Entretien avec Anne-Marie Pronost et Nicolas Estienne
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Anne-Marie Pronost, Directrice adjointe de la Clinique Pasteur de Toulouse1, visite de septembre 2010 | Nicolas Estienne, Directeur du Centre hospitalier de Martigues2, visite de décembre 2010 |
1) HAS – Quel est votre ressenti après cette dernière démarche de certification ?
Anne-Marie Pronost – La démarche de certification V2010 de la Clinique Pasteur a commencé bien en amont de la visite de certification de septembre 2010. Dès février 2009, l'ensemble des professionnels a été impliqué dans l'autoévaluation. À la Clinique Pasteur, la direction de la clinique et le département qualité/gestion des risques ont souhaité que la démarche soit participative. La dynamique impulsée par la V2 a été réactivée par la création de groupes de travail pluridisciplinaires pour chacun des critères du référentiel pour vraiment être dans l'esprit de la V2010 qui est par définition, un temps d’évaluation impliquant la mise en place d’axes d’amélioration et l’évaluation des pratiques professionnelles. Tous les acteurs de santé se sont sentis impliqués et mobilisés par la rédaction de l'autoévaluation, la préparation de la visite et enfin la rencontre des experts-visiteurs de la HAS. L'implication des professionnels de santé de la Clinique Pasteur – les médecins libéraux actionnaires, les soignants, les hôtelières, les administratifs, etc. – a été palpable à toutes les étapes de la démarche V2010.
Nicolas Estienne – La V2010 est moins formelle que les précédentes. Plus centrée sur les pratiques professionnelles, cette version permet aux professionnels de mieux s'approprier la démarche, et d'apporter une meilleure compréhension des objectifs fixés par la HAS.
La méthode autoévaluation simplifiée ainsi que les outils mis à disposition, nous ont permis de gagner un temps précieux dans la préparation de la démarche, sans perdre de vue les objectifs précis et clairs (exemple avec les pratiques exigibles prioritaires).
2) HAS – Depuis la première version, pourriez-vous dire que la certification est un outil de management interne dans les établissements de santé ?
Anne-Marie Pronost – La première version fut sûrement un moyen de sensibilisation à la culture qualité pour tous les acteurs de santé. La V1 a permis de faire un état des lieux, la visite de certification comportait un aspect pédagogique, forme d’accompagnement par des pairs pour développer une réflexion autour de la qualité en établissement de santé, nouvelle dynamique méconnue dans le secteur de la santé.
La V2 a permis de comprendre qu’il s’agissait d’une démarche d’évaluation avec une méthodologie plus contraignante. Au-delà de la prise de conscience de l’engagement inéluctable dans la démarche qualité et la certitude qu’aucune démarche de retour en arrière ne pouvait se produire, la HAS devient une institution mettant à disposition les guides de bonnes pratiques qui permettent d’avoir des repères pour mieux faire évoluer les procédures et les outils d’évaluation.
La V2010 est une démarche de certification qui devient un véritable outil de management. Le référentiel d’autoévaluation est structuré de façon cohérente, avec la visibilité de la politique de l’établissement de santé, les pratiques exigibles prioritaires, la gestion des risques et la poursuite de la démarche d’évaluation des pratiques professionnelles avec le suivi d’indicateurs. Au sein de la Clinique Pasteur, la V2010, à ce jour remaniée avec pertinence sur des critères inapplicables ou inappropriés (MCO et HAD), s'est avérée un réel outil de management, que le corps médical et les professionnels de santé ont mieux appréhendé. La communication et l’analyse des résultats ont mobilisé tous les acteurs de santé, y compris dans la collecte des éléments de preuve. La visite de certification a été un temps fort pour tous les professionnels de la Clinique qui ont tenu à montrer que ce qui était écrit dans l'autoévaluation se retrouvait dans leurs pratiques professionnelles quotidiennes. Il serait réaliste de dire que le management d'un établissement de santé par la qualité est aujourd'hui incontournable.
Nicolas Estienne – Oui, car le niveau de qualité attendu par la démarche de certification constitue un socle qualitatif et quantitatif s'appuyant sur une démarche d'amélioration continue de la qualité. Cette démarche qualité permet :
- d'étalonner nos pratiques professionnelles et d'être en cohérence avec les objectifs fixés par la HAS ;
- de mesurer les écarts qui séparent nos pratiques avec les attendus ;
- de mener des actions correctives légitimées par une évaluation externe indépendante et reconnue, qui dans d’autres contextes auraient été plus complexes à mettre en œuvre, avec parfois un niveau d'acceptation plus difficile à obtenir.
3) HAS – Quels sont les conseils que vous pourriez donner à un établissement récemment engagé dans la procédure V2010 ?
Anne-Marie Pronost – Le niveau de qualité maximum n’est jamais atteint, d’où l’intérêt de faire une autoévaluation honnête et de recenser tous les travaux réalisés. Les instances qualité « CLIN, CLAN, CLUD, Commission EPP, 3C, comité d’éthique, etc. » sont des véritables ressources qu’il faut mobiliser plus encore. Nous avons mis en place depuis les premières certifications un comité de pilotage de la qualité dans lequel la direction de la Clinique est largement représentée. Le support méthodologique du département gestion des risques et de la qualité suit l’ensemble des actions mises en œuvre et sa transversalité fait de ces membres un vecteur de transmission d’information essentiel à l’ensemble des professionnels. Chaque établissement construit son système de management de la qualité en lien avec ses activités, basé sur l’évaluation qui permet la mise en place de nouveaux plans d’amélioration de la qualité pas seulement centrés sur les exigences du manuel, mais aussi et surtout centrés sur le patient et son entourage.
Nicolas Estienne – Le maître mot de cette V2010 pourrait être "Anticipation". En effet, tous les outils mis à notre disposition par la HAS, nous permettent dans tous les cas de pouvoir "prévoir", pour mieux s'y préparer. Il est donc nécessaire que les établissements s'approprient les objectifs, les évolutions thématiques, et les outils de cette version, puis évaluent le temps requis et les moyens nécessaires à sa mise en œuvre.
Et pour finir, pourquoi ne pas se mettre en relation avec les établissements déjà certifiés pour un partage d'expérience ?
4) HAS – Comment envisagez-vous la certification de demain ?
Anne-Marie Pronost – La culture qualité étant maintenant solidement implantée, il serait, à mon sens, pertinent de garder maintenant une permanence de la méthode, donc de conserver le même référentiel et la souplesse dans la manière de le remplir. La visite de certification pourrait se passer sur un mode quasi identique faite par des pairs.
Nicolas Estienne – Par des audits ciblés plus fréquents, sur les fondamentaux mais aussi sur des éléments que l’on souhaite faire progresser spécifiques à chaque établissement (suivi d’indicateur, mesure des pratiques sur les parcours ou filières patients).
Propos recueillis par Florence Pouvesle, chef de projet – Service certification des établissements de santé
1 : Établissement privé - 356 lits dont 30 en hospitalisation à domicile - 42 places - Activités : médecine, chirurgie, hospitalisation à domicile
2 : Établissement public - 388 lits - 76 places - Activités : médecine, chirurgie, obstétrique, psychiatrie, soins de suite et de réadaptation, soins de longue durée.
Lettre Certification & Actualités N° 1, Avril-Juin 2011.