Le vaccin SPIKEVAX® a obtenu une le 25 octobre 2021 une variation à l’autorisation de mise sur le marché (AMM) conditionnelle en Europe (procédure centralisée) et peut être administré en tant que dose de rappel (3ème dose à 50 µg), injectée par voie intramusculaire au moins 6 mois après la seconde dose, chez les personnes âgées de 18 ans et plus.

A qui s’adresse ces recommandations ?

Elles s’adressent aux décideurs publics


Quels sont les objectifs de cette recommandation ?

La présente recommandation s’inscrit dans le cadre d’une variation de l’AMM du vaccin à ARNm SPIKEVAX® développé par le laboratoire Moderna (concernant l’administration d’une dose de rappel de 50 μg) et vise donc à préciser la place du vaccin Spikevax dans la campagne de rappel en cours, au vu des données épidémiologiques, immunologiques, d’efficacité vaccinale en vie réelle et de tolérance en population générale.


Principales conclusions de la recommandation :

La HAS a pris en compte les nouvelles données qui étayent l’intérêt d’une injection de rappel dans la stratégie vaccinale contre la Covid, notamment :

  • Les études les plus récentes confirment une baisse au cours du temps de l’efficacité vaccinale observée en vie réelle contre les infections liées au variant Delta (efficacité entre 30 et 80 %) avec toutefois une efficacité contre les formes graves qui reste à un niveau élevé (supérieur à 80-90 %) durant la période où le variant Delta est devenu prédominant, et ce quel que soit le vaccin administré. Bien que cette baisse progressive de la protection au cours des 6 mois suivant la primovaccination soit essentiellement observée chez les plus âgés, certaines études rapportent qu’elle est constatée dans tous les groupes d’âge (à partir de 18 ans). Au vu des données disponibles, il est probable que cette baisse de la protection relève de la conjonction d’une moindre efficacité des vaccins vis-à-vis du variant Delta et de la diminution progressive de l’efficacité vaccinale à distance du schéma avec 2 doses de vaccin.
  • Des données complémentaires sur la cinétique virale du variant Delta chez des personnes primovaccinées indiquant que, si la charge virale chez les vaccinés apparait plus basse au pic, la différence s’estompe dans le temps, depuis la primovaccination.
  • Même si la primovaccination apparait efficace contre la transmission de l’infection par variant Delta (mesurée en termes de taux d’infections secondaires), cette protection semble se réduire avec le temps.
  • Les résultats des études comparant l’efficacité vaccinale de la primovaccination entre les vaccins Spikevax et Comirnaty sont discordants. Bien que plusieurs d’entre elles aient mis en évidence une efficacité vaccinale supérieure pour Spikevax par rapport à Comirnaty, il n’est pas possible de conclure formellement à ce stade à une supériorité de Spikevax par rapport à Comirnaty.
  • Les données israéliennes d’efficacité observée en vie réelle concernant une dose de rappel du vaccin Comirnaty actualisées au 12 octobre montrent qu’une 3ème dose est efficace pour réduire à la fois la transmission et la maladie grave chez les sujets âgés de plus de 16 ans et confirment l’efficacité chez les sujets âgés de 60 ans et plus après un suivi plus long. Une autre étude israélienne a montré que l’administration d’une dose de rappel est associée à une diminution statistiquement significative de la charge virale en comparaison à celle des personnes primovaccinées sans dose de rappel, suggérant qu’un rappel diminuerait aussi probablement la contagiosité des personnes développant une infection par le variant Delta du SARS-CoV-2.
  • Les données israéliennes de pharmacovigilance relatives aux taux de notification des myocardites après la dose de rappel avec le vaccin Comirnaty, actualisées au 10 octobre 2021, montrant chez les hommes un taux de notification après la dose de rappel inférieur au taux après la 2ème dose dans toutes les tranches d’âge. Aucun cas n’a été rapporté après la 3ème dose chez les femmes.

La HAS a pris en compte des considérations sur la place spécifique du vaccin Spikevax dans la campagne de rappel, au regard de la demande des laboratoires Moderna, notamment :

  • La délivrance par l’EMA d’une variation à l’autorisation de mise sur le marché conditionnelle quant à « l’administration d’une dose de rappel (3ème dose à 50 µg) de Spikevax, injectée par voie intramusculaire au moins 6 mois après la seconde dose, chez les personnes âgées de 18 ans et plus ».
  • Les données d’immunobridging, comparant la réponse immunitaire observée 1 mois après l’administration d’un rappel (à 6 mois de la primovaccination) par le vaccin Spikevax à 50 µg chez des sujets de plus de 18 ans issus de l’étude P201 partie A à la réponse observée chez les primo-vaccinés issus de l’essai de phase 3 P301, 1 mois après l’administration de la seconde dose, ont montré que :
  • La réponse humorale mesurée par le rapport des MGT du groupe « dose de rappel » (P201 B) par rapport au groupe « contrôle » (P301) était de 1,7 et donc non-inférieure après une dose de rappel.
  • Pour la différence entre les 2 groupes des pourcentages de sujets ayant eu une séroconversion, la non-infériorité de la dose de rappel par rapport au groupe contrôle n’a pas été satisfaite.
  • Les données complémentaires comparant la réponse immunitaire dirigée contre le variant Delta à celle contre la souche historique, ont montré une MGT en anticorps neutralisants plus faible mais dont l’augmentation entre J1 et J29 était comparable, quel que soit l’âge des sujets (tranche 18-64 ou ≥ 65 ans).
  • Les données complémentaires d’immunogénicité pour différents schémas hétérologues ont montré qu’un rappel par Spikevax à 100 µg (administré à 12-20 semaines après la primovaccination) induit une augmentation de la MGT en anticorps neutralisants, mesurés à 15 jours de la dose de rappel, quel que soit le vaccin administré en primovaccination, Spikevax, Comirnaty ou Janssen.
  • Les données de tolérance obtenues dans l’étude P201 B qui a porté sur 344 sujets ayant reçu une dose de rappel de Spikevax à 50 µg et l’étude DMID 21-0012 sur 154 sujets ayant reçu une dose de rappel à 100 µg ont montré un profil de tolérance du vaccin Spikevax globalement satisfaisant, généralement similaire à celui observé après l’administration de la 2ème dose
  • Les données françaises de pharmacovigilance à date (au 30/09/2021) relatives à la primovaccination par Spikevax (100 µg) en post-utilisation, avec notamment des myocardites/péricardites survenues principalement chez des adolescents et de jeunes adultes, plus souvent chez les hommes que chez les femmes, plus souvent après la 2ème dose du vaccin Spikevax, et généralement dans les 7 jours après la vaccination toute dose confondue.
  • Les résultats d’une analyse comparative des cas de myocardites survenus après les vaccins Spikevax ou Comirnaty suggèrent que, dans une population de moins de 30 ans, Spikevax pourrait être associé à une fréquence plus élevée de myocardites, en particulier chez les hommes et après la deuxième injection. Sur les données analysées, les délais de survenue sont plus courts pour Spikevax que pour Comirnaty.
  • Les données françaises de pharmacovigilance sur la troisième dose (D3 ou rappel) à 100 µg, ne montrent pas de signal particulier.
  • Les résultats de l’étude de pharmaco-épidémiologie (étude mise en œuvre par le GIS EPI-PHARE) montrent que la vaccination contre la Covid-19 par les vaccins à ARNm (Spikevax à 100 µg et Comirnaty) augmente globalement le risque de myocardite et péricardite dans les 7 jours suivant la vaccination chez les personnes âgées de 12 à 50 ans, avec une évolution clinique généralement favorable et une durée moyenne de séjour de 2 à 4 jours. L’association de risque de myocardite apparait plus marquée chez les hommes de moins de 30 ans en particulier au décours de la deuxième dose de Spikevax. L’excès de risque après la seconde dose est moindre avec le vaccin Comirnaty comparativement au vaccin Spikevax (100 µg).
  • Les données de pharmacovigilance américaines issues du Vaccine Safety Datalink (VSD) actualisées au 9 octobre montrent chez les sujets âgés de 18 à 39 ans, aussi bien pour Spikevax que pour Comirnaty, un risque accru de myocardites/péricardites dans les 7 jours après la 2ème dose et un RRa de myocardites par Spikevax pour la population âgée de 18 à 39 ans significativement plus élevé par rapport au même risque par Comirnaty dans les deux intervalles considérés (7 et 21 jours), après la 2ème dose ou toute dose confondue, en incluant ou pas les cas de péricardite dans l’analyse.

Recommandations relatives à la stratégie de rappel contre le SARS-CoV-2 – place du vaccin Spikevax

Pour rappel, le ministère avait annoncé le lancement d’une campagne de rappel à partir du 1er septembre pour les résidents des Ehpad et des unités de soins de longue durée (USLD), les personnes de plus de 80 ans vivant à leur domicile, les personnes qui présentent un très haut risque de forme grave selon la liste établie par le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, et les personnes immunodéprimées.

Dans son avis du 23 août 2021[1], la HAS a recommandé l’administration d’une dose de rappel pour les personnes de 65 ans et plus, ainsi que pour toutes les personnes présentant des comorbidités augmentant le risque de formes graves et de décès. Dans le cadre de l’obtention de l’extension d’indication du vaccin Comirnaty[2], la HAS a recommandé d’étendre l’administration d’un rappel aux professionnels du secteur de la santé, du secteur médico-social (y compris à l’ensemble des professionnels du transport sanitaire) ainsi que chez les personnes de l’entourage des immunodéprimés (stratégie de cocooning) uniquement chez les adultes âgés de plus de 18 ans.

La HAS avait par ailleurs considéré que compte tenu de la situation sanitaire et des données encore limitées sur les conséquences d’un déclin de l’efficacité au cours du temps chez les jeunes adultes et sur l’effet d’un rappel sur la transmission, il n’y avait pas lieu pour le moment de modifier les recommandations de la HAS quant à la pertinence d’un rappel en population générale, même s’il est possible que celui-ci soit nécessaire ultérieurement.

Pour rappel, la HAS a également recommandé de respecter un délai minimal de 6 mois entre la primovaccination complète et l’administration d’une dose de rappel qui doit se faire par un vaccin à ARNm, quel que soit les vaccins administrés en primovaccination.

L’ensemble des données cliniques et observées en vie réelle à date montrent qu’une injection de rappel du vaccin Spikevax à la dose de 50 µg effectuée 6 mois après la primovaccination induit une réponse immunitaire satisfaisante chez des personnes âgées de 18 ans et plus. Bien que le recul soit limité, les études réalisées, indiquent que cette troisième dose est globalement bien tolérée.

Si les données israéliennes recueillies en vie réelle pour la dose de rappel du vaccin Comirnaty semblent rassurantes, il convient toutefois de souligner que les analyses qui viennent d’être menées par l’ANSM et l’Assurance maladie dans le cadre de l’étude Epi-PHARE à partir des données du SNDS, ont récemment confirmé l’existence d’un risque de myocardite (et de péricardite) dans les 7 jours suivant la vaccination avec les vaccins à ARNm en France chez des personnes âgées de 12 à 50 ans et en particulier chez les personnes de moins de 30 ans. Ces données montrent que l’excès de cas pour un million de doses apparait environ 5 fois moindre pour le vaccin Comirnaty comparativement au vaccin Spikevax (100 µg) chez les 12-29 ans (tranche d’âge pour laquelle l’excès de cas par million est le plus élevé). Ces résultats sont concordants avec ceux issus des données américaines.

En revanche, plusieurs études conduites en conditions réelles d’utilisation tendent à montrer une efficacité vaccinale supérieure pour Spikevax (100 µg) par rapport à Comirnaty, confortant l’intérêt de ce vaccin chez les patients à risque de forme grave de Covid-19.

Ainsi, les deux vaccins ARNm présentent-ils une très bonne efficacité et des risques rares et résolutifs, mais avec une fréquence plus faible des risques pour le vaccin Comirnaty, et une efficacité un peu meilleure pour le vaccin Spikevax (100 µg).

C’est pourquoi, dans l’attente de données complémentaires sur le risque de myocardites et des conclusions du PRAC attendues dans les prochaines semaines et compte tenu de l’insuffisance de recul sur le risque de myocardites avec le vaccin Spikevax utilisé en demi-dose pour le rappel (50 µg) en raison des effectifs limités inclus dans les essais, la HAS recommande, pour la population âgée de moins de 30 ans et dès lors qu’il est disponible, le recours au vaccin Comirnaty qu’il s’agisse du schéma de primovaccination ou du rappel.

A l’inverse, la HAS recommande que le vaccin Spikevax, dont l’efficacité vaccinale paraît un peu meilleure, puisse être utilisé en primovaccination (en dose complète de 100 µg) et pour l’administration d’une dose de rappel en demi-dose (50 µg) chez les sujets âgés de plus de 30 ans, en particulier chez les personnes à risque de forme grave de Covid-19 conformément à la stratégie vaccinale recommandée (en primovaccination et pour le rappel vaccinal).

Ainsi que cela a été rappelé en début de ce document, la HAS précisera ultérieurement la démarche préventive globale des populations sévèrement immunodéprimées à très haut risque de forme sévère de COVID-19 pour lesquelles, a déjà été recommandée l’administration d’une troisième dose plus précocement voire d’une quatrième dose pour les non-répondeurs aux précédentes injections, cette dose devant être distinguée d’une dose de rappel à 6 mois. En particulier, la pertinence d’une recommandation préférentielle d’un des deux vaccins à ARNm actuellement disponibles pour les moins de 30 ans dans cette population particulière sera prochainement évaluée.

La HAS rappelle l’importance de la vaccination contre la grippe saisonnière (particulièrement au vu des premières données épidémiologiques disponibles sur la circulation des virus grippaux) et du rappel contre la Covid-19 afin de maintenir un niveau élevé de protection pendant la période hivernale des populations vulnérables (personnes de 65 ans et plus, et personnes présentant des comorbidités) et des professionnels du secteur de la santé et du secteur médico-social, surexposés et en contact régulier des plus vulnérables.

La HAS considère que, bien que le laboratoire ait fourni des données sur des schéma hétérologues avec Spikevax administré uniquement au dosage de 100 µg et que ces analyses portent sur des faibles effectifs, Spikevax peut être utilisé en rappel avec la dose de 50 µg chez des sujets, âgés de 30 ans ou plus (cf supra), primo-vaccinés avec d’autres vaccins.

La HAS rappelle par ailleurs que des études évaluant différentes stratégies de rappel en population générale avec des schéma hétérologues, y compris avec d’autres plateformes vaccinales que les ARNm ou les vecteurs viraux, sont en cours et viendront apporter de nouvelles données prochainement.

Enfin, la HAS réaffirme que la priorité est de tout mettre en œuvre pour augmenter la primovaccination de la population, en particulier dans la classe d’âge des 80 ans et plus, chez qui la couverture vaccinale complète est encore insuffisante (84,6 % au 26/10/2021) malgré leur grande vulnérabilité face à la maladie. Il est important de rappeler qu'à ce stade, l'objectif de la vaccination reste de protéger contre les formes graves et d'éviter une surcharge du système hospitalier.

La HAS rappelle à nouveau, au-delà des considérations éthiques[3], l’intérêt épidémiologique à utiliser la vaccination pour contrôler l’épidémie au niveau européen et au niveau mondial, y compris pour l’épidémiologie en France.

La HAS rappelle par ailleurs, l’existence de la liste de contre-indications mentionnées à l’annexe 2 du décret n°2021-1059 du 7 août 2021[4] prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire.

La HAS souligne à nouveau qu’il est également indispensable de maintenir un haut niveau d’adhésion aux mesures barrières, y compris chez les personnes ayant reçu un schéma avec 2 doses de vaccin, une baisse d’efficacité étant observée vis-à-vis du variant Delta, en particulier contre l’infection et la transmission.

Par ailleurs, la HAS insiste sur le fait que les études en cours devront être poursuivies afin de pouvoir disposer de données d’immunogénicité, d’efficacité et de tolérance à plus long terme et souhaite être informée de tous nouveaux résultats, notamment ceux des études mises en place dans le cadre du Plan de Gestion des Risques (PGR). La HAS souhaiterait également disposer d’informations complémentaires sur l’acceptabilité de la vaccination, en particulier sur les motifs des refus de vaccination chez les professionnels du secteur de la santé et du médico-social.

Cet avis sera revu en fonction de l’évolution des connaissances, notamment au regard des données d’efficacité et de sécurité en conditions réelles d’utilisation sur un plus long terme ainsi que des données épidémiologiques et de pharmacovigilance.


 

[1] Haute Autorité de Santé. Avis n° 2021.0061/AC/SEESP du 23 août 2021 du collège de la HAS relatif à la définition des populations à cibler par la campagne de rappel vaccinal chez les personnes ayant eu une primovaccination complète contre la Covid-19. Saint-Denis La Plaine: HAS; 2021. Avis n° 2021.0061/AC/SEESP du 23 août 2021 du collège de la HAS relatif à la définition des populations à cibler par la campagne de rappel vaccinal chez les personnes ayant eu une primovaccination complète contre la Covid-19

[2] Haute Autorité de Santé. Stratégie de vaccination contre la Covid-19. Place d’un rappel par le vaccin à ARNm COMIRNATY®. Saint-Denis La Plaine: HAS; 2021. Stratégie de vaccination contre la Covid-19 - Place d’un rappel par le vaccin à ARNm COMIRNATY®

[3] l’OMS a appelé début août à un moratoire sur les doses de rappel des vaccins anti-Covid pour pouvoir mettre ces doses à disposition des pays qui n’ont pu immuniser qu’une partie infime de leur population

[4] Décret no 2021-1059 du 7 août 2021 modifiant le décret no 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire


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