Entretiens avec les docteurs Joëlle Huth et Roger Rosario, présidents de CME
La loi "Hôpital, Patients, santé, territoires" n° 2009-879 du 21 juillet 2009 élargit les missions du Président de CME dans les établissements de santé.
Il est chargé :
- conjointement avec le Directeur de l'établissement de la politique d'amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que des conditions d'accueil et de prise en charge des usagers ;
- d'élaborer avec le Directeur en conformité avec le CPOM, le projet médical d'établissement, d'en assurer le suivi, la mise en œuvre et d'en dresser le bilan annuel ;
- de contribuer à la politique médicale de l'établissement en participant à la diffusion et à l'évaluation des bonnes pratiques médicales, en veillant à la coordination de la prise en charge du patient, en collaborant à la promotion de la recherche médicale et de l'innovation thérapeutique et en coordonnant l'élaboration du plan de développement professionnel continu des personnels médicaux.
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Docteur Joëlle Huth, |
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Docteur Roger Rosario,
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HAS – Comment appréhendez-vous l’évolution de ces nouvelles missions et plus particulièrement votre rôle dans la démarche de certification de votre établissement ?
Docteur Joëlle Huth – La CME et son (sa) président(e) a vu son rôle s’amplifier dans la démarche de son établissement. Les nouvelles missions se sont considérablement alourdies et complexifiées et sont centrales dans le bon fonctionnement de l’établissement.
Certes, les nouvelles missions des CME ont créé un surcroit de travail pour les médecins qui manquent de temps avec une compréhension difficile car elles ne font pas partie de notre culture médicale.
L’élaboration des réponses à la certification donne une impression de redondance entre les différentes questions, en particulier pour une structure de petite taille où ce sont les mêmes médecins, soignants et administratifs qui participent à toutes les missions. L’investissement en temps et en personnes est important et nécessite une ambiance sereine dans l’établissement mais crée une cohésion et des relations plus étroites entre les personnels en favorisant les rapports de confiance, de respect, et de valorisation du travail de chacun.
Par contre, la préparation de la certification, qui mobilise toutes les équipes, permet incontestablement une amélioration du fonctionnement de l’établissement, d’institutionnaliser des actions déjà faites, de mobiliser les médecins (assez individualistes…) dans la même direction, et dans les dispositifs d’accréditation personnels.
Cela permet également de mettre en évidence des manques, nous oblige à réfléchir ensemble à des problèmes non résolus auparavant et de prévenir des risques non encore survenus.
En conclusion, la CME aide l’établissement à rentrer dans la démarche de certification, en assure la préparation, mobilise les médecins vers un même objectif, crée le lien indispensable entre tous les acteurs (médicaux, soignants, administratifs) pour répondre aux exigences de la certification, pérennise les démarches pour le bien des patients et des personnels et la bonne santé de leur établissement.
Docteur Roger Rosario – J'appréhende avec difficulté. Nous constatons au sein de l'établissement que nous ne répondons pas complètement à ces nouvelles fonctions.
Nous sommes un établissement privé d'intérêt collectif à but non lucratif. Les praticiens gèrent leur propre activité. Ils participent bénévolement à certaines missions transversales. Ils sont très impliqués au sein des instances. Ce sont des acteurs au sein de chaque comité tel que le comité de lutte contre les infections nosocomiales, le comité de lutte contre la douleur, la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge, la commission éthique, etc. Mais nous ne sommes pas encore en phase avec l'ensemble du texte de loi qui demande un véritable travail de structuration.
À Saint Joseph, nous avons décidé de confier à un médecin de l'établissement une mission précise. Le rôle de ce médecin est d’être le représentant et l'interlocuteur privilégié du corps médical à travers la CME concernant les sujets qualité, sécurité des soins et surtout EPP en liaison avec les fonctions qualité et gestion des risques associés aux soins de l’hôpital. Il sera salarié à temps partiel. Il est, par ailleurs, expert-visiteur de la Haute Autorité de santé.
Avec l'appui indispensable de notre cellule qualité, il veillera à ce que les actions centrées sur la qualité et la gestion des risques soient mises en œuvre.
Certes, le rôle de la CME est d'impulser l'ensemble des démarches contribuant à l'amélioration des soins mais la coordination opérationnelle ne peut être effectuée qu'avec une structure qualité efficiente disposant d'une méthodologie et d'outils choisis.
La procédure de certification contribue à l’intérêt à agir pour les professionnels mais elle doit être pérenne.
Je souhaite notamment renforcer les revues de mortalité-morbidité au sein de l'ensemble des secteurs d'activité. Intégrée à la pratique quotidienne, la RMM est une méthode qui permet incontestablement de disposer d'enseignements sur les forces et les vulnérabilités et de mener les actions adaptées à la prise en charge des patients.
En conclusion, la loi place les CME au centre de la démarche qualité et gestion des risques. Il faut maintenant définir des objectifs spécifiques et réalisables.
Ces avancées réglementaires doivent être organisées en tenant compte de la réalité du terrain.
Propos recueillis par Florence Pouvesle, chef de projet – Service certification des établissements de santé
Lettre Certification & Pratiques n°4, janvier-mars 2012.