Ce guide explicite le parcours de santé d’une personne adulte ayant un diabète de type 2 en médecine de ville et notamment en médecine générale. Il est construit autour de 6 épisodes de soins identifiés comme les moments où existent d’importants risques de dysfonctionnement :

  1. Le repérage, le diagnostic et la prise en charge initiale
  2. La prescription et les conseils d’une activité physique adaptée
  3. La prescription et les conseils diététiques adaptés
  4. L'initiation d'un traitement par insuline
  5. La découverte d’une complication
  6. Le dépistage et la prise en charge du diabète gestationnel

 

Le guide comporte aussi une description synthétique des points importants du traitement et du suivi du diabète de type 2 en dehors des complications.

Il est accompagné d'une synthèse.


Épisode 1. Du repérage au diagnostic et à la prise en charge initiale

  • Repérer les personnes à risque, faire réaliser les tests de dépistage et de diagnostic, faire suivre le résultat du test, quel qu’il soit, d’une annonce. Ne pas banaliser la situation en cas de glycémie inférieure à 1,26 g/l ou même à 1,10 g/l.
  • Déterminer l’objectif d’HbA1c avec le patient. Ne pas se limiter au traitement de l’hyperglycémie : la réduction du risque cardio-vasculaire et la prise en charge des complications du diabète sont essentielles à la prise en charge du patient diabétique.
  • Prescrire le traitement hypoglycémiant initial qui repose sur l’activité physique et la diététique.


Épisode 2. Prescription et conseils d’une activité physique adaptée

  • Évaluer la motivation du patient et le niveau habituel d’activité. Ne pas se limiter aux injonctions « bougez plus ».


Épisode 3. Prescription et conseils diététiques adaptés

  • Diététique : évaluer les représentations et les possibilités du patient. S’accorder avec lui sur l’adoption de nouveaux comportements alimentaires. Vérifier régulièrement l’obtention d’une modification durable des habitudes alimentaires. Ne pas donner des messages standard, rigides, extrêmes, de restriction alimentaire.


Épisode 4. Traitement par insuline

  • Instaurer le traitement par insuline en prévoyant une étape de préparation. Le traitement doit être annoncé au patient suivant les principes et recommandations habituelles concernant l’annonce. L’hospitalisation ne doit pas être systématique.
  • Impliquer lorsque nécessaire une infirmière lors de la mise en œuvre du traitement, avec un objectif de motivation et d’éducation du patient. La plupart des patients peuvent être autonomes pour le traitement par insuline.


Épisode 5. Découverte d’une complication

  • Renforcer le suivi et modifier les thérapeutiques pour prévenir le risque de complications invalidantes ultérieures, lors de la découverte d’une complication, qui représente un tournant dans le parcours de santé du patient ayant un diabète.
  • Lorsque les objectifs ne sont pas atteints :
    • interroger le patient sur ses difficultés d’observance ;
    • envisager un accompagnement du patient par une infirmière ou un coordinateur d’appui ou d’un réseau de santé si cela est possible ;
    • adresser pour avis à un endocrino-diabétologue ;
    • envisager le(s) recours au spécialiste d’organe concerné.


Épisode 6. Dépistage et prise en charge du diabète gestationnel

  • Dépister le diabète chez les femmes à risque ayant un projet de grossesse.
  • Dépister le diabète gestationnel chez les femmes à risque au premier trimestre de grossesse par une glycémie veineuse à jeun et entre 24 et 28 SA par un test HGPO (75 g glucose).
  • Dans le cas de diabète gestationnel, prescrire ASG et mesures diététiques, et l’insuline après 7-10 jours si les objectifs ne sont toujours pas atteints (le recours à l’endocrino-diabétologue est dans ce cas recommandé). L’hospitalisation ne doit pas être systématique. Vérifier la normalisation de la glycémie après la grossesse et dépister régulièrement le diabète de type 2.


Conditions à réunir

  • Organiser le dépistage et la prise en charge du diabète chez les personnes en grande précarité admises aux urgences.
  • Intégrer le dépistage du diabète dans les protocoles d’admission à l’hôpital des personnes âgées de plus de 75 ans ainsi que lors de l’entrée dans les établissements d’hébergements.
  • Afin d’assurer le chaînage entre le dépistage positif et la prise en charge, élaborer des protocoles entre laboratoires d’analyses médicales, pharmaciens, médecins généralistes, précisant les actions permettant d’assurer un dépistage ciblé et la communication de toute glycémie anormale au médecin traitant.
  • Développer et rendre accessibles les actions d’éducation thérapeutique ciblées en ambulatoire.
  • Promouvoir la coopération des professionnels de santé, les associations de patients et associations sportives et ateliers santé-ville pour faciliter l’accès à l’activité physique et et à la diététique.
  • Favoriser  la  coopération  des  infirmières  et  pharmaciens  avec  les  médecins  généralistes  en s’appuyant sur des programmes comme ASALEE et ESPREC.
  • Assurer la coordination entre professionnels de santé de l’équipe soignante, par un protocole pluriprofessionnel de passage à l’insuline précisant  les interventions de chacun, les modes de coordination entre les professionnels impliqués, les intervalles entre les rendez-vous de surveillance.
  • Assurer la formation des infirmières intervenant auprès des patients pour éducation et autonomisation du traitement par insuline, en s’appuyant sur les endocrino-diabétologues.
  • Vérifier la possibilité d’un accès rapide et prioritaire aux ophtalmologistes pour bilan avant mise à l’insuline, et si ce n’est pas le cas organiser cette disponibilité avec les professionnels du territoire.
  • Inciter à l’élaboration de protocoles pluriprofessionnels pour la prise en charge des complications du diabète, pour le traitement et le suivi des femmes ayant un diabète gestationnel.


Suivi du diabète en dehors des complications

 

M3

M6

M9

M12

Interrogatoire

 

 

 

 

Tabagisme

Consommation alcool

Activité physique ou sportive

Alimentation

X

X

 

 

X

X

X

X

 

 

X

X

X

X

Symptômes

X

X

X

X

Suivi observance, tolérance des traitements

Suivi ASG (si indiquée)

Évaluation des besoins en ETP

X

X

X

X

X

X

X

X

X

Suivi vulnérabilité sociale

 

 

 

X

Évaluation clinique

 

 

 

 

Mesure PA contrôle AMT (/consultation)

Poids et calcul IMC1 (/consultation)

Auscultation vaisseaux

Pouls jambiers, mesure IPS2

Examen neurologique

Examen des pieds

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

Examens complémentaires

 

 

 

 

HbA1c : 2 à 4/an3

EAL

Créatininémie avec estimation du DFG4

Albuminurie (A/C)5

(X)

X

(X)

X

X

X

X

ECG de repos (par MG ou cardiologue)

 

 

 

X

Suivi spécialisé systématique

 

 

 

 

Ophtalmologue6

 

 

 

X

Dentiste

 

 

 

X


1 La surveillance et le calcul de l’IMC permettent :

  • de suspecter une autre étiologie que le diabète de type 2 s’il est < 25 kg/m2 au diagnostic ;
  • de suivre les effets des traitements sur le poids ;
  • d’envisager un traitement par analogue du Glp1 s’il est > 30 kg/m2 (dans le cas d’une indication remboursée) ;
  • d’envisager un traitement par chirurgie bariatrique s’il est ≥ 35 kg/m2 ;
  • d’envisager une insulinothérapie, si le déséquilibre du diabète s’aggrave malgré un poids stable ou en diminution.

2  IPS : index de pression systolique cheville/bras. La mesure est effectuée en position couchée avec un tensiomètre et un appareil Doppler. L’IPS est défini comme normal entre 1 et 1,40 ; comme limite entre 0,9 et 0, 99 ; comme anormal si infé- rieur à 0,9. Un IPS > 1,40 est en faveur d’une incompressibilité des artères.

3 Suivi HbA1c : tous les 6 mois si l’objectif est atteint et si le traitement n’est pas modifié. Tous les 3 mois autrement.

4 DFG : dosage de la créatininémie avec estimation du débit de filtration glomérulaire avec l’équation CKD-EPI pour dépister l’insuffisance rénale. Calcul de la clairance de la créatinine suivant la formule de Cockcroft et Gault, pour adapter les posolo- gies des médicaments, conformément à leurs AMM.

5 A/C : dosage de l’albuminurie réalisé sur échantillon urinaire et résultat exprimé sous la forme d’un ratio albuminurie/ créatininurie (valeur positive > 3 mg/mmol).

6 Dépistage de la rétinopathie diabétique (HAS 2010) :

  • lorsque les objectifs de contrôle de glycémique et/ou de contrôle de pression artérielle ne sont pas atteints : une fois par an ;
  • chez les patients traités par insuline : une fois par an ;
  • suivi tous les 2 ans : chez les patients non insulinotraités et dont les objetcifs de contrôle de la glycémie et de la pression artérielle sont atteints.

Recours aux spécialistes, selon besoins

Cardiologue

  • Tests fonctionnels :

  • maladie coronarienne, dernier bilan datant de plus de 2 ans

  • si symptômes, signes cliniques et/ou anomalies à l’ECG

  • en l’absence de symptômes si risque cardio-vasculaire élevé

  • exercice physique d’intensité élevée HTA non contrôlée à 6 mois sous trithérapie, après avoir vérifié la bonne observance et l’HTA en ambulatoire

Néphrologue, neurologue, autre spécialiste d’organe

  • Aide au diagnostic (bilan complémen- taire), au traitement et au suivi des complications

Professionnel qualifié en gériatrie

  • Évaluation gériatrique standardisée si repérage de la fragilité positif

Diététicien

  • Difficultés pour atteindre les objectifs nutritionnels

  • Participation à l’ETP

Professionnels APS, kinésithérapeute

  • Difficultés pour atteindre les objectifs nutritionnels

  • Participation ETP (kinésithérapeute)

Pédicure-podologue

  • Suivi grade 2 (max 4 séances rem- boursées/an)

  • Suivi grade 3 (max 6 séances rem- boursées/an)

  • Participation ETP

Psychologue, psychiatre

  • Approche psychologique, TCC

Patients experts

  • Accompagnement. Participation ETP

Professionnels équipes sociales, MS

  • Évaluation besoins compensation, élaboration et réalisation des plans d’aide


7 Patients asymptomatiques à risque cardio-vasculaire élevé pour lesquels la réalisation de tests fonctionnels et le recours au cardiologue peuvent être justifiés : AOMI, AVC, protéinurie, 2 autres facteurs de risque cardio-vasculaire associés au diabète (proposition du groupe de travail à partir des recommandations de l’ACSM ADA 2010 et de l’ESC EASD 2013).

8 Le recours au néphrologue est conseillé dès qu’il existe un doute diagnostique sur l’origine diabétique de l’atteinte rénale, dès que le DFG est inférieur à 45 ml/mn/1,73m² (stade 3B d’insuffisance rénale chronique), indispensable en cas d’apparition brutale d’une protéinurie chez un patient qui en était indemne jusque-là (avis du groupe de travail).

 

Motifs (non exhaustifs) de recours à l’expertise des endocrino-diabétologues

  • au diagnostic
    • lorsque la glycémie est supérieure ou égale à 3 g/l ou l’HbA1c supérieure à 10 % et qu’un schéma insulinique intensifié doit être mis en place
    • en cas de suspicion d’une forme atypique de diabète
  • en cas de difficulté pour fixer l’objectif glycémique ou pour l’atteindre ♦
  • pour bilan alimentaire approfondi et plan de soins diététiques chez des patients en surpoids et glycémie élevée, sans anomalies évidentes de l’alimentation repérées
  • en cas de difficultés ou d’échec pour suivre le plan diététique après 6 à 12 mois ♦
  • en cas de découverte d’une complication au cours de la surveillance : aide au suivi diététique et à l’ETP, avis sur l’adaptation du traitement en cas d’objectif non atteint ♦
  • après une complication aiguë, et particulièrement après un syndrome coronarien aigu : avis sur l’adaptation du traitement et préconisations sur le parcours de santé ♦
  • en cas de réadaptation cardiaque lorsque la glycémie n’est pas contrôlée ♦
  • en cas d’obésité morbide et pour l’indication de chirurgie bariatrique dans le cadre de la réunion de concertation pluridisciplinaire ♦
  • en cas d’insulinothérapie envisagée
    •    pour la motivation du patient avant instauration de l’insuline (aide à la motivation)
    •    pour le choix d’un mode d’insulinothérapie
    •    pour la gestion de l’insuline par pompe à insuline ♦
  • en cas d’insulinothérapie transitoire : maladie intercurrente, corticothérapie, chimiothérapie, alimentation entérale et parentérale
  • avant l’intensification du traitement hypoglycémiant en cas de rétinopahie proliférante ou préproliférante
  • si projet de grossesse ou de suivi de grossesse chez la personne diabétique
  • en cas de diabète gestationnel : avis à envisager dès le diagnostic et à réaliser lorsque l’insulinothérapie est envisagée ♦
  • pour la prise en charge des patients précaires dans le cadre d’un travail en équipe
  • pour la coordination des prises en charge, au sein des centres spécialisés dans la prise en charge de lésions du pied

Les motifs signalés par ♦ reposent sur des recommandations, les autres sur l’avis du groupe de travail.

 

Ce qu’il faut éviter

  • Dépister systématiquement l’ischémie myocardique silencieuse par les tests fonctionnels (ADA 2013).
  • Prescrire un électromyogramme en dehors du diagnostic d’une forme atypique de neuropathie (avis du groupe de travail).
  • Recourir à l’hospitalisation de jour pour des bilans de suivi du diabète de type 2 qui peuvent être réalisés en ambulatoire (avis du groupe de travail).

 

 

 

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