Événements porteurs de risques : paroles de médecins

Article HAS - Mis en ligne le 20 mars 2014 - Mis à jour le 12 juin 2019

Démarche volontaire fondée sur la déclaration d’événements porteurs de risques (EPR), l’accréditation concerne les médecins exerçant une spécialité ou une activité dite « à risques » en établissement de santé, comme par exemple la gynécologie-obstétrique, l’anesthésie-réanimation, la chirurgie, les spécialités interventionnelles, les activités d’échographie obstétricale, la réanimation ou les soins intensifs (…). L’accréditation constitue une méthode de DPC.
La base de retour d’expériences du dispositif de l’accréditation des médecins (base REX) regroupe les événements porteurs de risques médicaux (EPR)1 déclarés par les médecins, analysés et validés par les experts de la spécialité.
Ces EPR sont alors anonymisés et constituent une documentation privilégiée témoignant d’une acculturation progressive à la sécurité des patients...
Une sécurité impliquant les professionnels et les patients dans une expérience partagée.

Cas extrait de la base REX

Pour une intervention en ambulatoire, deux patientes qui doivent être opérées de la même pathologie se trouvent dans la même chambre. Le médecin réalise sa visite préopératoire mais il inverse les dossiers des patientes et indique à l’une d’entre elle qu’il va l’opérer du côté droit (alors qu’il s’agit du gauche).

Témoignage du « médecin déclarant »

« Cela m’est déjà arrivé deux fois : les malades m’ont fait remarquer que je me trompais de côté… On peut évoquer les répercussions psychologiques de la malade qui comprend qu’elle va se faire opérer par un chirurgien distrait… Barrière : je ne prends plus plusieurs dossiers en même temps … »

Commentaires d’un des experts de la spécialité

S’agissant d’une chirurgie fréquente (varices) et très répétitive au sein de la spécialité, les patients sont groupés pour une vacation opératoire donnée. Ils sont souvent réunis dans la même chambre ou dans des chambres contiguës en unité de chirurgie ambulatoire ou dans le service « de jour ». Cette situation amène le chirurgien à manipuler des dossiers extrêmement semblables pour des pathologies identiques. L’utilisation de cartographies réalisées par un phlébologue – qui peut parfois être le même spécialiste pour les patients concernés ­– augmente considérablement l’occurrence d’inversion.
Les conséquences, heureusement rares, peuvent être au pire l’irréparable erreur de personne ou de côté ou de type d’intervention (saphène interne au lieu de saphène externe, ou moins grave : radiofréquence au lieu de stripping mécanique).
La plupart du temps, le patient redresse lui-même le diagnostic d’erreur sur la personne ou sur le côté, mais ceci impacte sérieusement la relation de confiance patient-praticien : comment aborder en toute sérénité une intervention s’il y a erreur verbale sur la personne ou sur le côté ?

Les solutions de prévention de tels risques passent par un inlassable réflexe de vérification, qui s’apparente à une mini check-list « au fil de l’eau », car ne l’oublions pas, le patient n’est pas encore entré au bloc opératoire.
La méthode peut se faire sur un mode de conversation, qui loin d’énumérer un listing monotone, permet de vérifier les points cruciaux.

On pourrait imaginer la scène suivante où la conversation d’allure badine permet la vérification de chaque item en croisant l’information avec le patient qui participe au déroulement de son projet thérapeutique.

« Bonjour Madame A, pas trop stressée pour cette intervention de varices ? Reprenons ensemble, si vous le voulez bien, les principaux éléments : je vous opère aujourd’hui du membre inférieur gauche et la semaine prochaine du côté droit.
Nous avions convenu de confier le marquage à votre angiologue le Dr Untel ou que je fasse moi-même le marquage d’après les éléments donnés par votre angiologue lors de votre dernière consultation.
C’est bien du côté droit que le membre est le plus sensible, mais nous avions convenu de commencer par le côté gauche, qui est un peu plus complexe. Remontrez-moi l’endroit où la gêne est la plus marquée, etc. ».

La conversation peut également aborder à ce moment-là les questions relatives à un éventuel traitement à suspendre, si un accompagnant est bien prévu pour la sortie, etc.

Le même problème d’inversion peut survenir à la remise du courrier de sortie avec le risque d’une prescription inadéquate…

Dr Patrick Moreau
Cogestionnaire de l’organisme agréé pour l’accréditation Vascurisq.

1. En février 2014, 65 471 EPR ont été acceptés.

Toutes nos publications sur