Pacte, s’engager pour réduire les incidents associés aux soins

Article HAS - Mis en ligne le 21 févr. 2018 - Mis à jour le 12 juin 2019

Plus de 25 % des évènements indésirables associés aux soins sont liés à un dysfonctionnement de l’équipe de soins. Lancé en 2013, le programme d'amélioration continue du travail en équipe (Pacte) donne la possibilité aux équipes de soins volontaires de s’engager collectivement pour sécuriser la prise en charge de leur patient. Témoignages de professionnels ayant participé à la phase d’expérimentation.

 

Après quatre ans d’expérimentation, la HAS présente les enseignements et retours d’expérience des équipes engagées. Au second trimestre 2018, les méthodes et outils destinés à améliorer le travail en équipe et à sécuriser la prise en charge du patient seront mis à disposition de l’ensemble des professionnels de santé.

Plus d’un quart des évènements indésirables associés aux soins sont en effet liés à un mauvais fonctionnement de l’équipe. Bien souvent, c’est un problème de communication qui est en cause. Le Pacte vise donc à renforcer l’écoute, la cohésion, le dialogue, la synergie ou la prise en compte du stress au sein d’une équipe de soins. « Le travail en équipe efficace est une barrière de sécurité et un facteur de qualité de la prise en charge », insiste Yasmine Sami, chef de projet « Sécurité du patient » à la HAS.

Deux équipes, qui ont participé à l’expérimentation durant la phase pilote, témoignent de l’intérêt à se lancer dans le Pacte pour renforcer la sécurité des patients.

 

Témoignage d'une équipe d'un service de réanimation pédiatrique et néonatale – Bicêtre (AP-HP/GH HUPS)

Avec Anne Dewynter, cadre paramédicale du pôle, Marie-Elisabeth Almira, cadre de santé réanimation pédiatrique et néonatale, binôme, Mathilde Durand, responsable qualité et gestion des risques et Cindy Frair, gestionnaire de risques – Facilitateurs

 

« Nous travaillons dans un grand service de réanimation néonatale avec une centaine d’infirmiers et plus de 50 aides-soignants issus de structures de soins très différentes. Il y existe un fort turn-over. Nous ressentions tous le besoin d’harmoniser nos pratiques, de mieux nous coordonner et de renforcer la cohésion des équipes. Avec l’appui de la direction de l’hôpital, nous nous sommes donc portés volontaires pour expérimenter le programme Pacte, suite à un appel à projets de la HAS.

Une « boîte à idées » a d’abord été installée dans le service pour recenser les dysfonctionnements des équipes en matière de communication et de coordination. Nous nous sommes ensuite réunis régulièrement en petits groupes pour identifier les problèmes majeurs. Parmi eux : la transmission d’informations « patients » lors des changements d’équipes. Cette procédure primordiale avait parfois lieu dans un couloir, dans le bruit, et durait trop longtemps, plus de 45 minutes. Cette désorganisation pouvait entraîner une perte d’informations, et être ainsi une source potentielle d’erreurs.

Nous avons donc « protocolisé » la relève d’équipes. Résultat : la transmission des informations d’une infirmière à l’autre est désormais effectuée au pied du lit du très jeune patient, en 15 minutes. C’est beaucoup plus efficace. 

En parallèle, nous avons systématisé l’utilisation d’une check-list avant d’ouvrir une chambre à un prématuré. Les infirmières suivent dorénavant un protocole pour ne rien oublier lors de l’installation des éléments nécessaires à la prise en charge très technique d’un prématuré : sachets de compresses, sondes d’intubation, disponibilité d'un système d'oxygénation, etc. Cette check-list est un gain de temps pour les équipes qui travaillent ainsi de façon plus sereine. Elle réduit les risques car il devient inutile de courir après le dispositif manquant.

Deux ans après son lancement, le Pacte est bien intégré dans notre service. Le programme fédère les équipes autour d’un projet commun, il valorise leurs efforts. Nous restons vigilants pour en maintenir la dynamique.

Aujourd’hui, au sein de notre GH, le programme Pacte est déployé en gériatrie, en neurologie et prochainement sur nos plateaux techniques ».

 

 

Témoignage de l'expérience d'une équipe de l'Institut Paoli Calmettes – Centre régional de lutte contre le cancer, Marseille

Avec Martine Bouyssie, facilitateur Pacte, directrice du département Qualité – Coordonnateur de la gestion des risques associés aux soins

 

Pour quelles raisons avez-vous choisi le service d’imagerie interventionnelle pour expérimenter le Pacte en 2015 ?

L’institut s’est doté d’une nouvelle salle de radiologie interventionnelle. Cette augmentation d’activité et de prise en charge de nouveaux patients était l’occasion d’améliorer nos pratiques, d’optimiser la communication au sein de l’équipe d’imagerie interventionnelle, et avec les autres professionnels tels que anesthésistes, brancardiers et notamment avec les patients.

 

Quel outil mis en place dans le cadre du Pacte a particulièrement impacté la sécurisation des soins ?

Il s’agit de la méthode du briefing/débriefing issue de la boîte à outils de la HAS. C’est un temps d’échanges entre les membres de l’équipe pour évoquer le programme d’intervention du jour, la répartition des tâches, les risques relatifs à l’acte radiologique, etc. Nous avons également instauré un temps d’information avec le patient avant son intervention chirurgicale. Avant le Pacte, les équipes n’utilisaient pas cette méthode. Aujourd’hui, elles la plébiscitent.

 

Quels indicateurs de soins ont progressé ?

Paradoxalement, ce sont les évènements indésirables graves. Nous en avons enregistrés 31 en 2017, contre 3 les deux années précédentes. Cela ne signifie pas que nous commettons plus d’erreurs. Cela montre que nous n’avons plus peur de les signaler et nous utilisons le système pour comprendre le dysfonctionnement et oser en discuter ensemble. Nous nous appuyons sur ces retours d’expérience pour améliorer nos pratiques.

 

En quoi consiste le rôle de facilitateur ?

Il porte les messages forts du programme, mobilise les équipes, anime les réunions, organise le déploiement des actions, diffuse les résultats et accompagne l’équipe en permanence dans une dynamique de changement. C’est une fonction essentielle à la réussite du programme.

 

Quels conseils donneriez-vous aux équipes qui s’engagent dans le Pacte ?

Cette démarche exige un engagement fort de la direction et des équipes. Son appropriation nécessite forcément une acculturation sur le long terme. Mais c’est un choix payant. Le Pacte renforce la cohésion d’équipe, sécurise la prise en charge du patient, optimise la gestion des risques et agit en faveur du bien-être des professionnels. Ce n’est pas un hasard si le programme est aujourd’hui intégré au projet d’établissement de l’Institut pour les cinq prochaines années.

 

Article rédigé par Citizen press

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