubles mentaux et les attitudes susceptibles de mettre le patient en péril ;
  • que le médecin précise que les troubles du patient rendent impossible son consentement.

Les certificats doivent être adressés au directeur de l’établissement d’accueil. Il est possible de les adresser par fax, à condition que les originaux lui parviennent dans les 24 heures.


¹ Sauf pour les médecins militaires qui ne sont pas inscrits à l’Ordre des médecins et peuvent prononcer une mesure d’hospitalisation sans consentement.


En cas de péril imminent
À titre exceptionnel et uniquement en cas de péril imminent pour le patient, le directeur de l’établissement peut prononcer l’admission au vu d’un seul certificat médical émanant d'un médecin exerçant dans l'établissement d'accueil. La demande du tiers reste bien sûr indispensable. Dans ce cas, le certificat doit faire apparaître les risques de péril imminent, c’est-à-dire l’immédiateté du danger pour la santé ou la vie du patient.

Modalités d’hospitalisation d’office

En dehors de l’urgence
L’HO est prononcée par arrêté par le préfet de police à Paris ou le préfet dans les autres départements, au vu d’un certificat médical circonstancié.

Les modalités de rédaction du certificat médical pour l’HO sont identiques à celles préconisées pour les certificats nécessaires à l’HDT en précisant que les troubles mentaux du patient nécessitent des soins immédiats et compromettent de façon grave la sûreté des personnes et l’ordre public.

Le certificat ne peut émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil du patient.

En urgence
En cas de danger immédiat pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou, à défaut, par la notoriété publique, le maire ou à Paris le commissaire de police peuvent ordonner en urgence des mesures provisoires, qui dans la pratique prennent le plus souvent la forme d’une HO.
Il est recommandé que la décision s’appuie sur un certificat médical, même si la loi ne l’impose pas, plutôt que sur un simple avis. Un médecin peut être mandaté par le maire ou le commissaire de police pour le rédiger, dès que la situation le permet. Le certificat doit mentionner que le patient, par son comportement, constitue un danger imminent pour la sûreté des personnes ou pour l’ordre public.

Information du patient et de sa famille sur les modalités de l’hospitalisation sans consentement
Il est recommandé de donner aux familles et à l’entourage des patients hospitalisés sans leur consentement une information sur la loi du 27 juin 1990 modifiée par la loi du 4 mars 2002 et sur ses modalités d’application.

En cas d’HDT, si le patient souhaite connaître l’identité ou l’adresse du tiers, il est recommandé que ce soit le psychiatre qui suit le patient pendant son hospitalisation qui apprécie au cas par cas le rapport bénéfices/risques de cette divulgation. En cas de doute, il est recommandé de solliciter l’avis de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques. Cette divulgation s’insère dans le cadre de l’accompagnement du patient.

En cas d’HO, il est rappelé que la décision administrative doit être notifiée au patient. En cas de risque pour la sécurité du médecin certificateur, il est recommandé de le signaler au préfet pour qu’il en tienne compte dans la rédaction de l’arrêté préfectoral.
Il est recommandé que tout médecin connaisse les modalités, définies par la loi du 4 mars 2002 et son décret d’application du 21 mai 2003, qui permettent au patient d’accéder à son dossier médical. Le patient peut avoir accès à son dossier médical soit directement, soit par l’intermédiaire d’un médecin de son choix, après en avoir fait la demande auprès :

  • du responsable de l’établissement ;
  • d’un professionnel de santé de l’établissement ;
  • de l’hébergeur de son dossier.

À titre exceptionnel, en cas de risque d’une gravité particulière, la consultation des informations recueillies dans le cadre d’une HDT ou d’une HO peut être subordonnée à la présence d’un médecin désigné par le patient demandeur. En cas de refus du patient demandeur, la commission départementale des hospitalisations psychiatriques est saisie. Son avis s’impose aux détenteurs des informations comme au patient demandeur.

Choix de l’établissement et du service d’accueil
Il est recommandé que les patients ayant des troubles somatiques aigus associés à des troubles mentaux, en particulier dans le cadre des intoxications aiguës, fassent l’objet, pour le temps de résolution de leur problème somatique, d’une prise en charge initiale dans un service d’accueil et d’urgences.

L’hospitalisation directe d’un patient en service de psychiatrie depuis son domicile n’est possible qu’en cas de pathologie psychiatrique identifiée et d’un examen somatique sans anomalie significative.

Modalités de transport
Selon l’article L. 3222-1-1 du Code de la santé publique, les personnes relevant d’une HO ou d’une HDT peuvent être transportées à l’établissement d’accueil sans leur consentement et lorsque cela est strictement nécessaire par des moyens adaptés à l’état de la personne. Ce transport doit être assuré par un transporteur sanitaire agréé. Selon l’article L. 3211-3 du même code, les restrictions aux libertés individuelles doivent être limitées à celles nécessitées par l’état de la personne et la mise en œuvre du traitement prescrit.

En cas d’HDT, le transport ne peut avoir lieu qu’après établissement d’au moins un certificat médical et la demande du tiers.

Il est recommandé que la régulation du transport se fasse à partir du Centre 15 (SAMU) qui coordonne les modalités de transport avec les intervenants pré et posthospitaliers, les transporteurs sanitaires et le médecin présent dans l’établissement d’accueil.

Modalités d’accueil en milieu hospitalier
Les modalités préconisées au § III. 1 s’appliquent également à cet accueil.

Afin de ne pas retarder l’examen psychiatrique, il est proposé que soient facilitées :

  • l’orientation au sein des services d’accueil des urgences ;
  • la présence dans ces structures d’infirmiers ayant des compétences en psychiatrie.

Il est recommandé de développer dans les services qui accueillent des patients relevant potentiellement d’une hospitalisation sans consentement des protocoles de prise en charge de ces patients afin de mieux assurer :

  • la coordination d’amont et d’aval avec les services de secteurs existants ;
  • l’examen somatique et le bilan paraclinique ;
  • l’évaluation de l’état psychiatrique du patient ;
  • l’évaluation de l’entourage et son information ;
  • les mesures de surveillance, d’immobilisation ou de contention ;
  • la formation du personnel soignant ;
  • la promotion de la diffusion de dépliants d’informations relatives à l’hospitalisation psychiatrique.


Conclusion et propositions d'actions futures

Il est nécessaire d’engager rapidement la réalisation d’études et d’analyses épidémiologiques sur l’hospitalisation sans consentement afin de compenser le manque de données exploitables.

Compte tenu des difficultés actuelles de mise en œuvre d’une hospitalisation sans consentement, il est proposé :

  • de réfléchir aux moyens facilitant la demande par un tiers ;
  • de clarifier la notion de trouble grave à l’ordre public pour une HO ;
  • de promouvoir une réflexion et des expériences « pilotes » sur le bénéfice d’une période d’observation, dont la durée reste à déterminer, avant de statuer définitivement sur une indication d’hospitalisation sans consentement ;
  • d’évaluer le rôle que pourraient jouer des équipes d’intervention à domicile (équipe mobile d’intervention) ou des dispositifs d’accueil en cas de crise dans la prévention des récidives d’hospitalisation sans consentement ;
  • de réfléchir sur les évolutions sociales et en particulier sur la place des élus locaux dans la politique de santé mentale ;
  • d’associer les professionnels de santé à toute réflexion concernant une éventuelle modification législative dans le domaine de l’hospitalisation sans consentement ;
  • de faciliter la diffusion de ces recommandations et de documents d’information sur l’hospitalisation sans consentement ;
  • de promouvoir la collaboration avec les associations d’usagers et les représentants des familles des patients ;
  • de faciliter le traitement des plaintes adressées aux CDHP et au procureur de la République par les patients hospitalisés sans leur consentement et par leur famille. 

 

Textes réglementaires

Loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs.

Loi n° 90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées
en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation.

Circulaire n° 39-92 DH.PE/DGS.3C du 30 juillet 1992 relative à la prise en charge des urgences psychiatriques.

Charte du patient hospitalisé. Annexée à la circulaire ministérielle n° 95-22 du 6 mai 1995 relative aux droits des patients hospitalisés.

Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

Décret n° 2003-462 du 21 mai 2003 abrogeant le décret n° 2002-637 du 29 avril 2002 relatif à l'accès aux informations personnelles détenues par les professionnels et les établissements de santé en application des articles L. 1111-7 et L. 1112-1 du Code de la santé publique.

Circulaire DHOS/O1 n° 2003-195 du 16 avril 2003 relative à la prise en charge des urgences.

Circulaire DGS/6C n° 2004/237 du 24 mai 2004 relative au rapport d’activité de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques pour l’année 2003.

Circulaire DGS/SD6C n° 2005-88 du 14 février 2005 relative à la commission départementale des hospitalisations psychiatriques (CDHP).


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