Avis n° 2021.0089/AC/SEAP du 30 décembre 2021 du collège de la Haute Autorité de santé relatif à l’extension de l’utilisation des autotests de détection antigénique du SARS-CoV-2 sur prélèvement nasal chez les personnes-contacts

Avis et décisions de la HAS - Mis en ligne le 02 janv. 2022

Rappel des précédents avis de la HAS concernant les autotests

Dans son avis du 23 avril 2021, la Haute Autorité de santé (HAS) s’est prononcée en faveur de l’utilisation des autotests de détection antigénique du SARS-CoV-2 sur prélèvement nasal dans les indications suivantes :

  • Indication médicale : chez les personnes asymptomatiques, dans le cadre d’un dépistage itératif ciblé à large échelle en alternative aux TDR/TROD antigéniques sur prélèvement nasopharyngé ou nasal ;
  • Indication sociétale : chez les personnes asymptomatiques dans le cadre d’une utilisation dans la sphère privée.

Contexte de la saisine

Dans sa saisine du 30 décembre 2021, le Directeur Général de Santé sollicite l’avis de la HAS sur « la possibilité d’utiliser les autotests antigéniques sur prélèvement nasal chez les personnes identifiées comme contact à risque », compte tenu notamment « d’une augmentation très soutenue de la circulation virale soumettant à leurs limites les dispositifs de dépistage et de contact tracing ».

En effet, depuis mi-décembre 2021, la situation sanitaire s’est très nettement dégradée compte tenu de la forte contagiosité du variant omicron induisant un nombre très important de nouveaux cas contaminés sur le territoire français (208 000 nouveaux cas au cours des dernières 24 heures) et par corollaire, un nombre encore plus important de personnes-contacts (probablement de l’ordre de 10 % de la population française si l’on considère qu’il y a entre 3 et 5 personnes-contacts par patient contaminé).
Les capacités de réalisation des tests virologiques (détection du génome ou TDR/TROD de détection antigénique) réalisés par les professionnels habilités ne seront pas suffisantes pour couvrir la totalité du besoin de détection chez les personnes-contacts.
Un recours aux autotests antigéniques sur prélèvement nasal chez les personnes-contacts serait susceptible d’augmenter de manière importante la couverture du besoin en tests chez ces personnes comme ce fut le cas dans les autres indications pour les personnes asymptomatiques. Un tel recours permettrait ainsi de moins peser sur les capacités de réalisation des tests virologiques, sachant que les autotests antigéniques sur prélèvement nasal sont désormais largement utilisés par les français avec une offre industrielle large (49 références actuellement inscrites sur le site du ministère de la santé).

Il est rappelé qu’une personne-contact est une personne qui a été en contact avec une personne positive au Covid-19 sans mesure de protection efficace. Ne sont donc pas considérées comme des personnes-contacts les personnes ayant été en contact avec une personne-contact, ou encore ayant été en contact avec une personne positive au Covid-19 avec mesure de protection efficace.

Il est également rappelé que les tests rapides antigéniques (TDR/TROD) et les autotests antigéniques, s’ils impliquent tous deux le même type de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro détectant les protéines virales, n’en demeurent pas moins différents, notamment par leurs modalités d’utilisation : les TDR/TROD antigéniques sont réalisés par un professionnel habilité (majoritairement un professionnel de santé), alors qu’un autotest est réalisé par l’usager lui-même. Un autotest peut également être réalisée par l’usager sous la supervision d’un professionnel de santé, notamment lors de la phase d’apprentissage de la réalisation de l’autotest (prélèvement nasal, manipulation de l’autotest, lecture et interprétation du résultat).

Performances des autotests antigéniques sur prélèvement nasal chez les personnes-contacts

Il n’a pas été identifié de données publiées relatives aux performances des autotests antigéniques sur prélèvement nasal spécifiquement pour les personnes-contacts.
Toutefois, il apparait pertinent d’extrapoler que ces performances devraient être du même ordre de grandeur que celles observées pour les TDR/TROD antigéniques réalisés par des professionnels pour les personnes-contacts en prenant en considération les éléments suivants :

  • Dans son avis du 27 novembre 2020, la HAS a recommandé l’utilisation des TDR/TROD antigéniques sur prélèvement nasopharyngé chez les personnes-contacts car la distribution des valeurs de Ct chez ces personnes était similaire à celle des patients symptomatiques. En cohérence avec ces observations, les performances rapportées des TDR/TROD antigéniques sur prélèvement nasopharyngé chez les personnes-contacts étaient du même ordre (sensibilité de 69,7% à 94,2% selon les études) que celles observées chez les patients symptomatiques ; Dans son rapport et son avis du 23 avril 2021, la HAS a recommandé l’utilisation des TDR/TROD antigéniques sur prélèvement nasal chez les personnes-contacts, compte tenu des performances diagnostiques de ces tests chez les patients symptomatiques (sensibilités poolées de 74 % et 82% en fonction du type de prélèvement nasal réalisé) et de la distribution de la charge virale précédemment mentionnée chez les personnes-contacts ;
  • Les performances diagnostiques des autotests antigéniques sur prélèvement nasal rapportées par les quelques études disponibles sont du même ordre que celles des TDR/TROD antigéniques sur prélèvement nasal réalisés par des professionnels de santé, que ce soit pour des patients symptomatiques ou pour des personnes asymptomatiques.

Par ailleurs, malgré une information du 28 décembre 2021 de la Food and Drug Administration (FDA) américaine sur une perte de sensibilité analytique des tests antigéniques pour la détection du variant omicron d’après des données préliminaires américaines (sans autre précision), il n’y a pas à cette date d’éléments probants démontrant une perte de sensibilité clinique des tests et autotests de détection antigénique pour la détection du variant omicron dans le contexte français où les tests utilisés doivent permettre la détection de la protéine N du virus SARS-CoV-2 pour être autorisés (exigence non retrouvée aux Etats-Unis). Une veille active sera poursuivie sur ce sujet, en lien avec l’ANSM.

Stratégie d’utilisation des autotests antigéniques chez les personnes-contacts

Pour faire face à l’augmentation massive du nombre de personnes-contacts induite par la circulation du variant omicron :

  • la stratégie de contact-tracing (personnes-contacts contactées par l’Assurance maladie) évolue vers une stratégie de contact warning (les patients contaminés contactent eux-mêmes leur personnes-contacts) ;
  • la stratégie de prise en charge des personnes-contacts (modalités d’isolement, de tests…) évolue également, conformément aux recommandations formulées par le Haut Conseil de la Santé Publique.

Ainsi la stratégie de prise en charge des personnes-contacts repose désormais sur une matrice décisionnelle du HCSP prenant en considération :

  • le statut vaccinal de la personne contact (schéma vaccinal complet selon les recommandations en vigueur de la HAS, schéma vaccinal incomplet, personnes non vaccinées) ;
  • et 3 phases d’évolution possible de la situation épidémiologique liée à la circulation concomitante des variants Delta et Omicron du SARS-CoV-2 :
    • phase 1 : avant l’émergence d’omicron ;
    • phase 2 : situation sanitaire caractérisée par un nombre de contaminations en forte croissance et des conséquences sociales et économiques encore limitées ;
    • et phase 3 : situation sociale, économique et sanitaire fortement dégradée avec un risque majeur de perturbations du maintien des activités socio-économiques et sanitaire du fait de l’exclusion d’un nombre important de personnes.

Lors de cette phase 3, la nouvelle stratégie préconisée par le HCSP prévoit, pour les personnes-contacts avec schéma vaccinal complet, de remplacer la quarantaine systématique par une surveillance active par autotest.

Compte tenu des performances diagnostiques et de l’évolution de la stratégie de prise en charge des personnes-contacts, la Haute Autorité de santé recommande, en complément des indications définies dans son avis du 23 avril 2021, l’extension de l’utilisation des autotests de détection antigénique du SARS-CoV-2 sur prélèvement nasal, préalablement validés, pour une autosurveillance par les personnes-contact (indication médicale) présentant un schéma vaccinal complet selon les recommandations en vigueur de la HAS, lors de la phase 3 telle que définie par le Haut Conseil de la santé publique. Cette autosurveillance devrait être réalisée selon les modalités suivantes :

  • Après un autotest initial réalisé dès l’information sur le contact1; sous la supervision d’un professionnel de santé habilité et s’étant révélé négatif, une autosurveillance par autotests antigéniques est réalisée par les personnes-contacts tous les deux jours pendant 6 jours ;
  • Si l’un de ces tests s’avère positif, il doit immédiatement faire l’objet d’une confirmation par test RT-PCR, permettant également de caractériser le variant en présence.

Le recours à la supervision par un professionnel de santé pour le test réalisé initialement permet de garantir la traçabilité des personnes testées, d’expliquer et de vérifier la bonne réalisation de l’autotest par la personne-contact et de leur transmettre les informations nécessaires pour la conduite à tenir à la suite de ce test initial.

Dans le contexte épidémique actuel, cette modalité de surveillance par autotest est valable pour toutes les personnes-contacts avec schéma vaccinal complet, qu’elles soient ou non à risque de développer une forme sévère de Covid-19 ou que les contacts aient eu lieu au sein du domicile ou en dehors du domicile.

Cette modalité de surveillance par autotest se substitue à la quarantaine. Les personnes-contacts concernées par cette modalité ne sont donc plus contraintes à l’isolement, mais appelées à un respect particulièrement strict des mesures barrière.

Si la personne-contact devient symptomatique durant cette phase de surveillance par autotest, elle doit alors se faire tester selon les recommandations en vigueur.
La HAS rappelle :

  • que les autotests antigéniques utilisés doivent permettre la détection de la protéine N du virus SARS-CoV-2 ;
  • l’importance pour un patient contaminé d’informer au plus tôt l’ensemble de ses personnes-contacts ;
  • la nécessité d’inciter à la vaccination de tous les adultes non encore vaccinés, d’accélérer la campagne de rappel et de renforcer l’adhésion aux mesures barrière, dont la réduction des contacts et l’aération fréquente des lieux clos, compte tenu de l’intérêt de ces mesures pour contenir l’épidémie de Covid-19 et préserver le système de soin.

Enfin, dans le contexte d’une forte circulation du virus chez les enfants d’âge scolaire, la HAS réitère sa recommandation de tester les enfants, notamment dans le cadre d’opérations de dépistage itératif. Pour mémoire, en dehors du prélèvement nasopharyngé parfois difficile chez l’enfant et non adapté à des tests itératifs, les modalités de prélèvement recommandées par la HAS chez l’enfant sont le prélèvement nasal (pour les tests antigéniques) et les prélèvements salivaire et oropharyngé (pour les tests RT-PCR).

Les données de performance disponibles à ce jour (uniquement chez les patients symptomatiques), ne permettent pas d’envisager également le prélèvement buccal ou les prélèvements combinés (nasal + buccal) pour le dépistage des enfants en milieu scolaire.

En fonction de l’évolution des connaissances scientifiques, notamment sur les distributions des charges virales du variant omicron et sur les performances diagnostiques des tests antigéniques vis-à-vis du variant omicron, cette position sera susceptible d’être revue.


 1 La date « J0 » utilisée dans les documents du HCSP correspond désormais à la date d’information de la personne de son statut de personne-contact (et plus à la date du contact ou à la date de la dernière exposition au contact).

Voir aussi