Évaluation a priori du dépistage de la syphilis en France

Recommandation en santé publique
Public Health guideline - Posted on Jul 02 2007

Évaluer, au vu des dernières données épidémiologiques montrant une recrudescence de la maladie, l’opportunité du dépistage de la syphilis en France et préciser ses modalités : quelle population dépister et à quelle fréquence ? Comment utiliser les multiples tests disponibles ? Comment optimiser la surveillance épidémiologique, la sensibilisation des personnes concernées par le dépistage, l’utilisation des différentes structures de dépistage et la notification des partenaires des patients dépistés et diagnostiqués positifs ?

La syphilis connaît une recrudescence importante en France depuis 2000. Cette recrudescence concerne principalement, mais pas exclusivement, les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. Les conséquences de cette recrudescence sur la survenue de syphilis congénitales restent inconnues ; cependant, cette éventualité justifie une vigilance particulière eu égard à la gravité des cas et à leur caractère évitable. La syphilis est très contagieuse et une de ses caractéristiques est que la fellation constitue un mode de transmission fréquent. Les individus infectés et non traités peuvent donc facilement transmettre la maladie. Dans un contexte de soin habituel, hors dépistage, la syphilis peut être difficile à diagnostiquer. En l’absence de traitement, des complications graves peuvent survenir, pour l’adulte mais aussi pour l’enfant à naitre en cas de grossesse. Ces conséquences graves sont évitables car le traitement de la maladie repose sur la simple prise d’antibiotiques. Dans ce contexte, la HAS recommande de dépister la syphilis chez les sujets à risque et les femmes enceintes. L’intérêt du dépistage est double : pour les individus atteints, il s’agit d’éviter les complications potentielles de la maladie, parfois graves ; pour la collectivé il s’agit de contenir la recrudescence actuelle du nombre de cas. Afin d’éviter le plus possible les faux positifs du dépistage tout en optimisant l’utilisation des ressources disponibles, une utilisation séquentielle des tests tréponémiques disponibles est recommandée en adaptant la stratégie selon que le dépistage est réalisé chez une femme enceinte à très bas risque ou chez un sujet à risque (cf. recommandations). Un renforcement de la surveillance épidémiologique, notamment pour la syphilis congénitale, une poursuite de la sensibilisation de la population cible et des médecins concernés, une utilisation optimale des structures de dépistage dans leurs rôles à la fois de dépistage, de conseil et de surveillance épidémiologique et une meilleure notification des partenaires constituent des pistes de travail afin de contrôler au mieux la recrudescence actuelle de la syphilis en France (cf. recommandations).

 

Synthèse et perspectives

Évaluation de l'opportunité du dépistage de la syphilis

Des caractéristiques cliniques compatibles avec un dépistage

Rappels
La syphilis est une infection systémique bactérienne sexuellement transmissible due à Treponema pallidum. L’histoire naturelle de la maladie s’étend sur plusieurs années, et fait se succéder des phases bien distinctes : incubation, phases primaire, secondaire et tertiaire, elles-mêmes entrecoupées de phases de latence. Toutes les phases ne sont pas obligatoires : c’est le cas des phases secondaire et tertiaire. Leur durée et leur expression clinique sont très variables d’un individu à l’autre, faisant de la syphilis une maladie difficile à diagnostiquer. On distingue la syphilis précoce (phases primaire, secondaire et syphilis latente de moins d’un an) et la syphilis tardive (syphilis latente de plus d’un an et phase tertiaire). En cas de traitement, le patient peut être de nouveau contaminé et entrer dans un nouveau cycle de la maladie car il n’existe pas d’immunité acquise durable.
La maladie présente des caractéristiques cliniques propres à rendre son dépistage pertinent.

La maladie peut échapper à une attitude diagnostique simple
Pour 4 raisons principales pouvant se combiner :

  • La syphilis présente des phases de latence clinique : phase d’incubation, phase de latence entre la phase primaire et la phase secondaire, phase de latence entre la phase secondaire et la phase tertiaire. Le patient peut entrer en latence prolongée dès la fin de la phase primaire en l’absence de phase secondaire.
  • Les manifestations cliniques de la phase primaire, obligatoires, peuvent cependant ne pas être visibles en cas de chancre caché (endobuccal, vaginal, endorectal) et d’adénopathies profondes.
  • La plupart des manifestations primaires et secondaires sont spontanément régressives et peuvent être négligées par le patient, le contexte vénérien constituant un frein à la consultation. Le patient entre alors dans une phase de latence asymptomatique.
  • Enfin, la difficulté diagnostique liée à la fois à l’extrême polymorphisme de la maladie et au manque d’expérience actuel des médecins, rarement confrontés dans les dernières décennies à la maladie, peut faire passer à côté du diagnostic même en cas de consultation spontanée du patient. Ce dernier peut alors entrer en phase de latence du fait de la régression spontanée des symptômes.

Des complications graves sont possibles
En l’absence de traitement, des complications peuvent survenir. Deux situations doivent être distinguées :

  • Pour l’individu porteur de la maladie, la syphilis peut se compliquer de manifestations viscérales graves de la phase secondaire, notamment neuro méningées (atteinte médullaire, atteinte des nerfs crâniens) et oculaires ; ces manifestations toucheraient un à quelques pour cent des patients non traités. Des complications graves peuvent également survenir en phase tertiaire (manifestations neurologiques et cardio-vasculaires). La fréquence et la gravité de ces manifestations sont impossibles à évaluer du fait que les données disponibles correspondent à des séries de cas antérieures à l’avènement des antibiotiques. Ces données ne sont pas transposables à l’époque actuelle car la prise intercurrente d’antibiotiques pour d’autres motifs diminue très probablement la fréquence et la gravité des complications. Si ces complications sont actuellement exceptionnelles, leur délai de survenue, 10 à 30 ans après la contamination, ne permet pas de présager des conséquences à long terme de l’augmentation récente du nombre de cas. Avant l’avènement des antibiotiques, environ 1/3 des syphilis non traitées évoluaient vers des complications cardio-vasculaires ou neurologiques graves.
  • Lorsque la maladie survient chez la femme enceinte, les complications pour le fœtus et l’enfant à naître sont fréquentes et extrêmement sévères. Le risque de transmission est d’environ 70 % en cas de syphilis précoce et de 10 % en cas de syphilis tardive. Le risque de complications liées à l’infection fœtale est surtout important après 16 à 20 semaines d’aménorrhée. En l’absence de traitement, la mortalité fœtale et périnatale est de l’ordre de 40 %. Chez les enfants survivants, le risque de séquelles sensorielles, malformatives et de retard mental est élevé (40 % de l’ensemble des cas).

La maladie est contagieuse et peut participer à la transmission du VIH
La transmission se fait essentiellement par contact sexuel avec des lésions muqueuses ou cutanées excoriées. Tous les types de rapports sexuels non protégés sont contaminants, notamment les rapports bucco-génitaux. La période de contagiosité correspond à la première année (voire aux 2 premières années) d’évolution de la maladie, du fait de la présence possible de lésions primaires et de lésions secondaires. Le seul taux de contagion disponible est celui par partenaire : il est de 50 à 75 % en phases précoces.

La syphilis étant contagieuse, le dépistage est susceptible de présenter un intérêt collectif via le contrôle de l’épidémie. En effet, le dépistage et le traitement de patients atteints de syphilis à des phases de contagiosité évitent la survenue de nouveaux cas chez les partenaires sexuels de ces patients et protègent ainsi cette population des deux risques cités au paragraphe précédent (complications de la syphilis acquise, syphilis congénitale). Cependant, cet effet collectif de contrôle de l’épidémie ne vaut que pour le dépistage des syphilis précoces (contagieuses). Un effet inverse sur l’épidémie est produit pour le dépistage des syphilis tardives non contagieuses, puisque dans ce cas les patients traités alors qu’ils ne sont plus contagieux peuvent de nouveau contracter la maladie et la transmettre. L’effet global attendu du dépistage, bien qu’il ne soit pas démontrable du fait de l’absence de modèle satisfaisant, est un effet de contrôle de l’épidémie.

De plus, en cas de présence de lésions génitales, la syphilis augmente le risque de transmission du VIH, à la fois pour ce qui est du risque réceptif (facteur 3 à 13), et probablement également pour ce qui est du risque transmissif. Le risque est démontré à l’échelle individuelle mais l’effet de l’épidémie de syphilis actuelle, notamment aux ÉtatsUnis, sur l’épidémie de VIH n’est pas démontré. Il est cependant probable que le dépistage de la syphilis, par son effet de contrôle de l’épidémie de syphilis, puisse diminuer ces situations à risque de transmission du VIH.


La maladie est accessible à un traitement efficace

La maladie est accessible, jusqu’en phase latente, à des traitements simples, efficaces et correctement tolérés.

En 2007, le principal traitement reste la pénicilline G, utilisée sous une forme retard en injection par voie intramusculaire (Extencilline® ). Des alternatives thérapeutiques et des possibilités de désensibilisation existent en cas d’allergie. L’efficacité du traitement est très élevée même si des cas de rechute, non quantifiables et difficiles à distinguer d’une recontamination, sont possibles et justifient un suivi sérologique prolongé. Les recommandations récentes concernant le traitement et le suivi de la syphilis, émanant de différents organismes français et internationaux, sont consultables dans l’argumentaire de ce rapport.
Quelle que soit la modalité thérapeutique choisie, le coût du traitement est très faible (3,15 € pour l’Extencilline® ) eu égard à son efficacité.
Les effets secondaires sont représentés par : i) la réaction de Jarish-Herxheimer, le plus souvent bénigne, même si un risque, non quantifiable, de complications existe, principalement pour le fœtus, les jeunes enfants et le sujet âgé, risque dont la prévention par l’utilisation de paracétamol et de corticoïdes est possible mais non démontrée, ii) l’allergie à la pénicilline, III) la douleur, parfois importante, au point d’injection en cas de traitement par Extencilline®. La réaction à la procaïne n’est pas envisagée ici car la procaïne-pénicilline n’est pas utilisée en France. Il en est de même des complications des tétracyclines au cours de la grossesse car ces dernières ne devraient pas être utilisées dans cette circonstance.


Il existe une augmentation récente du nombre de cas de syphilis

Il existe depuis 1999-2000 une augmentation importante du nombre de cas de syphilis posant la question de l’optimisation de la prise en charge collective de la maladie et notamment de son dépistage.

— Évolution du nombre de cas
Dans les années 1980-90, la syphilis était devenue une maladie rarissime en France. À partir de 1999-2000, le nombre de cas a augmenté. Cette augmentation a débuté en région parisienne où elle s’est poursuivie jusqu’en 2002 (multiplication par 10 du nombre de cas). Une stabilisation, voire une légère diminution du nombre de cas, a ensuite été observée en 2003-2004. En régions, l’augmentation du nombre de cas a été mesurée à partir de 2001 et s’est poursuivie jusqu’en 2004 (multiplication par 7). L’évolution plus récente est mal connue, les premières données disponibles à l’InVS pour 2005-2006, et méritant d’être consolidées, ne semblant pas confirmer la diminution initiée en 2004 à Paris.
Le nombre de cas survenus en France en 2004 est estimé entre 2 600 et 5 200 selon les hypothèses.

— Groupes à risque
Les seuls facteurs de risque démontrés comme étant associés à la survenue de la maladie en France sont l’orientation sexuelle (hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes ou HSH) et le statut VIH+.
En effet, une forte proportion des cas concerne des HSH (83 % dans le réseau de surveillance) séropositifs pour le VIH (plus de la moitié des HSH concernés) et ayant des comportements sexuels à haut risque (nombre élevé de partenaires, partenaires anonymes, absence de protection des pénétrations anales). La fellation non protégée serait à l’origine de la contamination dans la moitié des cas, la protection de la fellation étant une pratique très rare (3 % des HSH). Ces caractéristiques sont retrouvées dans d’autres pays européens et aux États-Unis ainsi que la fréquentation de lieux de rencontres et la consommation de substances excitantes, favorisant les comportements à risque. Des enquêtes déclaratives menées en France entre 2002 et 2005 indiquent une fréquence de la maladie de 2 à 4 % au sein des HSH.
En France, dans le réseau de surveillance, les cas de syphilis survenant chez des sujets hétérosexuels ne concernent que 17 % des patients. Ce pourcentage est stable sur 2000- 2004. Il s’agit très majoritairement d’une population d’hommes (77 %) au sein de laquelle des comportements à risque sont également fréquents (nombre élevé de partenaires, absence de protection des rapports) et le taux de séropositivité vis-à-vis du VIH élevé (12 %). À l’exception de la Finlande qui a connu en 1995 une épidémie de syphilis chez des patients hétérosexuels en lien avec la prostitution issue des pays de l’Est, les épidémies européennes ont concerné principalement des HSH. Cependant, dans certains pays comme le Royaume-Uni ou l’Allemagne, la proportion d’hétérosexuels concernés est plus élevée qu’en France (20-30 %). Il s’agit également dans ces pays d’hommes multipartenaires. La fréquence de la maladie au sein d’une population hétérosexuelle consultant en CDAG en 2002 était de 0,3 %.
Les données spécifiques concernant certaines populations à risque potentiel telles que les travailleurs du sexe, les personnes incarcérées, les sans domicile fixe, les toxicomanes, les migrants et les femmes pratiquant une IVG font défaut en France. 

— Syphilis congénitale
La syphilis congénitale n’a pas disparu en Europe de l’Ouest où des cas sont régulièrement diagnostiqués (Royaume-Uni, France, Allemagne, Finlande) et augmente de façon importante en Europe de l’Est depuis 1990, parallèlement au nombre de syphilis chez les femmes dans ces pays. Les données de surveillance actuelles ne permettent pas de préciser sa fréquence en France. Selon les données de la base PMSI, environ 15 à 18 cas par an ont été codés « syphilis congénitale » entre 1997 et 2004. Il est cependant impossible de certifier qu’ils correspondent à des vrais cas car le diagnostic de syphilis congénitale est particulièrement complexe. Le chiffre peut également ne pas prendre en compte des fausses couches spontanées ou des enfants mort-nés du fait de la maladie.
L’analyse des causes d’échec du dépistage des cas de syphilis congénitale aux États-Unis indique que la cause principale réside dans l’absence de visite prénatale et renvoie donc à la problématique de l’accès au suivi prénatal. Chez les femmes bénéficiant d’un suivi, les causes identifiées regroupent : l’absence de dépistage au premier trimestre malgré le suivi, la contamination tardive après la réalisation du test de dépistage ou la recontamination après traitement, l’absence de traitement ou l’échec du traitement, notamment lié à l’utilisation de macrolides ou de traitements débutés trop tardivement par rapport à l’accouchement.


Des tests de dépistage et de diagnostic sont disponibles

Rappel sur le diagnostic de la syphilis
Le diagnostic de certitude de syphilis n’est possible qu’en cas de chancre pénien, lorsque le tréponème est visualisé à l’examen au microscope à fond noir.
En l’absence de signe clinique, le diagnostic repose sur les résultats de la sérologie, confrontés aux données de l’interrogatoire (notion de contage, de signes cliniques apparents, de traitement antérieur, de résultats sérologiques antérieurs, de fausses couches spontanées, etc.). Du fait des limites de performance des tests sérologiques et du manque de fiabilité de l’interrogatoire concernant des faits parfois anciens, le diagnostic de syphilis reste donc un diagnostic présomptif, plus ou moins fiable selon les situations.
Un traitement probabiliste est rendu possible par l’existence de traitements simples, peu coûteux et correctement tolérés. Dans le doute, la décision de retenir le diagnostic et de traiter fait alors intervenir la gravité potentielle de la situation (extrême gravité en cas de syphilis congénitale, moindre gravité en cas de syphilis acquise), l’acceptation par le patient de la douleur liée à l’injection d’Extencilline® et du risque d’anaphylaxie, ainsi que l’appréciation des inconvénients liés à la nécessité de dépister les partenaires.
En l’absence de test diagnostique de certitude, l’optimisation de la stratégie sérologique constitue donc un élément important du dépistage.

Les tests sérologiques disponibles
— Rappel
Deux types de tests permettent le dépistage et le diagnostic de la syphilis : des tests tréponémiques et des tests non tréponémiques.
Les tests tréponémiques sont plus spécifiques car ils utilisent des antigènes tréponémiques. Ils ont pour caractéristique de rester le plus souvent positifs après traitement et ne permettent donc pas de distinguer une syphilis active d’une cicatrice sérologique. Ils comportent les tests classiques utilisant des techniques d’agglutination (TPHA, TPPA) ou de fluorescence (FTA) et des tests immuno-enzymatiques, plus récents, appelés EIA (Elisa IgG ou mixtes IgG/IgM, tests de diagnostic rapide) ainsi que le western-blot. Certains permettent de rechercher spécifiquement des IgM (FTA, Elisa, western-blot).
Les tests non tréponémiques sont moins spécifiques car ils utilisent des antigènes cardiolipidiques. Ils ont pour caractéristique de se négativer le plus souvent après traitement et ne sont donc positifs que pour les syphilis actives. Ils peuvent parfois se négativer en l’absence de traitement dans les syphilis tardives. Ils sont au nombre de deux : VDRL et RPR.
Les tests tréponémiques classiques et les tests non tréponémiques peuvent être qualitatifs (réalisés sans dilutions successives du sérum) ou quantitatifs (réalisés sur plusieurs dilutions du sérum jusqu’à identifier le plus faible titre positivant la sérologie). Les EIA et le westernblot ne permettent pas de titration. Le principal intérêt de la titration est de pouvoir suivre l’efficacité du traitement sur le titre du test non tréponémique. Au moment du diagnostic, en cas de doute, des titres élevés sont plus évocateurs d’une syphilis évolutive mais un titre faible ne permet pas d’éliminer le diagnostic de syphilis. Enfin, les titres des tests non tréponémiques sont souvent plus élevés au cours de la syphilis précoce mais ne peuvent être utilisés pour distinguer formellement une syphilis latente précoce d’une syphilis latente tardive.

— Caractéristiques des tests
Les caractéristiques détaillées des différents tests sont décrites dans l’argumentaire, ainsi que les interprétations possibles des différents profils sérologiques. Ne sont rapportées dans cette synthèse que les caractéristiques utiles à la réflexion sur la stratégie de dépistage.
Les tests tréponémiques classiques et les tests non tréponémiques se positivent 1 à 4 semaines après le chancre, dans un ordre variable selon les patients. Les Elisa sont, en moyenne, légèrement plus précoces que les tests classiques pris séparément. Ils permettent un diagnostic aussi précoce que la combinaison d’un test tréponémique classique et d’un test non tréponémique. Leur sensibilité et leur spécificité sont comparables à celles des autres tests tréponémiques.
Les Elisa présentent des avantages pratiques liés à l’automatisation de la technique : minimisation du risque d’erreur de manipulation et de transcription des résultats, notamment dans le cadre du traitement d’échantillons anonymisés. De plus ils permettent une lecture objective des résultats. Les conséquences sur la performance du dépistage ne sont cependant pas démontrées, aucune étude n’ayant été réalisée en situation réelle de dépistage.
Les tests de diagnostic rapide font preuve d’une grande variabilité de performance d’un test à un autre. Ils ne présentent pas les avantages liés à l’automatisation des Elisa. Le western-blot, du fait de la présence de données suggérant une sensibilité et une spécificité très élevées, apparaît comme le meilleur test devant être réservé à la confirmation du fait de son prix élevé.
Les différences entre les tests tréponémiques classiques (TPHA, TPPA, FTA) sont minimes. Le FTA-ABS est légèrement plus précoce en phase primaire et peut donc être intéressant, dans les laboratoires disposant d’un microscope à fluorescence, si une syphilis récente est suspectée. Dans les autres situations, il n’a pas d’avantage sur le TPHA ou le TPPA. Le TPPA, de par sa technique, est moins susceptible de poser des problèmes de variabilité de lots que le TPHA et n’est pas soumis aux réactions hétérophiles, sans que les conséquences de ces caractéristiques en termes de performance des tests soient démontrées.
Pour certains, la recherche d’IgM peut être utile au diagnostic de syphilis précoce (avant que la sérologie IgG ne se positive ou en cas de sérologie dissociée). Du fait de leur manque de sensibilité, les tests sérologiques recherchant les IgM ne doivent être pris en compte que lorsque leur résultat est positif. Les données de littérature disponibles ne permettent pas de conclure quant à la supériorité d’un test sur un autre, même si certaines données, méritant d’être confirmées, suggèrent une sensibilité légèrement supérieure pour les Elisa et le WB. Cependant, pour certains, la recherche d’IgM n’a pas sa place dans la stratégie sérologique eu égard à son manque de sensibilité et à la possibilité de contrôler la sérologie IgG 2 à 4 semaines plus tard. 

Les stratégies sérologiques existantes
Plusieurs stratégies d’utilisation des tests sont possibles et sont utilisées dans le monde.
En France, selon la nomenclature actuelle, le dépistage repose sur la réalisation concomitante d’un test tréponémique qualitatif (TPHA, FTA ou EIA) et d’un test non tréponémique qualitatif (VDRL). En confirmation, c’est-à-dire en cas de positivité d’au moins un des deux tests de dépistage, un titrage doit être pratiqué sur les deux tests. D’autres tests de confirmation sont prévus sans précision quant à leurs indications : western-blot IgG, recherche d’IgM et western-blot IgM comme test de confirmation des IgM.
Aux États-Unis, la stratégie préconisée par les CDC consiste à utiliser un test non tréponémique (RPR) en dépistage et à confirmer le diagnostic par un test tréponémique. Cependant, les CDC tenant compte de l’utilisation effective des Elisa en dépistage dans de nombreux laboratoires, proposent dans ce cas une stratégie consistant à confirmer le diagnostic par la réalisation d’un test non tréponémique quantitatif (RPR) et en cas de discordance à réaliser un second test tréponémique.
Au Royaume-Uni, la stratégie consiste à utiliser un test tréponémique (Elisa ou TPPA) pour le dépistage, à confirmer le diagnostic avec un test tréponémique différent de celui utilisé en dépistage (TPPA ou Elisa) et à réaliser en dernier le test non tréponémique (RPR) ; le western-blot ou le FTA sont préconisés en cas de discordance entre les deux premiers tests tréponémiques.

Analyse des stratégies existantes
— Rationnel à l’utilisation de plusieurs tests
Il existe trois motifs à la réalisation de plusieurs tests chez un même patient :

  • diagnostic positif de syphilis active : la réalisation d’au moins un test de chaque type est nécessaire pour porter le diagnostic de syphilis active et pour initier le traitement (le test tréponémique pour porter le diagnostic de syphilis, le test non tréponémique pour porter le diagnostic de maladie active) ;
  • sensibilité du dépistage : dans certaines situations justifiant un traitement, les résultats des tests tréponémiques et non tréponémiques peuvent être dissociés. La réalisation d’un test de chaque type permet alors un gain de sensibilité. Il s’agit principalement des syphilis débutantes, en phase de séroconversion, lorsqu’un test s’est positivé et que l’autre n’est pas encore positif, et des syphilis tardives lorsque le test non tréponémique s’est négativé ;
  • spécificité de la confirmation diagnostique : la réalisation de plusieurs tests est nécessaire à l’obtention d’une valeur prédictive positive évitant une proportion trop élevée de faux positifs en population à basse prévalence.
    Selon l’ordre de réalisation, un même test peut servir au dépistage ou au diagnostic.

— Techniques manuelles vs techniques automatisées
Les avantages pratiques des Elisa qui sont automatisables, par rapport aux tests tréponémiques classiques qui relèvent de techniques manuelles, ont été décrits ci-dessus. En France, le dépistage est principalement réalisé à l’aide de techniques manuelles (TPHA et VDRL) du fait de la faible utilisation des Elisa. Cependant, la procédure prévoit la réalisation de deux tests de dépistage et comporte de ce fait un premier contrôle interne. La titration des deux tests, en cas de positivité d’un seul test de dépistage, représente un second contrôle interne puisqu’un problème technique sur un test qualitatif peut alors être identifié lors de la titration. Cet argument plaide en faveur du maintien des deux tests en dépistage et de la titration des deux tests en confirmation (la titration du test non tréponémique étant par ailleurs justifiée par son intérêt dans le suivi du traitement).

— Efficacité des différentes stratégies
En termes de sensibilité du dépistage, deux stratégies de dépistage permettent de couvrir l’ensemble des phases de la maladie de façon satisfaisante : la stratégie combinant d’emblée un test tréponémique et un test non tréponémique et la stratégie utilisant un Elisa IgG ou mixte. Une stratégie de dépistage utilisant un test non tréponémique seul manque de sensibilité en phases primaire et latente tardive et expose à des erreurs techniques en fondant le dépistage sur un test manuel unique. Une stratégie utilisant un test tréponémique classique seul manque de sensibilité en phase primaire et expose à des erreurs techniques en fondant le dépistage sur un test manuel unique. La sensibilité des différentes stratégies ne fait l’objet d’aucune donnée chiffrée dans la littérature analysée.
En termes de spécificité du diagnostic, toutes les stratégies prévoient l’utilisation séquentielle de plusieurs tests afin de diminuer la proportion de faux positifs en population à basse prévalence. Aucune donnée chiffrée des valeurs prédictives positives des différentes stratégies, n’est disponible dans la littérature analysée. En se fondant sur les résultats d’une modélisation permettant une approximation des valeurs prédictives des différentes stratégies, il apparaît :

  • qu’en dépistage, chez la femme enceinte n’ayant aucun facteur de risque et aucun antécédent de syphilis (population à très basse prévalence) : afin d’éviter les faux positifs du dépistage, un test tréponémique de dépistage positif doit être contrôlé sur le même sérum, quel que soit le résultat du test non tréponémique, par la réalisation d’un deuxième test tréponémique utilisant une technique différente. En cas de discordance, un troisième test tréponémique utilisant une troisième technique doit être réalisé sur le même sérum. La positivité d’un des deux tests de confirmation suffit à traiter ;
  • qu’en dépistage de sujets à risque (population à basse prévalence) : la vérification, selon la même procédure, d’un test tréponémique de dépistage positif ne doit être réalisée que si le test non tréponémique est négatif ;
  • que quelle que soit la situation de dépistage (femme enceinte ou sujets à risque) :
    • un dépistage positif uniquement sur le test tréponémique, après confirmation selon la procédure ci-dessus, peut faire pratiquer, en cas de suspicion de syphilis précoce, un dosage des IgM sur le même sérum et un contrôle sérologique sur un nouveau sérum prélevé 2 à 4 semaines plus tard,
    • un dépistage positif uniquement sur le test non tréponémique ne requiert pas de test tréponémique complémentaire mais peut faire pratiquer, en cas de suspicion de syphilis précoce, un dosage des IgM sur le même sérum et un contrôle sérologique
      sur un nouveau sérum prélevé 2 à 4 semaines plus tard.

— Efficience des différentes stratégies de dépistage
Dans la nomenclature actuelle, le dépistage est coté B20 et la somme du dépistage et du titrage est cotée B40. Les Elisa peuvent être utilisés en dépistage au même titre que les autres tests tréponémiques. La technique de l’Elisa étant automatisable, le coût de revient dépend du nombre de prélèvements traités et est donc variable d’un laboratoire à un autre. Il apparaît cependant que la nomenclature actuelle est peu favorable à leur utilisation.
En l’absence de supériorité de performance démontrée des Elisa en dépistage, sur la combinaison d’un test tréponémique classique et d’un test non tréponémique, il n’est pas justifié d’augmenter, pour le payeur, le coût du dépistage dans le but de favoriser l’utilisation des Elisa. En revanche, à coût identique, il doit être laissé aux laboratoires la possibilité de les utiliser.

— Cas des tréponématoses endémiques
Les tréponématoses endémiques n’ont pas fait l’objet d’une analyse spécifique dans le cadre de ce travail d’évaluation. La conduite à tenir, chez un patient asymptomatique présentant une sérologie positive et originaire d’un pays d’endémie, relève de la prise en charge individuelle et dépasse le champ de ce rapport. Cette question se pose avec une fréquence très variable selon les populations prises en charge. Il est simplement rappelé ici qu’aucun test sérologique ne permet de différencier une tréponématose endémique d’une tréponématose vénérienne. La conduite habituelle, à titre de précaution, en l’absence de preuve satisfaisante d’un traitement antérieur adapté à la syphilis, consiste à proposer un traitement efficace contre la syphilis et à assurer au mieux la traçabilité de ce traitement afin d’éviter la répétition des traitements présomptifs lors des prises en charges ultérieure par d’autres professionnels de santé.

— Conclusion
L’utilisation de procédures de confirmation diagnostique adaptées permet un dépistage et une confirmation diagnostique ayant une valeur prédictive compatible avec le dépistage de la syphilis en population à risque et chez la femme enceinte.


Opportunité de dépister la syphilis

Syphilis acquise
L’appréciation de l’opportunité du dépistage de la syphilis acquise ne peut reposer que sur l’évaluation semi-quantitative de la balance bénéfice/risque. En effet, il n’existe pas de preuve directe de l’efficacité du dépistage sur des critères de morbi-mortalité et une modélisation n’est pas réalisable eu égard à la complexité de la maladie et au manque de données épidémiologiques nécessaires. Enfin les données épidémiologiques disponibles ne permettent pas de calculer le coût par complication évitée.

— Avantages
L’intérêt individuel du dépistage consiste à éviter, chez les sujets asymptomatiques (ayant des lésions cachées ou en phase de latence), les complications liées à l’évolution naturelle de la maladie en phase secondaire et tertiaire. Des tests sérologiques sensibles permettent de dépister et de diagnostiquer ces cas. Des traitements efficaces sont disponibles.
Le dépistage comporte également un intérêt collectif dans la mesure où le contrôle de l’épidémie permet d’éviter la survenue de nouveaux cas, mais également de cas de syphilis congénitale et possiblement de cas de contamination par le VIH.

— Inconvénients
Les inconvénients du dépistage sont représentés par :

  • son coût : le coût actuel des tests sérologiques de dépistage est de 5,40 € (B20) par personne. En termes d’organisation, le coût marginal lié au dépistage reste cependant limité car les structures dédiées (Ciddist) existent déjà et un dépistage opportuniste à l’occasion d’un contact avec le système de soins peut être réalisé ;
  • les faux positifs : la modélisation de la stratégie sérologique, avec les multiples limites méthodologiques qu’elle comporte, indique cependant qu’une VPP acceptable peut être obtenue grâce à la combinaison de plusieurs tests sérologiques ;
  • les conséquences psychologiques, pour les sujets diagnostiqués et les sujets contacts (caractère stigmatisant de la maladie), et les conséquences sur leurs relations (suspicion d’infidélité, ruptures, divorces, violences conjugales, suicides), non quantifiables mais à prendre en considération.
  • les inconvénients de la prise en charge aussi bien chez les vrais cas que chez les faux positifs : allergie à la pénicilline, réaction de Jarish-Herxheimer (uniquement chez les vrais cas).

— Synthèse
De manière consensuelle dans les pays occidentaux, cette balance est considérée comme favorable en population à risque et comme défavorable en population générale du fait de la très faible prévalence de la maladie (de l’ordre de 1 à quelques pour cent en population à risque contre 1 à quelques cas pour 100 000 en population générale).
À titre illustratif, des études américaines réalisées dans les années 1970 indiquaient un coût par cas dépisté de 60 000 $ à 240 000 $ en cas de dépistage prénuptial. À titre indicatif également, en ne tenant compte que de l’effet immédiat et individuel du dépistage (i.e. en négligeant l’effet sur l’épidémie et le taux de recontamination), en ne tenant pas compte du type de complications évitées, en négligeant le coût des tests de confirmation et celui lié aux limites de performance des tests, pour un coût de dépistage de 5,40 €, dans une population à risque où la prévalence serait de 1 %, le coût par cas dépisté serait de 540 €, alors qu’en population générale avec une hypothèse de prévalence de 5 pour 100 000, le coût par cas dépisté serait de 108 000 €.
Les seules populations à risque démontré statistiquement sont la population des HSH et la population VIH+. D’autres populations à risque peuvent être retenues sur avis des experts du groupe de travail et de lecture (cf. chapitre I.6.1).

Syphilis congénitale
Bien que concernant une population à bas risque, le dépistage universel de la syphilis congénitale est considéré comme opportun dans l’ensemble des pays occidentaux. Les arguments en faveur du dépistage chez toutes les femmes enceintes sont :

  • une gravité extrême (mortalité, séquelles) et évitable des cas de syphilis congénitale ;
  • le contexte épidémiologique actuel et le risque qu’il comporte de transfert de l’épidémie de la population d’hommes ayant des rapports avec les hommes vers la population hétérosexuelle ;
  • des études médico-économiques anciennes suggérant un bénéfice économique net (coûts évités - coût du dépistage) positif. Les coûts évités sont ceux de la prise en charge médico-sociale, sur toute la vie, des enfants atteints de syphilis congénitale et survivant à la maladie.

De plus, une approche ciblée sur un groupe de femmes à risque se heurte au manque de données pour définir ce groupe et au risque d’oubli de réalisation du dépistage par les professionnels. Des données britanniques suggèrent que si ce ciblage améliore le rapport coût-efficacité, c’est-à-dire le coût médical par cas dépisté, pour autant la prise en compte du coût social et économique des cas non diagnostiqués rend le bénéfice économique net du dépistage ciblé incertain.
Comme pour tout dépistage en population à basse prévalence, le risque de générer une proportion importante de faux positifs est élevé. Cela justifie une procédure de confirmation des cas permettant d’obtenir une VPP acceptable. C’est le cas lorsque le test tréponémique positif en dépistage est confirmé par un deuxième test tréponémique (ou par un troisième en cas de discordance entre le premier et le deuxième).
La majorité des cas d’infections fœtales survenant après 4 mois de grossesse, un dépistage lors de la première visite prénatale est approprié pour dépister les cas de syphilis antérieurs à la grossesse ou contractés lors du premier trimestre. Cependant, certaines femmes peuvent échapper à ce dépistage : il s’agit des femmes échappant à tout suivi obstétrical et des femmes à risque pour lesquelles une contamination ou une recontamination après la première visite est possible. C’est pourquoi deux mesures complémentaires peuvent s’associer au dépistage de la première visite :

  • la vérification lors de l’accouchement, pour toute femme, de la présence dans le dossier obstétrical d’une sérologie syphilitique négative et sa réalisation autour de l’accouchement si nécessaire ;
  • la répétition du dépistage au cours de la grossesse, comme cela était préconisé dans le dernier avis du CSHPF de 2001. Un second dépistage, au troisième trimestre, et suffisamment précoce pour permettre un traitement complet de 30 jours avant l’accouchement, c’est-à-dire à 28 semaines de grossesse selon les CDC, peut ainsi être proposé. 


Avis de la Haute Autorité de santé

Dépistage de la syphilis acquise
Le dépistage de la syphilis est recommandé chez les hommes ayant des rapports sexuels non protégés avec des hommes, fellation comprise (recommandation fondée sur des données épidémiologiques françaises).
Par prudence quant au risque d’expansion de l’épidémie et sur avis d’experts, en l’absence de données épidémiologiques validées, un dépistage peut également être proposé :

  • chez les travailleurs du sexe ayant des rapports non protégés (fellation comprise) ;
  • chez les personnes fréquentant les travailleurs du sexe et ayant des rapports non protégés (fellation comprise) ;
  • lors du diagnostic ou en cas d’antécédent d’IST à type de gonococcie, de lymphogranulomatose vénérienne et d’infection à VIH (existence de données épidémiologiques françaises pour cette dernière population) ;
  • chez les personnes ayant des rapports non protégés (fellation comprise) avec plusieurs partenaires par an ;
  • chez les migrants en provenance de pays d’endémie (Afrique, Asie, Europe de l’Est, Amérique du Sud) ;
  • lors d’une incarcération ;
  • après un viol.

Les données de surveillance et les résultats des enquêtes épidémiologiques à venir pourront amener à modifier ces recommandations si nécessaire.
Le rythme de répétition du dépistage doit être adapté selon les cas en fonction des situations à risque (du dépistage unique en cas de prise de risque ponctuelle au dépistage régulier, au minimum une fois par an, en cas de prise de risque récurrente).
Rappel : depuis 1992, le dépistage de la syphilis n’est pas obligatoire lors de la consultation prénuptiale.

Dépistage de la syphilis congénitale
Le dépistage universel de la syphilis lors du premier examen prénatal, pratiqué idéalement lors du premier trimestre de la grossesse, doit être maintenu.
Il doit être renforcé chez les femmes à risque par la réalisation d’un deuxième test au troisième trimestre, idéalement avant la 28e semaine de grossesse.
En l’état des connaissances, la définition de la population des femmes à risque ne peut relever que de l’avis d’experts. En théorie, les femmes concernées sont celles ayant des rapports sexuels non protégés avec un nouveau partenaire après le premier dépistage, ou celles dont le conjoint est dans cette situation. En pratique, c’est au médecin, en fonction des données d’interrogatoire qu’il peut recueillir, de proposer le dépistage lorsqu’il a un doute sur une telle situation, en particulier si la femme ou son conjoint appartiennent aux groupes à risque de syphilis acquise.
Il est recommandé de réaliser une sérologie syphilitique avant ou après l’accouchement si cette dernière n’a pas été réalisée au cours de la grossesse et de toujours s’assurer de la présence d’une sérologie syphilitique dans le dossier obstétrical avant que la femme ne quitte la maternité.
Enfin, conformément aux recommandations de l’OMS de 2005, le dépistage doit être proposé aux femmes ayant des antécédents d’avortement spontané ou d’enfants mort-nés.

Stratégie d’utilisation des tests sérologiques
— Modalités d’utilisation des tests
Le dépistage de la syphilis doit reposer sur la réalisation d’un test tréponémique qualitatif (TPHA, TPPA, FTA-ABS, Elisa IgG ou mixte IgG/IgM) et d’un test non tréponémique qualitatif (VDRL, RPR). En cas de positivité d’un ou des deux tests de dépistage, une titration des deux tests doit être pratiquée, sauf si le test tréponémique utilisé en dépistage est un Elisa (dans ce cas la titration ne porte que sur le test non tréponémique).
En dépistage, chez la femme enceinte n’ayant aucun facteur de risque et aucun antécédent de syphilis, un test tréponémique de dépistage positif (TPHA, TPPA, FTA-ABS, Elisa IgG ou mixte IgG/IgM) doit être contrôlé sur le même sérum, quel que soit le résultat du test non tréponémique, par la réalisation d’un deuxième test tréponémique (Elisa IgG ou mixte si le dépistage a été réalisé en TPPA, TPHA ou FTA-ABS ; TPPA, TPHA ou FTA-ABS si le dépistage a été réalisé en Elisa). En cas de discordance, un western-blot IgG doit être réalisé sur le même sérum. La positivité d’un des deux tests de confirmation suffit à traiter.
En dépistage de sujets à risque, la confirmation, selon la même procédure, d’un test tréponémique de dépistage positif ne doit être réalisée que si le test non tréponémique est négatif.
Quelle que soit la situation de dépistage (femme enceinte ou sujets à risque) :

  • un dépistage positif uniquement sur le test tréponémique, après confirmation selon la procédure ci-dessus, peut faire pratiquer, en cas de suspicion de syphilis précoce, un dosage des IgM sur le même sérum et un contrôle sérologique sur un nouveau sérum prélevé 2 à 4 semaines plus tard ;
  • un dépistage positif uniquement sur le test non tréponémique ne requiert pas de test tréponémique complémentaire mais peut faire pratiquer, en cas de suspicion de syphilis précoce, un dosage des IgM sur le même sérum et un contrôle sérologique sur un nouveau sérum prélevé 2 à 4 semaines plus tard.

Sur un plan pratique, afin que le biologiste puisse déterminer les circonstances de prescription de la sérologie (dépistage de sujets à risque, dépistage chez la femme enceinte), il est souhaitable :

  • de favoriser la communication entre le prescripteur et le biologiste ;
  • que le prescripteur indique sur l’ordonnance lorsque le dépistage est réalisé dans le cadre d’un suivi de grossesse ;
  • qu’en l’absence d’information, la procédure de vérification propre au dépistage des femmes enceintes soit appliquée par défaut à l’ensemble des femmes.

En l’absence de contrôle possible des tests avant leur mise sur le marché, l’utilisation des tests de diagnostic rapide n’est pas recommandée du fait de la variabilité de leur niveau de performance. Une distinction claire entre Elisa et tests de diagnostic rapide est donc nécessaire au sein des EIA.
Des études complémentaires sont souhaitables afin de comparer le TPHA et le TPPA.
Les modalités de recherche des IgM ne peuvent être précisées en l’état des connaissances. Cette recherche devrait cependant être limitée aux cas de suspicion de syphilis précoce.



Évaluation des modalités de dépistage de la syphilis

L’analyse de la littérature ne permet pas d’évaluer l’efficacité des mesures organisationnelles visant à améliorer le dépistage de la syphilis. Cependant, sur avis d’experts et par comparaison avec les organisations mises en place dans d’autres pays, un cadre d’organisation et des principes généraux sont proposés ci-dessous.

Surveillance épidémiologique
— Principes
L’existence de données épidémiologiques valides et actualisées permettant de caractériser les populations cibles et de suivre les effets des mesures mises en place, constitue la pierre angulaire de l’organisation du dépistage, comme de la politique de prévention primaire. Ces données peuvent provenir d’une surveillance épidémiologique continue et de la réalisation d’enquêtes ad hoc.

— Le système de surveillance français
En France, la syphilis n’est plus à déclaration obligatoire depuis 2000, contrairement aux autres pays européens (à l’exception des Pays-Bas) et aux États-Unis. Un réseau de surveillance national, fondé sur le volontariat et piloté par l’InVS, a pour but de suivre la tendance de l’épidémie et ne vise ni l’exhaustivité, ni la représentativité. Il permet le recueil de données comportementales déclaratives. Un centre national de référence a été créé en 2006, ce dernier ne centralisant pas, à ce jour, les examens biologiques. Enfin, la notification des partenaires ne fait l’objet d’aucune obligation légale autre que celle d’informer le patient du risque pour ses partenaires.
Il existe des arguments pour maintenir et renforcer la surveillance épidémiologique de la syphilis :

  • une extension de la syphilis dans la population hétérosexuelle est possible ;
  • il n’existe pas de données épidémiologiques disponibles sur la prévalence de la syphilis chez les travailleurs du sexe. L’augmentation du nombre de travailleurs du sexe en provenance des pays de l’Est (au sein desquels l’épidémie de syphilis s’étend de façon importante) renforce l’intérêt pour ces données ;
  • il n’existe pas de données sur la fréquence de la syphilis en prison ainsi que dans d’autres populations potentiellement à risque : migrants, sans domicile fixe, toxicomanes et femmes pratiquant une IVG ;
  • la syphilis congénitale n’a pas disparu en Europe de l’Ouest, notamment en France, et son incidence augmente en Europe de l’Est. La syphilis congénitale ne bénéficie d’aucune surveillance spécifique en France.

— Avis de la Haute Autorité de santé
Pour renforcer la surveillance épidémiologique de la syphilis, le rétablissement de la déclaration obligatoire des cas de syphilis acquise n’apparaît pas comme le moyen le plus pertinent sur trois arguments principaux : i) le problème de définition de cas, vu la difficulté de diagnostic de la syphilis, II) la mauvaise participation des praticiens hors des Ciddist, iii) la lourdeur de mise en place.
En revanche, la surveillance épidémiologique pourrait passer par plusieurs voies :

  • La nouvelle réglementation qui régit les Ciddist pourrait permettre de renforcer la surveillance de la syphilis en augmentant le nombre des Ciddist participant au réseau de surveillance et en améliorant le recueil d’informations sur les cas, notamment chez les hétérosexuels. À titre d’exemple, ce renforcement pourrait passer par un recueil harmonisé des données cliniques, épidémiologiques et comportementales via la mise en place d’un logiciel unique.
  • Une réflexion sur l’optimisation des indicateurs permettant un suivi régulier de l’épidémie à partir des bases disponibles (GERS, SNIIR-AM, PMSI, DMI-II) pourrait être menée, notamment via l’utilisation de la méthode capture/recapture dont la faisabilité est actuellement étudiée à l’InVS. L’intérêt du recueil des informations disponibles auprès des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal, des registres des malformations et des collèges des hôpitaux généraux pourrait également être étudié.
  • La réalisation d’enquêtes au sein de populations potentiellement à risque paraît utile : travailleurs du sexe, personnes incarcérées, migrants, mais aussi SDF, toxicomanes et femmes pratiquant une IVG. À ce titre, l’InVS a prévu en 2007- 2008 de mener une étude auprès des travailleurs du sexe en Ile-de-France afin d’estimer la prévalence des IST et de l’infection à VIH dans cette population.
  • La syphilis congénitale est une maladie peu fréquente mais grave et évitable. Un renforcement de sa surveillance permettant l'investigation systématique des cas est nécessaire. L'adoption d'une définition des cas en est le préalable. La maladie satisfait à certains critères d’une maladie à déclaration obligatoire (DO) mais le renforcement de sa surveillance peut passer par des mesures alternatives ou complémentaires comme l’envoi au CNR des sérums positifs en dépistage. Cette mesure permettrait, outre la surveillance épidémiologique des cas, de proposer aux praticiens (biologistes et cliniciens) une aide au diagnostic (la proportion de faux positifs étant élevée en dépistage dans cette population à basse prévalence) et des conseils de prise en charge (afin d’éviter les cas de syphilis congénitale liés à une prise en charge inappropriée comme l’utilisation de macrolides, de traitements trop courts, ou à une notification inefficace à l’origine de recontaminations). La documentation des cas de syphilis congénitale identifiés par le PMSI est le pré-requis à une prise de décision dans ce domaine. En effet, cela permettra d’évaluer le nombre réel de syphilis congénitales enregistrées et de connaître les causes de l’échec de la prévention dans le contexte français. Cette enquête, réalisée par l’InVS, a été débutée fin 2006.

Sensibilisation au dépistage
— Principes
En l’absence d’invitation nominative comme dans un dépistage organisé, le taux de participation au dépistage dépend de la sensibilisation de la population cible et des médecins susceptibles de proposer le dépistage.
Trois principes régissent les actions de sensibilisation visant à augmenter la participation des populations cibles au dépistage de la syphilis :

  • Elles doivent cibler à la fois les sujets à risque et les professionnels de santé susceptibles de proposer le dépistage.
  • Le choix des messages, des vecteurs et des relais de communication doit tenir compte des spécificités culturelles et organisationnelles fortes de la population cible (HSH) et s’appuyer notamment sur le milieu associatif.
  • Les messages concernant le dépistage s’intègrent dans une communication plus globale de prévention primaire (conseils pour ne pas contracter la syphilis en insistant sur l’intérêt de protéger les fellations), secondaire (sensibilisation au dépistage) et tertiaire (indication des signes devant faire consulter) concernant la syphilis mais également les autres IST.

Certains outils mis en place dans le cadre de campagnes américaines semblent peu efficaces, selon les données descriptives disponibles. Il s’agit du développement d’outils internet d’information, de dépistage et de notification et d’actions de délocalisation du dépistage au sein de lieux de rencontres, ces dernières étant par ailleurs très coûteuses.

— La situation française
Une politique active de communication en santé autour des IST d’une part et en direction des populations HSH d’autre part est déjà mise en place par l’Inpes. Elle inclut des messages sur la syphilis. De plus trois campagnes spécifiques d'alerte syphilis ont été réalisées en France par l’Inpes en 2002, 2003 et 2004.

— Avis de la Haute Autorité de santé
Quelques axes de réflexion spécifiques à la syphilis, parfois déjà mis en œuvre, sont proposés ci-dessous.

  • En prévention primaire, le rôle des fellations dans la propagation de la maladie doit être pris en compte. Cependant, l’efficacité de la promotion de l’utilisation du préservatif pour les fellations devra être évaluée, notamment dans les groupes à risque définis plus haut (HSH, travailleurs du sexe). Eu égard à la très faible utilisation actuelle de ce moyen de prévention, il est raisonnable d’envisager des mesures alternatives comme l’information sur le risque de transmission de la syphilis par la fellation et l’utilité du dépistage en cas de pratique à risque.
  • En prévention secondaire, la sensibilisation à l’intérêt du dépistage :
    • des sujets à risque, associée à une information sur les moyens d’y accéder ;
    • des professionnels concernés, associée à une information sur les bonnes pratiques de dépistage. Les professionnels concernés comprennent : les médecins de Ciddist, de CDAG et de centres de planification familiale, les médecins généralistes, en particuliers ceux impliqués dans la communauté gay, les dermatologues, les gynécologues et les sages-femmes (les commissions régionales de la naissance pouvant jouer un rôle d’information), les infectiologues, les médecins ayant une consultation VIH, les internistes, les pharmaciens et les biologistes.
  • En prévention tertiaire, l’information :
    • de la population à risque sur les signes devant faire consulter ;
    • des professionnels sur les bonnes pratiques de prise en charge de la syphilis et sur l’existence de CNR et de Ciddist pouvant apporter des conseils, notamment en cas de sérologie positive au cours de la grossesse.

Mise à disposition de structures de dépistage
— Principes
La mise à disposition, pour la population à risque, de structures de dépistage accessibles constitue le premier point de cette organisation. L’existence de structures permettant un dépistage gratuit et anonyme et couvrant l’ensemble du territoire relève de ce principe. La mobilisation d’autres structures ou d’autres professionnels en contact avec la population à risque représente un levier d’action complémentaire.

— La situation française
En France, le dépistage de la syphilis peut être réalisé de manière anonyme et gratuite dans des structures dédiées à la prise en charge des IST. Il s’agit principalement des Ciddist (centres d’information, de dépistage et de diagnostic des IST) qui se mettent en place depuis le 1er janvier 2006, en remplacement des anciens DAV (dispensaires anti-vénériens) et devraient, à terme, mettre à disposition de la population une structure de dépistage anonyme et gratuit dans chaque département. La localisation et l’organisation du Ciddist peuvent varier d’un département à l’autre (ancien DAV, service hospitalier, centre de santé).
Bien que cette activité ne relève pas de la mission des CDAG, rien ne s’oppose à ce qu’un dépistage de la syphilis soit pratiqué dans les CDAG non adossées à un Ciddist ou à une consultation IST, dès lors que le financement en est assuré, notamment à partir de ressources destinées aux Ciddist.
D’autres structures, non dédiées aux IST, peuvent assurer le dépistage de la syphilis. Dans ce cas le dépistage n’est pas anonyme. Les centres de planification familiale assurent le dépistage de manière gratuite. Le dépistage peut être réalisé de manière payante et nominative lors de tout contact avec le système de santé quel qu’en soit le motif lorsque le médecin considère que le sujet justifie d’être dépisté. C’est le cas notamment lors du suivi de la grossesse au cours de laquelle le dépistage du premier trimestre est obligatoire.
Enfin le dépistage de la syphilis est obligatoire dans le cadre des dons de sang.

— Avis de la Haute Autorité de santé
L’optimisation de l’utilisation des structures dédiées (Ciddist et CDAG dans certains cas) peut passer par :

  • le renforcement de leur visibilité auprès de la population cible et des professionnels concernés ;
  • le renforcement de leur rôle de conseil auprès des professionnels de santé (Ciddist) ;
  • le renforcement de leur rôle de surveillance épidémiologique (Ciddist).

De même le renforcement de la connaissance des CNR auprès des professionnels permettrait d’améliorer leur rôle de conseil. Le rôle éventuel du laboratoire CNR dans la centralisation des cas de syphilis congénitale est abordé plus haut.
La sensibilisation des professionnels au contact de la population cible, également abordée plus haut, constitue un levier supplémentaire visant notamment à optimiser les contacts avec les structures non dédiées. La formation des médecins qui le souhaitent à l’abord de la sexualité avec leurs patients serait utile dans ce cadre.
Remarque : La réglementation des Ciddist prévoit que la prise en charge thérapeutique des patients puisse être assurée de manière anonyme. La prise en charge des cas de syphilis nécessitant un suivi clinique et sérologique prolongé et exposant à des effets secondaires du traitement, l’ensemble des experts du groupe de travail exprime la quasi-impossibilité d’assurer ce suivi de manière anonyme sans risque d’erreur médicale. Des procédures visant à renforcer la confidentialité des dossiers mais permettant un suivi nominatif devraient être développées, comme c’est déjà le cas dans certains départements.

Notification des partenaires
— Principe
Il existe un consensus pour considérer que les partenaires sexuels des patients porteurs d’une syphilis doivent être pris en charge. En pratique, les sujets contacts ayant eu un rapport récent avec un patient porteur d’une syphilis précoce doivent être traités présomptivement du fait du risque de fausse négativité de la sérologie en phase précoce. Les délais retenus dans les recommandations françaises et internationales sont variables (de 30 à 90 jours). Un traitement présomptif peut également être proposé au-delà de ce délai, si le risque de perdre de vue le sujet contact est élevé ou si la réalisation du test est refusée. Les autres sujets contacts, ayant eu un rapport sexuel dans un délai qui dépend du stade de la syphilis du sujet index, doivent être testés et traités si la sérologie revient positive. Cette procédure (test et traitement si résultat positif) peut également être appliquée si la syphilis n’est pas certaine chez le sujet index. En cas de syphilis tardive, la notification concerne les partenaires sexuels de longue date ainsi que les enfants.

— Efficacité des différentes modalités de notification
Les données de littérature portant sur l’ensemble des IST suggèrent que la notification des partenaires est une stratégie efficace pour détecter de nouveaux cas et que la notification réalisée par les services de santé est plus efficace que celle réalisée par le patient lui-même. Son coût est plus élevé du fait de l’organisation nécessaire, ce qui remet en cause son opportunité. Elles suggèrent également que la notification réalisée par les patients peut être améliorée en termes d’efficacité par des formes simples d’assistance aux patients (ex. : remise de documents écrits, rappels téléphoniques) et par une approche éducative et de conseil auprès des patients. Les données sont en revanche insuffisantes pour conclure sur les effets de la formation des professionnels de santé. Enfin, il est impossible de quantifier les dangers potentiels de la notification (conséquences psychologiques, conséquences sur le couple), ce qui ne permet pas d’évaluer le rapport bénéfice/risque. Les données spécifiques à la syphilis ne permettent pas de trancher entre les différents types de notification et confirment que la notification impliquant les services de santé présente un coût marginal élevé. Une des limites de la notification appliquée à l’épidémie actuelle de syphilis est représentée par l’existence de nombreux partenaires anonymes au sein de la population la plus à risque et d’un taux de réinfection élevé.

— La situation française
En France, le Code de la santé publique prévoit que le sujet index doit être informé par le médecin le prenant en charge de la nécessité d'avertir son ou ses partenaires sexuels de consulter un médecin. La procédure de notification ne fait pas intervenir les services de santé et ne fait pas l’objet de recommandations, de formation ou d’outils d’aide spécifiques visant à en augmenter l’efficacité et à en diminuer les effets secondaires psychologiques et sur le couple.

— Avis de la Haute Autorité de santé
La notification des partenaires est un sujet qui relève d’un débat autour de multiples questions éthiques et de société mettant parfois en conflit le respect des libertés individuelles (questions de l’accord du patient et du respect de l’anonymat), la responsabilité du médecin (vis-à-vis des sujets contacts et de leurs partenaires), l’intérêt général (contrôle de l’épidémie) et le secret professionnel. Ces questions ne sont pas spécifiques à la syphilis et relèvent d’un large débat impliquant patients, professionnels, autorités éthiques et ordinales.
Il apparaît donc que la méthode suivie pour l’élaboration de ce document ne permet pas de recommander la notification des partenaires impliquant les services de santé, bien que cette dernière soit pratiquée dans certains pays et qu’elle ait pu montrer une certaine efficacité. Sa mise en place se heurte de plus à des contraintes organisationnelles et financières fortes posant la question du coût d’opportunité.
Il apparaît plus pragmatique d’explorer les moyens permettant d’améliorer la notification des partenaires exercée par le patient lui-même. Le but recherché est double : traiter le plus de sujets contacts contaminés possible mais aussi minimiser les effets psychologiques et sur le couple de l’information ainsi délivrée. Les moyens à disposition sont : i) l’éducation du patient pouvant être améliorée par la formation des médecins concernés et/ou par l’intervention d’autres professionnels spécialisés, et ii) l’élaboration d’outils écrits remis aux patients et comportant les éléments explicatifs nécessaires et les coordonnées du centre à contacter (la formulation de ce type de document par des professionnels de la communication en santé paraissant souhaitable dans le double but d’efficacité et d’acceptabilité indiqué ci-dessus). Des études supplémentaires seraient souhaitables pour préciser la place de ces différentes approches mais il apparaît dès à présent qu’une réflexion sur ce thème serait susceptible d’améliorer la mise en application de la loi nº 2001-616 du 11 juillet 2001 art. 75 faisant obligation au médecin de demander à son patient atteint d’IST d’avertir son ou ses partenaires de consulter un médecin. 

Stratégie spécifique de lutte contre la syphilis congénitale
Les mesures pouvant être proposées ont été énoncées dans les paragraphes précédents.
Elles concernent :

  • la définition des bonnes pratiques de dépistage :
    • dépistage universel lors du 1er examen prénatal et dépistage au 3ème trimestre chez les femmes à risque, du fait du risque de contamination après le premier dépistage,
    • mesures de vérification et de rattrapage comprenant le dépistage avant ou après l’accouchement si la sérologie n’a pas été réalisée au cours de la grossesse et la vérification systématique de la présence d’une sérologie syphilitique dans le dossier obstétrical avant que toute femme ne quitte la maternité,
    • dépistage des femmes ayant des antécédents de fausse couche spontané ou d’enfants mort-nés,
    • procédure diagnostique permettant de confirmer les cas dépistés grâce à la réalisation de deux tests tréponémiques (voire trois en cas de discordance entre les deux premiers) afin d’éliminer les faux positifs du dépistage ;
  • l’amélioration des pratiques, relevant principalement de l’information des professionnels de santé concernés (gynécologues, sages-femmes, médecins généralistes) sur :
    • les modalités de dépistage,
    • les modalités de confirmation des cas,
    • les modalités de prise en charge des cas, l’objectif étant d’éviter les traitements inadaptés (macrolides, traitements trop courts, absence de suivi), et les recontaminations par défaut de notification des partenaires ;
    • l’existence d’un CNR et de Ciddist pouvant prodiguer des conseils ;
  • la mise en place d’une surveillance épidémiologique spécifique.

L’analyse, par l’InVS, des cas de syphilis congénitale pouvant être identifiés en France permettra de choisir le système de surveillance le mieux adapté et d’orienter le choix des outils d’amélioration des pratiques et de leur contenu. Les mesures à prendre en cas d’identification d’un défaut d’accès au suivi prénatal, notamment de populations défavorisées, comme cause de syphilis congénitale dépassent le cadre de ce rapport.

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