Indicateurs de qualité et de sécurité de soins et V2014, complémentarité et synergie des deux dispositifs
Catherine Grenier chef du service indicateurs pour l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, Vincent Mounic chef du service développement de la certification et François Bérard, chef du service certification des établissements de santé, nous font part de la politique nationale relative aux indicateurs de qualité et de sécurité des soins, de l'évolution de la stratégie de leur d'intégration dans la certification, des modalités concrètes de leur utilisation dans la procédure de certification V2014.
Quelle est la politique nationale relative aux indicateurs de qualité et de sécurité des soins ?
Catherine Grenier :
La promotion de la qualité s’appuie sur le déploiement national d’indicateurs de qualité et de sécurité des soins (IQSS) en établissements de santé (ES) afin de répondre aux objectifs partagés entre la HAS et la DGOS. Ces objectifs sont les suivants :
• Fournir aux ES des outils et méthodes de pilotage et de gestion de la qualité et de la sécurité des soins.
• Répondre aux exigences de transparence des usagers.
• Aider au reporting et au pilotage des politiques d’intervention à l’échelon régional et national.
Ce principe de mesure d’IQSS, s’appliquant à tous les ES, s'articule avec la procédure de certification de la HAS qui vise les mêmes objectifs.
Quelles sont les typologies d'IQSS ?
Catherine Grenier :
Les IQSS évaluent majoritairement, pour le moment, le processus. Ils s’intéressent à la qualité de mise en œuvre des actions de prise en charge, alors que les indicateurs de résultats s’intéressent au résultat des actions de prise en charge.
Certains des IQSS sont des indicateurs dits transversaux (ex. délai d’envoi du courrier): ils s’appliquent à l’ensemble des établissements et des services quelle que soit l’activité. D’autres sont des indicateurs de spécialités (ex. Basi prescriptions à la sortie après un infarctus) : ils s’attachent à évaluer spécifiquement une thématique clinique.
Ces indicateurs répondent tous aux qualités suivantes : pertinents pour les professionnels ; faisables avec une charge de travail acceptable ; présentant une marge d’amélioration ; pour lesquels une variabilité inter ES est observée.
Quelles sont les perspectives en matière de développement à plus long terme ?
Catherine Grenier :
Les développements actuels s’intéressent à des secteurs qui ne bénéficient pas encore d’indicateurs de qualité et de sécurité des soins spécifiques comme la radiologie (qualité du compte rendu) et la chirurgie ambulatoire ; une réflexion est en cours pour établir une doctrine sur le cycle de vie de chacun d'entre eux, mais aussi pour améliorer leur lisibilité par le grand public.
A ce jour, nous disposons d’IQSS construits à partir des données du dossier du patient, mais le faible degré d’informatisation des établissements de santé concernant le dossier patient (bien qu’en constante progression) induit une charge de recueil importante.
De ce fait, d’autres indicateurs de qualité et de sécurité des soins sont développés à partir des bases de données médico-administratives (PMSI/SNIIRAM) ; ils présentent un certain nombre de limites liées au codage mais peuvent être utilisés comme indicateurs d’alerte, nécessitant pour les établissements identifiés comme atypiques une analyse précise de la réalité et de la qualité des pratiques à partir des données cliniques. Il s’agit par exemple du taux d’hospitalisations potentiellement évitables pour une pathologie particulière ou du taux de thromboses veineuses. Des indicateurs sur le point de vue du patient intègrent également le dispositif via la mesure de la satisfaction mise en place par le ministère (Isatis).
Quelle est l'évolution de la stratégie d'intégration des indicateurs dans la certification ?
Vincent Mounic :
L’évolution de la « stratégie d’utilisation ou d’intégration des indicateurs dans la certification » concerne leur intégration dans le dispositif (manuel, compte qualité, visite, rapport de certification) et les modalités d’utilisation par les différents acteurs (équipes et établissements de santé, experts-visiteurs…).
La V2010 a représenté une étape importante dans le développement de la politique d’utilisation des indicateurs dans la certification en établissant un lien entre la certification et les indicateurs nationaux de qualité et de sécurité des soins (IQSS). Elle a exercé un levier fort pour inciter les établissements de santé au recueil de ces indicateurs et a contribué au développement d’une culture de la mesure chez les professionnels montrant l’apport de la mesure par les indicateurs pour objectiver la qualité des soins.
En V2014, la stratégie retenue vise à renforcer l’effet levier de la certification sur la démarche qualité mise en œuvre à partir des indicateurs transversaux et de spécialité et ainsi permettre une synergie entre les deux dispositifs Indicateurs et certification pour l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. Pour évaluer la qualité sur les thématiques, les EV s’appuieront à la fois sur la valeur de ou des indicateur(s) associés à cette thématique qui assure(nt) une fonction d’éclairage du niveau de maîtrise de la qualité sur une thématique, son/leur analyse par l’établissement et les équipes, la mise en place d’actions d’amélioration et leur suivi ; ils évalueront ainsi le travail réalisé par l’établissement et les équipes de démarche d’amélioration à partir des indicateurs en amont de la visite.
Quel est l'apport de l'utilisation des indicateurs dans le management de la qualité et des risques pour les établissements de santé ?
C’est dans la thématique « management de la qualité et des risques » que sera appréciée l’utilisation globale des indicateurs de qualité et de sécurité des soins dans la démarche d’amélioration à des fins de pilotage pour évaluer l’efficacité des actions mises en œuvre et l’atteinte des objectifs fixés. Il est attendu également que les établissements communiquent en interne et en externe sur les résultats de leurs indicateurs et comparent leurs résultats.
Cette évolution est d’ailleurs progressive car à la suite de l’instauration du recueil biennal des indicateurs, la prise en compte en visite, non seulement du résultat des indicateurs mais également de l’existence d’un plan d’actions, et de la mise en œuvre des actions d’amélioration constitue une transition vers la V2014.
Quels sont les enjeux de l'intégration des IQSS et des indicateurs du programme Hôpital numérique dans la certification V2014 ?
François Bérard :
Compte-tenu des orientations stratégiques de la nouvelle procédure, les enjeux de l’intégration des indicateurs nationaux dans la V 2014 portent sur :
• la cohérence et la lisibilité d’ensemble des dispositifs certification–indicateurs pour les établissements de santé et les experts-visiteurs et leur synergie pour l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ;
• le renforcement de l’effet levier de la certification sur la démarche qualité mise en œuvre à partir des indicateurs transversaux et de spécialité ;
• l’utilisation des indicateurs en tant que fonction d’éclairage du niveau de maîtrise d’un processus ou d’une thématique.
Quelles sont les modalités concrètes d'utilisation des indicateurs nationaux dans la procédure de certification V2014 ?
François Bérard :
Plusieurs éléments de la procédure intègrent ou nécessitent une articulation avec les indicateurs.
L’intégration des indicateurs concerne :
- le lien avec le manuel
Le manuel ne change pas en V2014.
La table de correspondance entre les IQSS, les indicateurs du programme Hôpital Numérique et les thématiques de la V2014 à disposition des établissements et des expert-visiteurs est établie pour les aider dans l’utilisation des indicateurs. Actualisée régulièrement, elle présentera de manière adaptée l’ensemble des indicateurs qu’ils soient obligatoires ou non et le lien possible avec les thématiques de la certification.
- le compte qualité
Lorsque les indicateurs nationaux obligatoires ont des valeurs en deçà des exigences définies il est attendu de la part de l’établissement une analyse et la mise en place d’actions d’améliorations.
- le programme de visite
Les résultats des indicateurs sont des données nécessaires à la définition du programme de visite. En cas de résultat d’indicateur en-deçà des exigences définies et d’absence de plan d’action, la thématique pourra être inscrite au programme de visite.
- la visite de certification
En visite, sont appréhendées par les experts-visiteurs la valeur de l’indicateur, l’année de son recueil, son analyse, son utilisation et la mise en place des actions d’amélioration qui s’y rattachent.
Il n’y a plus de lien d’automaticité entre la valeur de l’indicateur et la réponse à un attendu d’un critère. Il s’agit notamment d’évaluer en quoi la démarche qualité est fondée sur les indicateurs d’amélioration. Cette appréciation est intégrée :
• dans la thématique management de la qualité et des risques: les experts-visiteurs apprécieront comment l’établissement mobilise les indicateurs de qualité et de sécurité des soins dans sa démarche globale d’amélioration ;
• dans les autres thématiques concernées: les experts-visiteurs évalueront particulièrement les mesures et les démarches sur le thème traité.
- le processus décisionnel
Le recueil des IQSS nationaux obligatoires, la valeur des IQSS nationaux diffusés publiquement, la démarche d’amélioration qui s’y rattache sont pris en compte dans l'évaluation de la maturité de la thématique qui fonde la décision de la HAS.
Par ailleurs, dans le cas où l’établissement n’effectue pas le recueil des indicateurs ou ne l’effectue que partiellement, la HAS continue, comme en V2010, prononcera une réserve en cas de non-recueil ou d’une recommandation en cas de recueil partiel.
Propos recueillis par Florence Pouvesle
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